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Le label, une idée florissante
(France)
Heure locale

Lundi 15 mars 2021

 

De nos jours, tout le monde a entendu parler des Villes et Villages Fleuris dont les édiles ont souvent bataillé ferme pour obtenir le précieux label créé en 1959. D'abord concours de fleurissement, cette heureuse initiative apparue alors que notre pays souhaitait promouvoir espaces verts et cadre de vie, prit par la suite le nom de « Villes et Villages Fleuris » et devint un label lourd de sens et extrêmement valorisant pour les 4863 communes françaises qui l'ont obtenu en 2020 : cette distinction des villes et villages oeuvrant à la mise en valeur du cadre de vie et participant au bien-être des habitants et des visiteurs, est récompensée de une à quatre fleurs sous la forme de trophées et de prix nationaux.

 

Sans doute l'idée du label bourgeonna-t-elle dès les années 1950 lorsque l'abbé Wendling, prêtre du village de Diebolsheim, qui participait au déminage de la commune proposa de remplacer chaque mine par une fleur, histoire de redorer l'image du village qui avait durement souffert des combats lors de la seconde guerre mondiale. Et d'autres municipalités d'emboiter le pas à l'abbé jusqu'à la création d'un concours, neuf ans plus tard, par Robert Buron, alors ministre des transports, des travaux publics et du tourisme.

Les critères d'évaluation imposés aux communes candidates ont depuis évolué en faveur du respect des aspects environnementaux et de la soutenabilité du fleurissement. Il est demandé aux maires d'animer et promouvoir la démarche, tout en construisant une stratégie d'aménagement paysager qui valorisera le fleurissement et le patrimoine végétal, préservera l'environnement et l'espace public, et organisera avec pertinence les aménagements selon les lieux.

La commune candidate s'inscrit préalablement auprès de l'organisme agréé au niveau départemental, lequel accompagne les candidates sur la voie du succès. Quant à l'organisme agréé au niveau régional, elle attribue les trois premières fleurs et suggère les communes susceptibles d'être labellisées « 4 fleurs » au Conseil National des Villes et Villages Fleuris ».

 

Le label jouit étonnamment d'une telle reconnaissance nationale qu'un tiers des communes tentent de l'obtenir en convaincant les membres du jury (on en compte plus de 2000 qui sillonnent chaque année notre beau pays) sur leur potentiel en matière de qualité de vie, de préservation de l'environnement, de développement économique local, d'attractivité touristique et de préservation du lien social. Peu obtiendront le label (931 communes fleuries, dont 273 dotées de « 4 fleurs » avaient obtenu cette distinction fin 2020) et la région Grand-Est (à l'origine de l'initiative) de se classer à la première place, suivie par la région Auvergne-Rhône-Alpes (2è place) avec 525 communes fleuries. Il est en effet gratifiant pour une ville ou un village de décrocher un des prix décernés (par ordre décroissant) : Trophée « Fleur d'Or », label « Département fleuri », Prix de l'attractivité touristique, Prix de l'Arbre, Prix de l'action éducative et pédagogique, Prix de la mise en valeur du patrimoine, Prix du fleurissement des jardins familiaux collectifs et prix de la diversité végétale.

En 2019, la France fêtait le 60è anniversaire du label Villes et Villages Fleuris. Il fut rappelé à cette occasion que ce label est historiquement et intimement lié au tourisme. Que de chemin parcouru depuis 1959 (avec 600 communes candidates, puis 5000 en 1967, et plus de 10000 en 1990). Et que d'espoir suscité par le premier concours de fleurissement, appelé « Fleurir la France », puis les années suivantes : l'opération « Sourire c'est fleurir » (1960) comptabilisa 1850 communes candidates, mais aussi la participation de 1100 fermes, 1000 gares, 80 postes-frontières et 3500 stations-services. Dès 1962, naissaient les Routes fleuries dans la foulée des grands travaux d'aménagement du territoire et du littoral. En 1964, apparaitront les « décors floraux » sur la voie publique, ancêtres de nos actuels « espaces d'accompagnements de voirie ». Le fleurissement deviendra alors un facteur déterminant pour attirer les touristes étrangers sur notre sol.

 

En 1967, 5000 villes et villages participèrent au concours tandis que les années 1970 viendront renforcer l'envie d'un environnement urbain propre, obligeant les élus à faire des efforts pour, par exemple, remplacer un tas de fumier résiduel au bord d'une route par une surface engazonnée ou un parterre de fleurs. Une décennie plus tard, paysagistes, pépiniéristes, horticulteurs et grainetiers prêteront main forte aux communes candidates à l'heure où le label attire de plus en plus de municipalités. La seule idée de créer ensemble le paysage de l'avenir en fleurissant la France enthousiasmait alors les foules. Et ce seront plus de 10000 communes qui s'inscriront au concours dans les années 1990, avec bientôt l'apparition d'un guide d'appréciation des communes où le végétal devra trouver sa place au sein des grandes villes en expansion.

Le nouveau millénaire sera franchi et le label s'oriente alors vers un « horizon durable » : on envisage autrement la gestion de l'eau et l'on se préoccupe davantage de la préservation des milieux naturels sensibles. Et les communes d'être accompagnées (création d'un classeur de conseils techniques pour les communes de moins de 5000 habitants) par des jurys mieux formés et dotés d'un guide rassemblant les critères d'exigence, une grille d'évaluation détaillée et de nouveaux enjeux environnementaux. Quant au concours, il est maintenant perçu comme une démarche d'accompagnement et d'échange avec retours d'expérience. Le nouveau siècle a imposé une nouvelle donne, avec restrictions budgétaires et les exigences de la Loi Labbé. Quant à la façon de gérer, planter et aménager les espaces, chaque commune dut également s'adapter.

 

Le tourisme, si important pour notre survie économique mais aussi pour notre image, fait du label Villes et Villages Fleuris un outil essentiel de sa promotion au niveau régional, et chaque région vit ce « label » à sa manière, et avec sa propre sensibilité : forte de 600 communes labellisées, la région Auvergne-Rhône-Alpes entend favoriser le tourisme sensoriel et émotionnel en permettant aux visiteurs de se reconnecter avec soi et avec les autres aux côtés d'une nature où il fait bon vivre.

« Les Hauts de France » voient le label comme un moyen d'action auprès des populations locales pour les inciter à devenir les fières ambassadrices de leurs territoires. Le cœur, symbole de cette région ne symbolise-t-il pas la générosité, véritable marqueur identitaire local? Ici, on joue la carte du mieux-être, du tourisme mémoriel et du patrimoine.

En « Nouvelle-Aquitaine », on met en place des pratiques vertueuses en identifiant clairement les communes mobilisées en faveur de la biodiversité et du respect de l'environnement. Le label garantit ainsi aux touristes la qualité des espaces publics, des jardins ou du paysage, voire la réapparition d'une nature sauvage au coeur du lieu de villégiature.

La région « Occitanie » mise quant à elle sur l'authenticité de ses paysages et sur son patrimoine remarquable. Sur un total de 243 communes, 11 sont labellisées « 4 fleurs » et servent en quelque sorte de porte-drapeau aux autres en développant le tourisme durable, la préservation des milieux naturels et en privilégiant le choix d'essences locales pour valoriser le patrimoine paysager.

Filons dans l'Ouest, dans les « Pays de la Loire » où le tourisme est vu comme un levier économique pour le territoire. Cette région, avec 372 communes labellisées, se place à la troisième place des régions fleuries de France. Et cette mise en valeur paye puisque le tourisme, première ressource économique à égalité avec l'agroalimentaire, ne cesse de croitre. Les élus sont particulièrement incités à soigner l'apparence paysagère des entrées de leur ville ou village pour faire bonne apparence et à développer des pistes cyclables (cette région, qui totalise 3000km de pistes cyclables figure à la première place des territoires cyclotouristiques de France avec des itinéraires phares comme La Loire à vélo, la Vélodyssée ou Vélocéan). Voilà une affaire qui roule !

 

Après les régions, intéressons-nous aux départements et à leur perception du label Villes et Villages Fleuris. Le département joue en effet la proximité avec les communes engagées dans le fleurissement. Voici quelques exemples d'initiatives départementales qui ont permis d'embellir nos villes et villages par le végétal tout en améliorant le cadre de vie des habitants et l'attractivité de l'image perçue par les touristes.

A travers l'opération « Les Côtes d'Armor sont belles, jardinons au naturel », les Côtes d'Armor apportent conseils et soutien aux communes labellisées et à celles qui souhaiteraient le devenir. Dans l'Eure, on n'est pas pressé et on se concentre sur le slow-tourisme, histoire de permettre aux Parisiens et aux autres (la capitale n'est pas très loin) de déconnecter le temps d'un weekend, au rythme des peintures impressionnistes, de la visite des châteaux et des jardins de Giverny (l'Eure est jusqu'à présent l'unique département fleuri de Normandie, avec 90 communes labellisées). La Marne, elle, est labellisée « Département fleuri » depuis vingt ans et a profité de cette aubaine pour privilégier la qualité champenoise auprès d'une clientèle touristique importante. Et de jouer sur le partenariat avec la Fédération Française du Paysage ou la Ligue de Protection des oiseaux.

La Saône-et-Loire se positionne comme une destination touristique du « Country Break » (déconnexion et décontraction) offrant aux visiteurs de vivre de multiples expériences au cœur d'une campagne verdoyante. Vous l'avez compris, la préservation des espaces naturels et du cadre de vie et la créativité et l'innovation sont ici les maitres mots. Ce département ne fut-il pas le premier en France à lancer le concept de voies vertes ?

De leur côté, les Yvelines (qui compte plus de 60% de communes rurales) s'efforcent de tirer profit des vastes espaces naturels (Forêt de Rambouillet, boucles de Seine) et de leur exceptionnel patrimoine culturel (Château de Versailles et ses jardins) tout en s'appuyant sur les communes labellisées (80% d'entre elles le sont) et leur forte émulation. Ce département va même plus loin en développant la création de trophées spéciaux et en encourageant des thématiques qui mettent en avant des initiatives locales (aujourd'hui rassemblées dans l'Atlas des idées vertes).

A l'échelle de la commune, chaque ville ou village définit ses préférences autour de trois thèmes : le cadre de vie pour le bien-être quotidien, l'environnement pour le maintien de la biodiversité et le tourisme pour l'économie des villes et des villages.

Le besoin d'un cadre de vie de qualité est aujourd'hui la principale préoccupation des citoyens et suppose un environnement vert et déstressant. A cet égard, les plantes contribuent au bien-être et donc à la santé publique en aidant à atténuer les pollutions atmosphériques et à rafraichir l'atmosphère. A Auch, dans le Gers, le label est carrément devenu un outil de management alors qu'à Baconnes (51), la végétalisation est devenue un challenge permanent depuis plus de cinquante ans. Caluire-et-Cuire (69) a pour sa part le réflexe d'acquérir du foncier afin de protéger des espaces naturels pour les générations futures et Créteil (94) a depuis bien des années fondé sa cohésion sociale en offrant « le droit au beau pour tous ». L'Alsace n'est pas en reste et le petit village de Dieffenbach-lès-Woerth est fier d'être labellisé « 4 Fleurs » au point d'avoir gravé les fleurs sur la cloche de l'église. On a beau habiter un village de seulement 70 âmes, cela ne retire rien à la volonté d'innover. Ainsi Gélaucourt (54) a-t-il créé l'un des premiers lotissements préfigurant les écoquartiers tout en reverdissant les façades d'antan avec 13000 plantes (dont 5000 arbres). La mobilisation des habitants est parfois de mise comme à Soisy-sous-Montmorency (95) où la population est invitée à participer au concours « Soisy ville fleurie » et à s'approprier les nombreux jardins familiaux mis en place sur la commune. Vénissieux (69), ville de tradition horticole, a elle aussi compris les avantages d'un cadre de vie plaisant et agréable en alternant grands parcs et places publiques végétalisées au milieu de bâtis variés, d'où son surnom de « ville puzzle ».

 

Quoi de plus naturel pour une commune que de s'inscrire dans l'environnement existant en privilégiant les écosystèmes naturels ? Et le label Villes et Villages Fleuris d'être devenu un référentiel valorisant les collectivités qui s'investissent dans ce domaine. La lutte contre le réchauffement climatique, la préservation de la biodiversité et la protection des ressources et des milieux s'imposent d'elles-mêmes. Cassis (13) a ainsi fait du paysage une source d'inspiration, et la nature est omniprésente tant dans les rues et les ruelles qu'aux pas de portes et aux fenêtres des maisons. A Nantes (44), on s'est tourné vers la Loire et ses rivières et dans l'augmentation constante des surfaces vertes aménagées (soit 37 m2 d'espaces verts par habitant, un record!) tandis que Roubaix (Nord), ancienne ville ouvrière, s'efforce chaque jour d'équilibrer la minéralité des constructions en végétalisant toujours plus (200 à 400 arbres plantés pour une centaine abattus). Dans l'Yonne, Sens use de son « bon sens » en rachetant chaque année des terres aux agriculteurs pour agrandir les seize hectares du Parc du Moulin-à-Tan, aux confins de la ville. Dans le Pas-de-Calais, Saint-Josse-sur-Mer (62) a fait da la nature sa culture avec la présence de trois sites Natura 2000 entre landes et marais et la mise en valeur de la grande diversité de paysages disponible sur la commune.

 

Le tourisme est une ressource de taille pour bien des villes et des villages et l'image offerte aux visiteurs d'une commune fleurie vaut de l'or en donnant envie aux gens de passage de s'y attarder. En effet, la demande touristique évolue avec la recherche de plus de bien-être et une douceur de vivre. C'est là qu'interviennent la mise en valeur des paysages et la préservation de la nature. Un gîte de charme dans un village-jardin, un camping en bord de rivière ou une promenade paysagère dans un vignoble sont autant de richesses locales qui sont appréciées par les adeptes du tourisme naturel. Aix-les-Bains (Savoie) offre cette image de destination bien-être. Détentrice du label « 4 Fleurs » depuis 45 ans et rare ville à avoir obtenu à deux reprises la « Fleur d'Or », la cité mise avant tout sur le fleurissement et l'aménagement paysager. C'est aussi le cas de Bormes-les-mimosas (83) où les fleurs sont inscrites dans l'histoire du village. Celui-ci organise d'ailleurs des visites guidées sur le thème du végétal et du fleurissement à destination des touristes. Citons également Beaune (Côte d'Or) ville d'art et de culture avec ses célèbres Hospices, mais aussi ville-jardin en accord avec son vignoble de renom. Il ne pouvait en être autrement lorsqu'on est la ville la plus visitée (avec 1,8 million de touristes chaque année) du quart Est de la France. Autre signature paysagère, Biarritz (64), station balnéaire de réputation mondiale qui s'est toujours adossée sur le végétal pour accroitre son attractivité. Plantation de nombreux tamaris, réduction des parkings, circulation alternée et développement de rues piétonnes et de pistes cyclables sont les principaux atouts de cette cité. La Mayenne (53) et son petit village de Juvigné se démarque également par son fleurissement qui transforme l'endroit en un véritable petit écrin naturel très apprécié des touristes. Autre écrin, la ville de Troyes (Aube) qui gère avec soin ses jardins, qu'ils soient médiévaux ou Renaissance. A la tête d'un secteur sauvegardé de 137 hectares,de 42 monuments historiques classés dont dix églises, cette ville d'Art et d'Histoire se doit d'être à la hauteur en offrant la plus belle parure naturelle à ce riche patrimoine historique.

 

Avec 4463 communes labellisées de une à quatre fleurs en 2020, le label des Villes et Villages Fleuris poursuit sur sa lancée en intégrant chaque année de nouvelles communes. Le concept séduit et mobilise les édiles et leurs populations autour d'un challenge valorisant. Et le label de reconnaître une démarche dynamique et moderne participant à la qualité du cadre de vie, à l'attractivité des territoires et à la protection de l'environnement tout en tissant des rencontres et des relations intergénérationnelles. Le label...une idée florissante !

 

INFOS PRATIQUES :

 

  • Conseil National des Villes et Villages Fleuris, Ministère de l'Economie et de la Relance, 6 rue Louise Weiss, Paris 13è.
  • Villes et Villages Fleuris : https://www.villes-et-villages-fleuris.com

  • Mes vifs remerciements au CNVVF pour son aide précieuse dans la réalisation de cet article.

 

 



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