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Musée Maritime national de Nouvelle-Zélande
(Auckland, Nouvelle-Zélande)
Heure locale

 

Dimanche 28 avril 2019

 

Il est un lieu qui rend hommage à l'héritage naval dont dispose la Nouvelle-Zélande : le Musée maritime national que je visite aujourd'hui témoigne que ce pays ne serait pas ce qu'il est sans les pirogues des Polynésiens, les baleiniers qui vinrent mouiller à Russell et les navires en tout genre qui acheminèrent des milliers d'immigrants. Franchissons les portes de ce musée que les Maoris surnomment Huiteananui-a-Tangaroa, maison légendaire de Tangaroa (Dieu de la mer).

Le musée maritime s'étend sur deux niveaux d'un vaste hangar et offre à la fois une approche historique et ludique de l'histoire navale du pays au long nuage blanc. Je débute ma visite par le rez-de-chaussée avec les Maoris et leurs pirogues (ci-dessous). Un texte raconte l'histoire de Maui, l'un des héros de la littérature orale polynésienne. Fils de Taranga, Maui nait miraculeusement tandis que sa mère jette l'enfant prématuré à la mer. Les esprits de l'océan le découvrent et l'enveloppent dans des algues. Et l'ancêtre divin de Maui de prendre l'enfant sous son aile et de l'élever jusqu'à son adolescence. Maui retourne alors dans sa famille où il fait connaissance de ses quatre frères et de sa sœur Hina.. D'abord méfiants, ses frères l'admireront vite pour ses tours de magie mais Taranga, la maman, ne reconnaitra pas l'enfant immédiatement. Restant au milieu des siens, Maui décida bientôt d'attraper le soleil et de le faire avancer plus lentement pour rallonger les jours et permettre aux gens de finir leur journée de travail. Puis, il attrape l'île du Nord en la hissant depuis le fond de l'océan en utilisant à nouveau la mâchoire de son ancêtre Muriranga-whenua. Le grand poisson des profondeurs sera ainsi ramené à la surface tout en demandant à un prêtre de réaliser rites et prières. Maui confie le poisson à ses frères mais ces derniers découpent très vite l'animal qui se tord de douleur, créant ainsi montagnes et vallées. Ainsi naquit la Nouvelle-Zélande (Aotearoa) avec l'île du Nord le poisson de Maui) et l'île du Sud (le bateau de Maui). Insatiable, Maui découvrira les secrets du feu, puis se mettra en quête de l'immortalité. Infatigable, il créera les îles Hawaii pour jouer un tour à ses frères : ayant convaincu ces derniers de l'emmener pêcher, il prétend qu'il a attrapé un gros poisson et leur demande de ramer plus fort pour le remonter. Les frères s'exécutent aussitôt mais ne remarquent pas l'île (le poisson) émergeant derrière eux et Maui répète son tour plusieurs fois, faisant ainsi naitre les Îles Hawaii.

Je découvre sur place les waka, ces canoës maoris qui servent depuis très longtemps à ce peuple pour le transport des personnes et des biens. Ces pirogues étaient fréquemment transportées d'une rivière à une autre à travers le bush, les rapides, les chutes d'eau et divers autres obstacles. Les riches informations offertes sur place (en anglais) m'apprendront qu'il existe plusieurs sortes de waka, depuis l'embarcation de pêche primaire jusqu'au navire de guerre richement décoré et conçu pour la haute mer. Malheureusement, ces « waka unua » tendront à disparaître au début du 19è siècle. Les premiers Européens, eux, qui furent ici au contact des Maoris dès le 17è siècle connaitront ces embarcations ainsi que les pirogues à balancier (déjà repérées par James Cook). Aujourd'hui, seule la pirogue sans balancier existe encore, dont la waka tete et la waka taua.


 

Un vaste espace offre d'observer une pirogue géante à balancier qui côtoie tout autour des embarcations plus modestes. Ici et là, des objets sont exposés dont les rames servant à manoeuvrer les pirogues (photo ci-dessous). Dans la salle voisine, je fais la connaissance d'un compatriote, Marc-Joseph Marion du Fresne, malouin comme moi, et explorateur français parti en 1772 à la recherche des Terres australes, à bord des vaisseaux Mascarin et Marquis de Castres. Après être reparti d'Australie, notre homme passera cinq semaines dans la Bay of Islands (Nouvelle-Zélande), séjour au cours duquel ses hommes entretiendront d'abord les meilleures relations avec les Maoris locaux, Ngare Raumati iwi, jusqu'à ce que l'accumulation de maladresses par les Français ne devienne trop lourde pour les Maoris et n'entraine une explosion de violence : Du Fresne et 24 de ses hommes seront tués par les Maoris tandis qu'au moins 250 Maoris seront à leur tour massacrés par les Français en signe de riposte. Cet épisode convaincra la France que la Nouvelle-Zélande était trop « imprévisible » pour être colonisable, ce qui n'empêchera pas l'envoi de futures nouvelles expéditions toujours à la recherche de la Grande terre du Sud.

D'autres nations débarqueront dans la région : les Espagnols et les Portugais, eux aussi en quête de nouvelles richesses, convoiteront les Îles Moluques pour leurs épices avant de poursuivre leurs recherches de la Grande terre du Sud mais personne ne s'accorde à dire lequel était arrivé là en premier. Les Hollandais étaient pour leur part convaincus que leur prospérité passerait par l'annexion de nouveaux territoires. A la recherche d'une base dans le Pacifique, ils bâtirent d'abord Batavia (l'actuelle Jakarta, en Indonésie) dès le début du 17è siècle. Puis envoyèrent le marin Abel Tasman en mission pour trouver, or, argent et....de nouvelles terres ! Les Anglais ne tarderont pas à débarquer avec l'espoir de changer « la carte du monde ». Rien de moins. C'est seulement plus d'un siècle après la découverte de la Nouvelle-Zélande par Abel Tasman que deux premiers navires européens atteignirent en même temps ce pays : le « Endeavour » britannique et le « Saint Jean-Baptiste » français. Et James Cook de jouer effectivement un rôle primordial dans la conquête britannique en traçant sur une carte, en un peu plus de six mois et avec une précision remarquable pour l'époque les îles principales de la Nouvelle-Zélande.

 

L'histoire navale de ce pays mentionne également l'emploi du chaland, ce bateau à fond plat utilisé sur les rivières, les canaux et les rades. On en dénombrait un nombre important dans l'île du Nord servant à transporter bois massif, bois de chauffage, sable, galets et bétail jusqu'à la ville d'Auckland. On trouvait quelques-uns de ces chalands dans certains ports de l'Île du Sud, et d'autres encore plus grands dédiés au transport du bois vers l'Australie. Le premier chaland néo-zélandais sera construit en 1873, d'après les plans d'embarcations similaires déjà existantes aux Etats-Unis. Au total,130 chalands seront construits puis utilisés jusque dans les années 1930.

 

Né à Edimbourg (Ecosse) en 1817, John Logan Campbell (en photo ci-dessous) deviendra plus tard « le père » de la Nouvelle-Zélande. Après avoir suivi des études de médecine, notre homme, désormais médecin, embarque en 1839 en tant que chirurgien sur le bateau « Palmyre », en partance pour la Nouvelle Galle du Sud. Il atteint la Nouvelle-Zélande pour la première fois un an plus tard puis se rend bientôt à Auckland (fondée par le gouverneur William Hobson). Campbell sera ainsi le premier Européen à s'installer dans ce pays, au même titre que l'avocat (écossais lui aussi!) William Brown. Notre homme bâtira la première maison à Auckland et ouvrira la première boutique. Bien introduit dans les milieux d'affaires et dans la vie publique, John Logan Campbell sera directeur de la Banque de Nouvelle-Zélande, puis de deux autres sociétés de prêt et d'assurances. Il deviendra aussi super-intendant de la Province d'Auckland entre 1855 et 1856. Puis membre du parlement peu de temps après. Il sera même momentanément ministre sans portefeuille du gouvernement d'Edward Stafford (de juin à novembre 1856). En bons Ecossais, Campbell et Brown feront des affaires ensemble en lançant la compagnie Brown & Campbell, la première entreprise commerciale du genre en Nouvelle-Zélande.

 

La Nouvelle-Zélande connaitra elle aussi la pêche à la baleine (ci-dessous). Celle-ci débutera avec l'installation d'une station de chasse à Te Awaiti en 1827 dans les Marlborough Sounds. Ces cétacées pullulaient dans les années 1820 lorsque Jackie Guard, originaire de Sydney (Australie) se lança dans cette entreprise. Les courageux baleiniers s'aventuraient alors à bord de barques pour harponner les cétacés (principalement des baleines à bosse et des baleines noires) dans le Tory Channel, avant de ramener les grands animaux sur la côte pour les exploiter. A l'époque, l'huile de baleine était très convoitée et servait à la fois dans l'industrie et pour les taches domestiques. Et le pays d'assister rapidement au déploiement d'une centaine de stations baleinières le long de ses côtes. A ce rythme-là, quinze années suffiront pour voir s'effondrer le nombre de ces cétacés et la pêche à la baleine dans le même temps. Des bateaux spécialement équipés pour cette chasse poursuivront leurs activités à l'intérieur des eaux néo-zélandaises jusqu'à l'interdiction pure et simple de cette chasse en 1964.

 

Ce musée maritime est si complet qu'on pourrait y passer des jours. N'en ayant ni le temps ni l'énergie, je me contenterai de survoler certaines galeries comme, par exemple, celle consacrée au yachting : durant les années 1870, un nombre croissant de Néo-zélandais s'intéressaient à cette activité en tant que compétiteur lors de régates ou comme simple passe-temps. Et les modèles de bateaux adaptés aux conditions locales de navigation de se démultiplier également. La plupart des concepteurs et de constructeurs de ces embarcations étaient d'ailleurs eux-mêmes des marins aguerris, qui partageront savamment leur savoir-faire en adéquation avec leurs intérêts tout en se tenant informés des progrès en la matière dans le reste du monde. Ces hommes furent le ferment des incroyables talents navals développés par ce pays au 20è siècle.

Ce n'est pas un hasard si la Nouvelle-Zélande détient la premier rang en terme de liaisons maritimes vers l'Est australien, en direction de la côte ouest nord-américaine et vers les autres îles du Pacifique. Très tôt, Auckland s'est positionné comme un port en plein essor sachant accueillir la croissance tout en développant les structures appropriées (comme la construction navale) et en utilisant les ressources naturelles (dont le bois de kauri) pour la construction des navires. Jamais à cours d'imagination, les Néo-zélandais inventeront aussi la brassière de sauvetage idéale (ci-dessous) à la suite du naufrage du « Titanic » en 1912. Répondant à un appel d'offre, un certain Orpheus Beaumont proposera un modèle de brassière constituée de panneaux cousus rembourrés de fibre de kapok, une plante très légère, imperméable et imputrescible. Six ans plus tard, des milliers d'exemplaires de cette brassière seront utilisés au Royaume-Uni et en Nouvelle-Zélande. Ironie de l'histoire : on apprendra plus tard que la fibre de kapok est aussi extrêmement inflammable. Il faudra attendre l'incendie du paquebot « Normandie » dans le port de New-York en 1942 pour s'en apercevoir.

La sécurité maritime a toujours été un enjeu : protéger les occupants d'un navire de la noyade c'est bien, mais prévenir les naufrages c'est mieux. Or, les milliers de kilomètres de côtes accidentées dans ce pays, sans parler de l'accroissement des liaisons maritimes, nécessiteront le maillage du littoral avec des phares. Les mille naufrages de bateaux survenus au cours des cinquante premières années de présence coloniale en Nouvelle-Zélande avait ému l'opinion publique. Certes, des balises avaient bien été installées ici et là dans les endroits les plus reculés du territoire dès 1831, mais il faudra attendre 1859 pour voir apparaître le premier phare néo-zélandais à Pencarrow Head (Wellington). Celui-ci était alors gardé par une femme, Madame Bennett. Un second phare verra le jour trois ans plus tard à Boulder Bank (Nelson) en remplacement d'une précédente balise. Une galerie du musée distille au public une abondante information sur les phares néo-zélandais avec force détails. Nous voici bien éclairés !

 

INFOS PRATIQUES :

  • Musée maritime national de Nouvelle-Zélande, à l'angle des rues Quay Street et Hobson Street, Viaduct Harbour, à Auckland. Tél : +64 9 373 0800. Ouvert tous les jours de 10h00 à 17h00. Entrée adulte (pour visiteur n'habitant pas Auckland) : 20 NZ$. https://www.maritimemuseum.co.nz/








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