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L'ancienne Résidence du Prince Asaka
(Tokyo, Japon)
Heure locale

 

Vendredi 30 août 2019

 

Il est un musée d'art métropolitain que je découvre aujourd'hui pour la première fois, le Musée Teien de Tokyo. Celui-ci, qui a ouvert ses portes en 1983 se distingue d'entrée par son architecture puisqu'il est abrité à l'intérieur de l'ancienne résidence du prince et de la princesse Asaka. L'ouvrage sera bâti en 1933 dans le style architectural dernier cri de l'époque. Il faut dire que les propriétaires avaient étudié et séjourné à Paris durant les années 1920, ce qui peut expliquer leur attachement au style Art Déco, qui décore l'intérieur de la superbe propriété. Cette décoration intérieure, qu'il s'agisse de la décoration murale, du mobilier ou des luminaires, surprend immédiatement le visiteur : l'ornement des salles principales (hall d'entrée, grand salon, grande salle à manger, bibliothèque) fut confié à René Lalique et Henri Rapin, deux des plus grands artistes décorateurs français de l'époque. Et l'édifice d'incarner l'amour japonais pour l'Occident moderne. L'ancienne Résidence Asaka fut longtemps décrite comme une structure visionnaire, ou encore un joyau de l'Art Déco avant d'être désignée comme bien culturel national important en 2015. L'ensemble se dresse au milieu d'un jardin luxuriant qui lui sert d'écrin.


 

C'est en 1906 que la branche Asaka de la famille impériale sera fondée par le Prince Yasuhiko, huitième fils du Prince Kuni Asahiko. Et notre homme de partir en France en 1922 pour étudier les affaires militaires, et de se blesser au passage dans un accident de la circulation. Son épouse le rejoindra alors et le couple restera en France jusqu'en 1925. Or, cette époque correspond justement à l'âge d'or de l'Art Déco dans notre pays. Le Prince et la Princesse, séduits par cet art, choisiront plus tard d'intégrer dans leur nouvelle résidence les plus brillants éléments de ce style naissant en s'attachant les services de l'artiste français Henri Rapin. Et le musée actuel de s'y insérer sans changer quoique ce soit à l'édifice.

La Résidence du Prince Asaka sera achevée en mai 1934, avant d'être empruntée quatorze années plus tard par l'Etat et de servir de résidence officielle au ministre des affaires étrangères et au Premier ministre Yoshida Shigeru. Puis, l'endroit accueillera à partir de 1955 des hôtes d'Etat de Shirokane jusqu'à son remplacement par celle d'Asakasa. 1983 verra l'entrée du musée d'art métropolitain Teien de Tokyo le 1er octobre de cette même année. Dix ans plus tard, la Résidence deviendra la première structure à être désignée bien culturel important par le gouvernement métropolitain de Tokyo. Quant au musée, il célébrera le 30è anniversaire de son ouverture en 2013 et des travaux seront effectués dans différentes parties de la propriété jusqu'à offrir depuis 2018 une réouverture générale de l'ensemble.


 

La chose la plus marquante en franchissant le hall d'entrée principal est l'existence de portes aux bas-reliefs de verre et de leurs déesses ailées, œuvres de l'artiste verrier français René Lalique. Les quatre silhouettes des déesses ressortent des panneaux, et donnent ainsi l'impression aux invités de leur souhaiter la bienvenue.La mosaïque du sol est en pierre naturelle et fut réalisée d'après un modèle dessiné par Takashi Oga.

La salle d'attente officielle, uniquement accessible par le hall d'entrée fut celle où serviteurs et chauffeurs des visiteurs attendaient leurs maitres. Colonnes, portes et rebonds des fenêtres sont en bois d'érable, un bois difficile à travailler mais dont la surface offre un rendu brillant comme de la soie. Les motifs du parquet sont en damier et le papier peint, reproduction du revêtement d'origine, fut fabriqué par la manufacture suisse Salubra.

L'imposant hall principal (ci-dessus) accueillait les invités du Prince Asaka, avec son lustre et ses quarante lampes rondes fixées dans un treillis en bois, sa cheminée et son miroir, et le bas-relief en marbre sur l'escalier principal, œuvre du sculpteur français Ivan-Léon Blanchot. Il arrivait même au couple princier de danser dans cette grande pièce.

Le petit salon (deuxième photo ci-dessus), lui, avait pour fonction d'accueillir de petits groupes d'invités. Les quatre murs sont recouvertes de peintures à l'huile posée par Henri Rapin. On y voit des paysages d'arbres et d'eau dans des teintes vert tendre. Une cheminée en pierre serpentine verte de Tinos, importée de Grèce, fait partie de l'ensemble.

L'antichambre relie le petit salon et le salon : cette pièce riche en couleurs tranche avec les couleurs sombres du grand hall et crée un espace très caractéristique de l'Art Déco. Son plafond blanc à dôme circulaire adoucit la pièce en allégeant le tout. Le vrai chic Art Déco se retrouve toutefois dans le salon et la grande salle à manger, lieux de toutes les réceptions princières. On admire au passage des motifs floraux géométriques y compris les lustres « Bucarest » conçus par René Lalique, les portes en verre gravé dépoli argent de Max Ingrand et la cheminée en marbre.

La grande salle à manger profite de grandes baies vitrées donnant sur le jardin. Là, les invités prenaient leur diner, d'où des motifs alimentaires ajoutés à la décoration comme dans les plafonniers en verre avec ces ananas et ces grenades de René Lalique et les motifs de fruits des portes attribués à Max Ingrand. Les cache-radiateurs comportent également des motifs de poissons et de crustacés. La résidence possède aussi sa salle à manger privée, où la famille princière prenait ses repas quotidiens. Cette salle est dotée de nombreux éléments décoratifs japonais (motifs traditionnels Genjiko ornant les cache-radiateurs...) et la plupart du bois travaillé , dont les colonnes et les moulages traditionnels, ont été réalisés en bois de cyprès japonais. Situé au centre de la résidence, l'escalier principal (troisième photo ci-dessus) conduit à des parties publiques réservées aux réceptions (rez-de-chaussée) et aux appartements privés (à l'étage) Cet escalier relie en fait les espaces Art Déco français du rez-de-chaussée et les espaces Art Déco japonais de l'étage. Marbre blanc de Carrare et autres marbres constituent l'escalier dont le motif en zig-zag est facilement reconnaissable.


 

Le premier étage de l'édifice est vaste et offre un hall permettant à la famille de se retrouver. On y admire des éléments décoratifs japonais comme la conception seigaiha des vagues et des grues (cache-radiateurs). Un canapé est de même intégré sous les fenêtres le long du mur de la pièce nord.

La chambre à coucher du jeune Prince reçoit la lumière de deux directions et offre de belles ouvertures. Cette chambre est prolongée par deux autres pièces, un dressing (décoré par les meilleurs artisans, notamment des plâtriers) et un salon dont l’ambiance est très agréable grâce son plafond arrondi et vouté et son lustre en vitrail.

Le bureau est pour sa part formé d'une pièce carrée rendue presque ronde grâce aux étagères intégrées aux quatre coins. Une pièce qui fut occupée après la Seconde guerre mondiale par Yoshida Shigeru, ministre des Affaires étrangères et Premier ministre. Non loin de là, se trouve le salon du Prince, conçu par Henri Rapin. Son haut plafond offre une sensation d'espace tandis que les colonnes en bois de cyprès et une cheminée en marbre donnent à l'ensemble une impression de raffinement.

Le premier étage abrite aussi la chambre à coucher de la Princesse, une pièce d'allure très féminine avec un miroir ovale dans la porte blanche, un plafonnier recouvert d'un tissu et des registres de chauffages conçus par la princesse elle-même. La décoration de la chambre du Prince est quant à elle plus discrète que celle de son bureau ou du salon. L'atmosphère y est détendue, avec ses portes et ses colonnes en bois de camphrier et l'utilisation des irrégularités naturelles du bois pour créer un effet décoratif.

Le salon de la Princesse (ci-dessus) vaut le coup d'oeil ne serait-ce que pour son lustre muni de cinq globes en verre. Chaque recoin de ce lieu trahit les goûts de la princesse, depuis le grand miroir réalisé en un seul tenant, la jolie cheminée colorée ou ces petits placards intégrés aux doubles-portes.

La jeune princesse , la Princesse Nobuko, disposait de sa propre chambre, et participa au choix du papier peint Tekko. Cette tapisserie bleutée offre une belle brillance métallique qui varie selon la lumière de la pièce. Jouxtant cette chambre, le salon de la princesse est garni d'un parquet en bois d'érable et d'une cheminée en marbre rose saumon.

Une salle de bains principale (deuxième photo ci-dessus) fut bien sûr construite à l'usage exclusif du Prince et de la Princesse et se trouve à côté de la chambre du Prince car ce dernier avait des difficultés pour marcher depuis son accident de la circulation. Le sol présente un motif de mosaïque constitué de carreaux de céramique japonaise, tandis que les murs sont habillés de marbre importé. Deux autres salles de bains sont disponibles dans cette bâtisse, une pour le jeune prince et l'autre pour la jeune princesse.


 

Le premier étage dispose aussi d'une véranda (première photo ci-dessus) donnant sur une pelouse et un magnifique jardin japonais (regarder la vidéo). Celle-ci fut conçue tout spécialement pour le couple princier et n'est d'ailleurs accessible que de leurs chambres et leurs salons. Son sol offre un motif de damier noir et blanc en marbre local. Lorsqu’il faisait trop chaud, le Prince et la princesse se réfugiaient dans la pièce nord (appelée ainsi car elle se trouve au nord de la résidence), plus fraiche. La lucarne du plafond apporte une lumière naturelle. Quant au jardin d'hiver (en photo ci-dessus), il fut placé sur le toit comme serre. On y trouve une étagère pour plantes, un robinet d'eau et des évacuations. Cette pièce est meublée de chaises conçues par Marcel Breuer que le Prince achètera lui-même lors d'une exposition sur l'architecture et le nouveau design allemand un certain mois de mai 1933, présentée au grand magasin Matsuzakaya de Tokyo.

 

INFOS PRATIQUES :

 

  • Ancienne résidence du Prince Asaka, 5-21-9 Shirokanedai à Tokyo. Tél : 03 3443 0201. Ouvert de 10h à 18h00. Accès le plus proche : Station Meguro JR (sortie Est) et sortie principale de la station Meguro (Ligne Tokyu Meguro). Entrée du musée : variable selon l'exposition présentée. Tarif pour l'accès au jardin : 200 yens.
  • Il est demandé de laisser ses sacs et bagages à une consigne gratuite située à droite juste après le contrôle des billets dans la résidence. Une pièce de 100 yens est toutefois nécessaire pour armer le système. Elle vous est restituée à la réouverture du casier.

  • La prise de photographies est autorisée sans flash à l'intérieur.

  • L'exposition temporaire, elle, a lieu dans l'annexe (bâtiment moderne situé près de la résidence). On y trouve aussi une boutique et une cafétéria.

  • Pensez à regarder la vidéo du parc de la résidence (en cliquant sur l’icône Vidéo en haut à droite de cet article)

  • L'ancienne résidence princière abrite désormais le Musée d'art métropolitain Teien de Tokyo : https://www.teien-art-museum.ne.jp/fr/

 









 



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