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Hagi et la Vieille Ville
(Préfecture de Yamaguchi, Honshu, Japon)
Heure locale

Dimanche 21 avril 2013

 

En venant passer ce weekend à Hagi, je savais que je trouverais sur place un important patrimoine culturel et historique. Ceux qui me lisent régulièrement savent l'importance que j'accorde à l'histoire d'un lieu. Chaque endroit s'est forgé au fil du temps et au gré des évènements, grâce à ceux qui nous ont précédé et ignorer cette histoire revient tout bonnement à ignorer ce que nous sommes. Plongeons donc dans l'histoire de cette petite ville nippone située au bord de la Mer du Japon. Je vous ai déjà décrit l'endroit lors d'un précédent article mais je ne vous ai pas encore parlé des quartiers qui la composent. A vrai dire, Hagi ressemble à n'importe quelle autre ville japonaise de taille moyenne lorsque vous débarquez en train. La petite gare d'Higashi-Hagi ( la ville compte tout de même trois gares ferroviaires!) avait l'avantage de se trouver à deux pas de mon hôtel, sur les rives de la rivière Matsumoto. Je privilégie souvent la marche car cela me semble par exemple moins contraignant que d'attendre un bus et permet de déambuler librement dans les moindres recoins d'une cité. La vieille ville se trouve juste à proximité de l'ancien château. Je m'arrête d'abord au musée d'art Uragami qui doit son nom à son bienfaiteur, Monsieur Toshiro Uragami, un entrepreneur natif d'Hagi qui fit don de sa collection d'ukiyo-e et de céramiques orientales. Ces œuvres d'art sont désormais mises en valeur au sein de ce magnifique endroit et contribue ainsi à faire notamment connaître la céramique qui reste l'un des fleurons historiques d'Hagi depuis 400 ans. Quant aux ukiyo-e, sachez qu'elles constituent des « images du monde flottant »qui représentent surtout des estampes japonaises gravées sur bois (ci-dessous, à titre d'exemple, l'une des cent plus belles vues d'Edo, « Iris à Horikiri », œuvre de Utagawa Hiroshige peinte en 1857).


 

Un autre musée, le musée d'Hagi (ci-dessous) ne m'autorise pas à prendre de photos. Il retrace l'histoire de la cité à travers un certain nombre de vitrines renfermant des objets d'époque. Nous sommes désormais dans la vieille ville et je croise ici et là des maisons anciennes. C'est qu'Hagi a toujours été le berceau d'hommes célèbres: Giichi Tanaka (qui possède sa statue dans le parc jouxtant le musée précité) était un enfant de cette ville. Il fut entre autre Général de l'armée japonaise avant de devenir Premier ministre du pays et ministre des Affaires étrangères en même temps, entre 1927 et 1929. Issu d'une famille de samouraï, il sortira diplômé de l'académie militaire, servira pendant la guerre sino-japonaise, puis deviendra attaché militaire. Des douves sont encore visibles dans ce quartier ancien qui abrite notamment la Tour de guet de la famille Masuda (deuxième photo ci-dessous) qui était alors chef vassal à l'époque féodale. Le patrimoine historique est extrêmement bien tenu et des panneaux d'information, agrémentés de plans de quartier, orientent les visiteurs en langue japonaise (plus rarement en anglais). La famille Kubota possédait elle aussi une résidence (troisième photo ci-dessous). Construite durant la période Edo, cette demeure possède un plancher en forme de mezzanine utilisé autrefois pour stocker les marchandises et pour les employés. Marchand de kimonos et de saké, Shoshichi Kubota quittera Ohmi pour venir s'installer à Hagi. On peut bien entendu visiter cette demeure ( tout comme beaucoup d'autres!).


 

En marchant dans ces vieilles rues (ci-dessous), il m'arrive souvent de croiser des touristes japonais , en famille, et des groupes avec leur guide. Mais point d'étrangers! Je suis le seul visage pâle mais je le vis très bien. De temps en temps, des étals d'oranges me rappellent que je me trouve bien dans la cité de la « Natsumikan » et d'autres étalages remplis de poteries yaki me confirment qu'il s'agit là d'une tradition lointaine. Une autre résidence, celle de la famille Hanzawa se dresse devant moi (deuxième photo): La famille Hanzawa était rattachée à un clan descendant du clan Agawa Mori (dont les biens s'élevaient à l'équivalent de 7391 koku) et formait l'un des clans féodaux de la ville. Cette famille (détentrice de 1094 koku) possédait par ailleurs un fief qui incluait le village de Misumi (que j'ai traversé en train) dans le district d'Otsu et la ville d'Ogawa dans le district d'Abu. Narimitsu dirigeait ce clan dont la bâtisse mesure 35,5 mètres de long. A deux pas, mon œil est attiré par une maison remarquablement bien conservée, une véritable maison de samouraï (troisième photo ci-dessous): Cette demeure était celle de la famille Suu ( qui occupait alors le sixième plus haut rang du clan Hagi). Cette construction date du milieu de la période Edo.


 

Les rues, relativement étroites de la vieille ville m'oblige souvent à me pousser pour laisser le passage aux nombreuses voitures. Je m'attarde plus longtemps sur la résidence de la famille Kikuya (ci-dessous): Bien culturel important, cette maison possède cinq bâtiments qui ont été restaurés. Il y a d'abord « Omoya » qui constitue la maison principale, puis « Hon Gura » (l'entrepôt principal), »Shin Gura » (l'endroit où l'on abritait les objets de valeur), « Kamaba » (la cuisine et les foyers où l'on cuisait le riz) et « Kome Gura » (l'entrepôt à riz). D'après d'anciens documents, la résidence principale aurait été construite en 1606, deux années seulement après l'attribution de l'endroit à cette famille. On invita bien sûr à l'époque le seigneur Terumoto Mori à l'inauguration de cet ensemble qui représente l'une des plus anciennes constructions japonaises dans le style yashiki. On restaura également le salon Shoin et la porte Nagaya (deuxième photo) tel quel, ce qui donne à l'ensemble l'apparence d'une vraie grande maison de marchand. La porte Nagaya fut quant à elle bâtie sur l'ordre du clan Mori lors de l'arrivée de Tsunahiro Mori à Hagi en tant que deuxième seigneur du clan. Ce type de porte n'était pas autorisé dans les demeures de samouraïs de second rang, mais plutôt pour les maisons des marchands, d'où cette ordre de construction de cette porte qui était destinée à embellir la façade de la demeure. C'est en effet par cette porte principale qu'étaient reçus les hôtes du shogunat. Deux autres portes, plus modestes, la porte Onari (utilisée par les hôtes de marque afin d'accéder directement au salon Choin) et la porte Naka (qui servait d'accès aux seigneurs féodaux et à leurs vassaux) font partie de la résidence.


 

L'entrée principale de la maison est appelée « Oshikidai » et permet d'accéder (à gauche) au « Shoin » (salon en photo ci-dessous) dont on estime la construction à 1651. C'est là qu'étaient reçus les hôtes du shogun et que se tenaient différents services du clan Mori. La construction actuelle a été réalisée selon d'anciens plans. Le jardin (deuxième photo) est magnifique et possède une grosse pierre (Kago Oki Ishi) en son centre: Un jour, un visiteur du shogun qui était entré par la porte Onari prit l'habitude d'installer son palanquin (Kago) sur cette pierre avant de pénétrer dans la demeure (au lieu de l'entrée normale) par la véranda. A l'époque les invités disposaient de leur propre salle de bain (troisième photo).


 

Des vitrines agrémentent la visite des lieux avec de nombreux objets anciens. J'aperçois au passage une photo du Prince Taruhito Arisugawa (ci-dessous), officier de carrière de l'armée japonaise devenu le 9è chef de la famille risugawa-no-miya. Né à Kyoto en 1835, il fut adopté par l'empereur Ninko, puis épousera la princesse Kazu-no-miya Chikako (huitième fille de l'empereur Ninko). Il sera le général placé à la tête de la croisade visant à attaquer le shogunat de Tokugawa pour permettre la restauration Meiji. Il visitera Hagi en 1890 et passera trois jours dans la résidence Kikuya. Et utilisera les différents objets présents dans la vitrine située sous sa photo. Je reviens sur mes pas puis entre dans un autre salon de la maison (appelé aussi Omoya Zashiki). J'y découvre différents objets dont cette étrange cage en bois laqué (Fusego) en photo ci-dessous pour déposer les vêtements afin de les faire sécher ou de les parfumer à l'aide d'encens.


 

Un peu plus loin, est reconstituée la boutique d'antan (ci-dessous): Celle-ci est formée d'un long couloir situé le long de la rue Onari (rue principale alors empruntée par les seigneurs pour se rendre aux processions) et possède une grande porte (entre la boutique à proprement dit et la pièce de réception elle-même agrémentée d'une alcôve appelée Tokonoma). Là sont rassemblés les articles couramment vendus par la famille. Famille illustre puisque ses origines remontent aux débuts des dynasties du nord et du sud (entre 1336 et 1392). Il apparaît que les ancêtres de la famille Kikuya servirent le clan médiéval Ouchi et s'établirent à Yamaguchi. Après la chute du clan Ouchi, la famille dut renoncer au rang de samouraï et rejoignit la classe des marchands (chonin). Elle se distingua lorsqu'en 1519, elle contribua à protéger Yamaguchi d'une attaque en protégeant le château Konomine alors assiégé. Elle reçut pour cet acte de bravoure une distinction des mains de Motonari Mori en personne, alors seigneur féodal de Yamaguchi et des environs. De même, juste après la Bataille de Sekihagara (en 1603), la famille aida financièrement Terumoto Mori alors en difficulté. Un an plus tard, lorsque Terumoto Mori arriva à Hagi, la famille Kikuya se vit offrir les terres sur lesquelles se trouve la résidence actuelle. Et contribuera beaucoup par la suite à l'aménagement de la vieille ville environnante. Une plage se vit d'ailleurs attribuer le nom de cette famille désormais illustre (la plage Kikuyahama devenue aujourd'hui Kikugahama). Les Kikuyas se virent aussi attribuer une charge gouvernementale héréditaire dans Hagi et devinrent le fournisseur privilégié du clan Mori. Leur résidence servit enfin d'auberge pour les daimyos, les seigneurs féodaux de passage, et pour les délégations du shogun. Et accueillit même le clan Mori qui y tint des procès ou autres affaires publiques.


 

Ce n'est donc pas une demeure ordinaire que je visite mais bel et bien un trésor historique qui ressemble aussi à un musée tant on y trouve d'objets, comme par exemple une horloge offerte par Hirobumo Ito , premier Premier ministre du Japon moderne, alors qu'il rentrait d'un premier voyage aux Etats-Unis. Ou encore cette cabine téléphonique de l'ère Meiji abritant un téléphone d'époque (ci-dessus) qui aurait servi en 1897, alors que le premier service téléphonique ne sera créé à Hagi qu'en mars de la 43 ème année de règne de l'Empereur Meiji. Visiter Hagi est l'assurance d'un retour dans le temps et dans l'histoire.

 

 

INFOS PRATIQUES:

 


  • Musée d'art Uragami, 586-1 Hiyako à Hagi. Tel: 0838 24 2400. Ouvert de 9h00 à 17h00 (sauf le lundi). Droit d'entrée: 300 yens (un autre tarif est appliqué pour les expositions temporaires). Un seul regret: Ce musée n'affiche pas le détail des œuvres exposées en anglais (ce qui ne facilite pas leur compréhension). Personnel par ailleurs très agréable et compétent. Boutique de souvenirs et cafétéria. Site internet: http://www.hum.pref.yamaguchi.lg.jp/

  • Résidence de la famille Kubota. Ouverte de 9h00 à 17h00. Entrée 100 yens.

  • Résidence de la famille Suu, librement accessible

  • Résidence Kikuya. Droit d'entrée: 500 yens. Brochure explicative des différentes pièces de la demeure et des objets présentés, en anglais. Pas de plan disponible (malheureusement!) et il est fortement conseillé de suivre les numéros des commentaires pour s'y retrouver. Des guides sont présents sur les lieux pour vous aider. Se déchausser avant de pénétrer dans les lieux.

  • Un plan (en français) de la ville peut toujours servir (ci-dessous)

     


     









 



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