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Sur un air d'entre-deux
(Saône-et-Loire, France)
Heure locale

 

Lundi 10 août 2020

L'écrivain Blaise Pascal affirmait « On ne montre pas sa grandeur pour être à une extrémité, mais bien en touchant les deux à la fois, et remplissant tout l'entre-deux » (Pensées). Le département qui nous intéresse cultive à fond cette notion d'entre-deux et se partage entre deux cours d'eau, tout en étant parsemé d'abbayes et de châteaux. Numéroté 71, il offre six régions naturelles : l'Autunois, le Charolais, le bassin minier (dit bassin du Creusot-Montceau-Blanzy), le Chalonnais, le Mâconnais et la Bresse bourguignonne. Carrefours d'hier, d'aujourd'hui et de demain, les vallées de la Saône et de la Loire servaient déjà de lieux d'échanges et de passage dès la Préhistoire.Toujours entre deux eaux, de l'eau d'ici avant l'au-delà. Nous voici en Saône-et-Loire...

 

Entre les deux mon cœur balance...Voici la Préfecture de Mâcon, la ville la plus méridionale de la région Bourgogne-Franche-Comté, avec ses toits de tuiles romanes et ses façades colorées, et entourée par les vignobles du Mâconnais (réputés pour ses vins). Avant Mâcon, il y eut l'antique cité de Matisco fondée au 1er siècle avant J-C. Très vite, l'endroit devint un important carrefour de communication. Frontière entre le Royaume de France et le Saint Empire germanique entre 843 et 1600, Mâcon tirera ses ressources de l'instauration des droits de douane et des facilités que lui procureront les trente libertés contenues en 1317 dans l'octroi d'un bailli royal délivré aux habitants de la cité. Plus que jamais à la page, la ville sera bien plus tard l'une des premières cités à disposer d'une imprimerie. C'est en 1790, que Mâcon deviendra le chef-lieu du département de la Saône-et-Loire et verra naitre l'enfant du pays, le renommé Alphonse de Lamartine. Résistante, la ville s'illustrera lors de la Seconde guerre mondiale, demeurant la première ville en zone libre entre Paris et Lyon. Le riche passé de la cité vaut largement une visite : « Tracé de la Plume » (en hommage, bien sûr, à l'incomparable plume d'Alphonse de Lamartine) est le dernier parcours de découverte du patrimoine, qui vous invite, en deux heures maximum, à découvrir histoire, architecture, littérature et gastronomie locales, au travers de vingt-huit points d'intérêt commentés par des bornes interactives et grâce à une application mobile gratuite (voir infos pratiques).

 

La Saône-et-Loire...entre deux époques, ce sont également des lieux comme l'abbaye bénédictine de Cluny, fondée en 909 par le duc d'Aquitaine et comte d'Auvergne Guillaume 1er, qui deviendra le symbole du renouveau monastique en Occident. A l'époque, la France est dirigée par la dynastie carolingienne et subit de constantes attaques des Vikings (venus du nord) et des Sarrasins (peuples de confession musulmane venus du sud). D'où un affaiblissement de l'autorité royale confrontée à la prise d'indépendance des princes et des seigneurs territoriaux. Et les seigneurs locaux de contester le pouvoir royal et de s'en remettre à l'Eglise. C'est dans ce contexte que fut érigée l'abbaye de Cluny, alors indépendante du pouvoir séculier. Par la possession de reliques, cette abbaye deviendra très tôt un lieu de pèlerinage. Pillé lors des Guerres de Religion, ce trésor sera anéanti durant la révolution française. Heureusement, la redécouverte providentielle de six reliquaires des 17e et 18e siècles en bois polichromé permit de mettre sur pied une exposition visible à l'abbaye, l'occasion de dresser un état de la question.

Autre point d'intérêt, la cathédrale Saint-Vincent de Châlons-sur-Saône, qui rouvre son cloitre au public après une décennie de travaux de restauration. Ce cloitre, qui fut reconstruit à la fin du 14e siècle à partir de murs datant de l'an 1000, reste aujourd'hui le seul cloitre-cathédrale conservé en Bourgogne. Avec ses galeries et leurs ornements ayant été entièrement rénovés, et ses différentes toitures refaites ou reconstituées, ce lieu fait partie des incontournables du moment.

 

On fête aussi cette année les 900 ans de la cathédrale Saint-Lazare d'Autun. Construite en 1120 sous l'impulsion de l'évêque Etienne de Baugé, l'édifice religieux sera avant tout une église de pèlerinage située sur le chemin de Compostelle. Elle abrite les reliques de Lazare, ami du Christ. Son tympan restauré est remarquable et est bordé sur l'extérieur par une série de trente médaillons circulaires représentant scènes de saison et signes astrologiques. A deux pas de la cathédrale, se trouve le Musée Rolin, qui expose des vestiges d'anciennes rénovations de l'édifice. Outre les journées du patrimoine de septembre, la Fête de Saint-Lazare, qui aura lieu le 30 août, conviera le public à une procession derrière le reliquaire de Saint-Lazare. Sans oublier, l'exposition à venir (car reportée pour cause de COVID), « Le Miroir du Prince, l'âge d'or du mécénat à Autun », qui présentera l'année prochaine deux grandes familles de mécènes, les Rolin et les Clugny.

Paray-le-Monial n'est pas en reste en 2020 puisqu'elle célèbre le centenaire de la canonisation de Marguerite-Marie Alacoque, sainte dont les fêtes auront lieu du 15 au 20 octobre. La petite ville, qui se trouve au cœur du Charolais est notamment connue pour un événement survenu au 17e siècle : l’apparition du Christ à une religieuse, Sainte-Marguerite Marie, au monastère de la Visitation. Cette apparition, qui eut lieu à trois reprises, fit de Paray-le-Monial un lieu de pèlerinage et entraina la construction de sanctuaires aux quatre coins du monde, dont le plus célèbre, se trouve à la basilique du Sacré-Coeur de Montmartre (Paris 18e).

 

La Saône-et-Loire...entre deux vignobles, nous mène tout droit au berceau du Chardonnay. C'est en effet ici, en Bourgogne du Sud, que des touristes américains effectuent un pèlerinage bien à eux, celui de leur cépage blanc préféré. Il existe même désormais le « Chardonnay Day » célébré en France fin mai. Autre bonne nouvelle, la reconnaissance du Pouilly-Fuissé comme premier cru, qui, espérons-le, ne saurait tarder. La région offre par ailleurs une multitude d'adresses authentiques, d'appellations uniques, de beaux domaines et un magnifique savoir-faire. Apprendre à déguster (avec modération) les vins de Bourgogne est très facile, et les cours d'oenologie sont nombreux dans le département. Avec l'opportunité de s'accorder ce qu'on appelle ici un « Oeno-moment », un instant de découverte des vins en trois étapes : une dégustation de trois vins de terroir différents (rouge, blanc et crémant), accompagnée d'amuse-bouches (gougères, jambon persillé, petits fromages de chèvre locaux et autres spécialités). Pas moins de 75 restaurateurs, viticulteurs, cavistes, hôteliers, campings et bars à vins proposent cette prestation (voir infos pratiques) et vous offrent de repartir avec votre verre en guise de souvenir.

La Route des Grands Vins de la Côte Chalonnaise, elle, se pratique à tous les modes. Celle-ci traverse quarante communes au milieu de vignobles plus que millénaires que l'on doit aux moines clunisiens qui en recouvrirent les coteaux. Les vignerons vous accueillent avec plaisir sur leurs domaines pour vous faire gouter des vins rouges d'appellations reconnues (Rully, Mercurey, au nord de la Côte chalonnaise) et les vins blancs de Montagny ou de Givry (plus au sud). A pied, en rollers ou à vélo, empruntez la voie verte, piste cyclable arborée de 32 km longeant le canal du Centre, puis parcourez aussi les 4,5 km du sentier d'interprétation viticole de Montagny (dont le point de départ se situe au petit village de Montagny-lès-Buxy). De passage à Châlons-sur-Saöne, arrêtez-vous aussi à la Maison des Vins de la Côte chalonnaise, dédiée aux appellations régionales.

 

Le vignoble de Saône-et-Loire s'étire du nord au sud du département, avec les vignobles des Maranges, du Couchois, de la Côte chalonnaise, du Mâconnais et du Beaujolais, formant ainsi le plus vaste vignoble de Bourgogne (tout en rassemblant une trentaine d'AOC). On visitera les caves des Maranges (Maranges et Côtes de Beaune, vins rouges et blancs). Quant au Couchois, il produit des vins robustes et colorés, d'appellation Bourgogne Côtes du Couchois sur plusieurs communes. Plus au sud, le Mâconnais révèle des Mâcon rouges au bouquet profond, charnus et corsés, le Mâcon Villages à la robe d'or, et ses arômes floraux et fruités, des Pouilly-Fuissé riches et savoureux (Pouilly-Loché, Pouilly-Vinzelles...), et le Saint-Véran...Quant au Beaujolais, il offre dix crus, dont quatre s'épanouissent au sud de la Saône-et-Loire : le Moulin-à-vent, le Chénas, le Saint-Amour et le Juliénas. Les appellations régionales Beaujolais Villages et Beaujolais étant issues du cépage Gamay. Le saviez-vous ? Il y a un siècle, le vignoble recouvrait le Brionnais, cette terre calcaire et pierreuse qui permet de produire le Vin des fossiles, un vin de pays toujours produit à Mailly. Un entre-deux viticole qui promet d'être convivial, encadré par les deux labels des vins du département, « Vignobles & Découvertes » et « De vignes et Caves ». A votre santé !

 

La Saône-et-Loire...entre deux matières évoque le métal et la terre, deux matériaux à l'origine de l'industrialisation du département, alors point de passage privilégié nord-sud du temps du Royaume de France. Si la vigne et l'élevage dominèrent jadis, le 19e siècle vit l'apparition du développement industriel comme au Creusot, avec, en 1786, la construction d'une fabrique de cristaux suivi de la construction d'une forge anglaise en 1827. Les houillères de Saône et Loire, elles, forment deux vastes bassins, du côté d'Autun et de Blanzy, tandis que des carrières de pierre existent à Tournus, Givry, Chagny, Charrecey, Palinges, Saint-Berain-sur-Dheune et Saint-Vallier. De nombreuses communes abritent aussi tuileries, briqueteries, faïenceries et poteries. Et des verreries sont implantées à Epinac et à Saint-Berain-sur-Dheune. A cette époque, le développement industriel est facilité par l'existence d'un réseau de voies navigables et par l'arrivée du chemin de fer.

Les Trente Glorieuses, qui suivront la Seconde guerre mondiale ouvriront la voie à de nouvelles activités : engins de manutention, fabrication de tracteurs...permettant dans le même temps d'observer des disparités entre les villes du département (baisse du Creusot, mais essor de Mâcon et Chalons-sur-Saône). D'anciennes activités perdurent comme la faïencerie de Charolles, renommée pour son « peigné bleu » (ou « Charolles »), aujourd'hui aux mains de repreneurs désireux de perpétuer la tradition en rééditant des pièces de collection (infos pratiques). La céramique a aussi sa place à Digoin où la manufacture du même nom se trouve le long du Canal du Centre, en plein cœur de la vallée de la ...céramique. Avec, elle aussi, des repreneurs à sa tête, l'entreprise relance la production des modèles iconiques qui ont fait son succès dans le passé, un succès récompensé en 2019 par l'obtention du label « Entreprise du Patrimoine Vivant ».

Si la Révolution industrielle a perdu de sa superbe au fil des années, elle se raconte encore au fil du canal. Et l'histoire de se lire à travers les paysages comme à Blanzy (et son chevalement métallique de vingt mètres de haut qui raconte l'épopée du charbon entre 1800 et 2000), Montceau-les-Mines (Monument d'Antoine Bourdelle, cités minières et lavoir des Chavannes), Ecuisses (Villa Perrusson et son jardin), Ciry-le-Noble (cheminées de la Briqueterie) et au Creusot (imposant marteau-pilon, patrimoine historique du génie mécanique). Le Creusot, à la fois ville verte et d'acier, dont on se souvient qu'autrefois elle fut une vitrine à la hauteur des éminences qui y vivaient, comme la famille Schneider, anciens maitres des forges. Restent de nos jours le Château de la Verrerie (Cher), l'ancien four de la cristallerie royale, et un parc à l'anglaise de trente hectares, poumon vert de la ville !

 

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