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Insolite Washington
(1) (Washington DC, Etats-Unis))
Heure locale

 

Samedi 27 octobre 2018

 

Avec ce nouvel article, j'ouvre une nouvelle série d'écrits consacrée cette fois à Washington (Etats-Unis), explorée sous ses aspects insolites et secrets. Quoi de mieux, pour commencer, que de se pencher sur la réplique du pétroglyphe de girafes de Dabous, deux girafes rescapées de la préhistoire saharienne qui se cachent à côté du siège de National Geographic, dans un coin arboré de la place. Voyage et dépaysement garantis avec cette reproduction des girafes de Dabous (Niger), un pétroglyphe néolithique de six mètres de haut situé dans une zone étendue du Sahara.Très inhospitalière, cette partie du Ténéré abritait il y a très longtemps une végétation luxuriante, entre 7000 et 10000 ans avant notre ère. Aujourd'hui, l'endroit plus désertique que jamais n'est traversé que par des tribus touaregs. Découverte par les Occidentaux en 1987, la plus grande gravure rupestre au monde (pour vous donner une idée, la région abrite plus de 800 de ces figures!) sera étudiée dix ans plus tard par le Trust for African Rock Art (https://africanrockart.org/?lang=fr) qui reconnut l'importance de cette œuvre secrète saharienne. Et un dispositif de protection d'être alors mis sur pied par l'UNESCO et le gouvernement nigérien pour surveiller le site. Le fameux pétroglyphe, qui présentait néanmoins des signes de détérioration, sera inscrit parmi les cent premiers monuments figurant sur la liste du patrimoine mondial en péril. La fondation Bradshaw (qui se consacre à la préservation et à l'étude de l'art rupestre dans le monde) et la National Geographic Society coordonneront leurs efforts pour reproduire avec minutie la scène des girafes en utilisant un moule en silicone et l'exposer largement. Cette première reproduction fut réalisée en France (Si,si...) avant d'être présentée à l'aéroport d'Agadez, à deux heures de route de Dabous. La seconde reproduction, elle, se trouve ici à Washington.


 

Il suffit de se rendre au siège de la Croix Rouge américaine pour admirer le vitrail Tiffany Favrile (ci-dessous en photo). Peu après son investiture, le président Teddy Roosevelt, alors en froid avec Louis Comfort Tiffany, exigea que soient démontés les remarquables vitraux Tiffany commandés en 1885 pour orner le vestibule de la Maison-Blanche. Non loin de là, un édifice d'une blancheur chatoyante, en marbre du Vermont, possède lui aussi un vitrail Tiffany datant de 1917 en verre « Favrile » (création la plus notoire de Louis Comfort Tiffany, à savoir un verre intégrant des sels métalliques) : le siège national de la Croix-Rouge américaine.

Lors de la visite, un guide vous conduit en haut d'un magnifique escalier en marbre, avant de passer juste après devant le journal et le nécessaire de couture de la fondatrice de la Croix-Rouge, Clara Barton, pour rejoindre la salle du Conseil des gouverneurs. Et c'est là, en arrière plan des objets offerts à l'association, que se trouve le triptyque de vitraux en hommage aux femmes héroïques qui s'occupèrent des morts de la guerre de Sécession. Conçu par Louis C.Tiffany, fils du célèbre joaillier, ce vitrail fut réalisé en verre « Favrile » aux Tiffany Studios. Seules les couleurs chair ont été peintes avec délicatesse en surface, avec des incrustations de verre coloré. En observant attentivement, on remarque ces incrustations sur la bride du cheval et dans la flamme de la lampe de sainte Philomène. Sur le vitrail de gauche, la patronne des cas désespérés est entourée des représentations de la Foi, de l'Espoir, de la Charité et de la Pitié, tandis que sur celui de droite figure Una, femme du chevalier à la croix rouge dans le poème allégorique du 16è siècle d'Edmund Spenser, La Reine des Fées. Les roses qui tombent de son tablier symbolisent un esprit généreux et cette dame est accompagnée de la Sagesse et de la Vérité. Le vitrail central, lui, décrit des chevaliers en armure qui se rendent au combat, dont l'un est agenouillé auprès d'un soldat blessé. L'ensemble de ce triptyque a été créé pour représenter l'esprit de la Croix-Rouge. Avec ses moulures décoratives, ce grand vitrail est la réalisation la plus audacieuse effectuée par Tiffany et conçue pour un édifice profane. Et la rénovation de 2005 d'avoir intégré une plaque de verre blindé à l'extérieur du vitrail et un rétroéclairage pour rendre l'ensemble encore plus visible.


 

Découvrons à présent les mosaïques murales des travailleurs de Lumen Winter (ci-dessous). Washington est en effet dotée d'une myriade de superbes mosaïques érigées en l'honneur de saints dans les nombreuses églises de la capitale, qu'il s'agisse de la cathédrale nationale, de la basilique du sanctuaire national de l'Immaculée Conception ou des dieux mythiques. Cette fois, c'est un hommage aux simples travailleurs américains qui s'expose sous les yeux des visiteurs et non loin de la Maison-Blanche.

Les deux magnifiques fresques furent réalisées d'après les plans de Lumen Martin Winter, artiste mosaïste de renom connu surtout pour ses fresques peintes. Et les œuvres mesurant 4 mètres de haut sur 21 mètres de long d'orner les murs des deux halls du siège de l'AFL-CIO, véritables merveilles en marbre, or et verre d'Italie. Le président Eisenhower assistera personnellement à l'inauguration du bâtiment et de la première mosaïque (alors intitulée « Labor is Life ») en juin 1956. Les personnages centraux, un père protecteur, une mère assise et un enfant avec un livre, furent d'ailleurs reproduits en septembre de cette même année sur un timbre imprimé à l'occasion de la Fête du Travail. Ce n'est que vingt années plus tard, lors de l'agrandissement de l'édifice, qu'une seconde fresque sera créée pour décorer le mur du second hall. Lumen Winter conçut alors une mosaïque sur le thème du travail, plus belle encore que la précédente, œuvre qu'il appela « le travail vient à bout de tout », maxime tirée de l'oeuvre du poète latin Virgile.

 

Il est un temple, noyé au milieu des tours de bureaux, qui sort du lot par ses couleurs intenses : le temple Almas. L'édifice, inspiré par l'architecture de l'Alhambra, abrite l'Ordre arabe ancien des nobles du sanctuaire mystique, connu désormais sous le nom de Shriners et surnommé « le terrain de jeu franc-maçon ». Cette société para maçonnique nord-américaine trouve ses origines en 1870 et fut créée pour s'amuser, se divertir et rendre service à l'autre. Malgré les apparences, l'ordre en question n'a aucun rapport direct avec la religion islamique, ce qui n'empêche pas ses membres de la fraternité de se saluer par « Es Selamu Aleikum » (Que la paix soit avec vous), auquel ils répondent « Aleikum Es Salam » (avec vous soit la paix), modifiant le salaam de l'Islam.

En 1885, dix francs-maçons du Rite écossais de Washington s'unirent avec des représentants du Boumi Temple de Baltimore pour fonder une société shriner dans la capitale américaine. Selon la coutume, cette fraternité reçut un nom arabe, Almas (qui signifie diamant) à sa création, le 14 juin 1886. Erigé en 1929, le temple présente une construction de style néo-mauresque avec de jolies céramiques et un remarquable triptyque inscrit au registre du patrimoine des Etats-Unis dès 1966, puis devenu monument historique en 1981. Huit ans plus tard, on démonta la façade de l'édifice ainsi que d'autres éléments. Chaque pièce fut alors numérotée, puis remontée quelques mètres plus loin suite au réaménagement du quartier . Et les membre de la fraternité Almas de poursuivre aujourd'hui leurs missions caritatives avec leur petit fez rouge sur la tête, au milieu des splendides mosaïques polychromes, les dernières de Washington.


 

Penchons nous à présent sur la proclamation préliminaire d'émancipation d'Abraham. Nous sommes en décembre 1951 et Barney Balaban, fils d'immigrants juifs de Russie et président de Paramount Pictures offre un document historique dont il a fait l'acquisition aux enchères. Ce document, il ne l'a pas trouvé auprès des Archives nationales, de l'Institut Smithsonian ou de la Bibliothèque du Congrès mais dans une simple église. Et Balaban d'affirmer que cet écrit est l'un des plus importants du patrimoine américain, à savoir le brouillon d'un décret d'émancipation qui fut rédigé par le président Lincoln le 14 juillet 1862. Le précieux écrit est désormais exposé au Lincoln Parlor de la New York Avenue Presbyterian Church.

Le fameux décret ne put être publié si tôt mais nous sommes bien ici en présence de la version préliminaire de la Proclamation d'émancipation du 1er janvier 1863, qui marqua le premier pas en faveur de l'abolition de l'esclavage aux Etats-Unis. Le manuscrit de deux pages fut d'abord conservé plusieurs années au département de la Guerre, puis fut récupéré par un gardien au moment où le document allait être voué à la destruction. Et l'objet d'être détenu par la famille de cet homme plusieurs décennies durant, jusqu'à se retrouver exposé dans cette église jadis fréquentée par Lincoln en personne, témoignant ainsi de la mission d'intégration et de justice sociale de la congrégation. Autre clin d'oeil à l'histoire : le poteau (situé devant l'entrée de l'église) auquel l'ancien président des Etats-Unis attachait son cheval lorsqu'il venait à l'office, et un vitrail à son effigie qui est installé au-dessus du banc de la famille Lincoln.

 

INFOS PRATIQUES :

 

  • Réplique du pétroglyphe des girafes de Dabous, à côté du National Geographic (1145 17th Street NW, Washington), sur la place. Tél:+1 202 857 7588. Accès par le métro Farragut North (ligne rouge) ou Farragut West (lignes bleue, orange ou grise)
  • Vitrail Tiffany Favrile au siège national de la Croix-Rouge américaine, 430 17th Street NW, à Washington.Tél : +1 202 303 4233. Ouvert les mercredi et vendredi, visites à 10h00 et à 14h00 sur réservation (tours@redcross.org) et sur présentation d'une pièce d'identité. Site internet : https://www.redcross.org/about-us/who-we-are/history.html

     

    Accès en métro : ligne rouge (station Farragut North) ou lignes bleue, orange ou grise (station Farragut West)

  • Mosaïques murales des travailleurs, de Lumen Winter, siège de l'AFL-CIO, 815 16th Street NW, Washington. Site internet : https://aflcio.org/ Tél:+1 202 637 5000. Ouvert du lundi au vendredi de 9h00 à 16h30. Seule la mosaïque « Labor Omnia » est visible dans le hall d'entrée. Pour voir l'autre mosaïque « Labor is life », contacter Chris Garlock (cgarlock@dclabor.org

    ) . Accès par métro : lignes bleue, orange ou grise, station Farragut West)

  • Temple Almas, 1315 K Street, à Washington. Tél : +1 202 898 1688. Site internet : https://www.almasshriners.org/

    . Accès par métro, lignes bleue, orange ou grise (station McPherson Square)

  • Proclamation préliminaire d'émancipation d'Abraham, au Lincoln Parlor of the New York Avenue Presbyterian Church, 1313 New-York Avenue, Washington. Tél : +1 202 393 3700. Des visites ont lieu du lundi au vendredi de 9h00 à 16h30. Accès internet : http://www.nyapc.org/

    . Accès : lignes bleue, orange ou grise (station McPherson Square)











 



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