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Le Temple du Nuage Blanc
(Pékin, Chine)
Heure locale

 

Jeudi 9 mai 2013

 

Ma courte escale à Pékin ne me permet pas encore cette fois de faire la grande muraille. La capitale chinoise m'offre toutefois l »opportunité de visiter le Temple du Nuage blanc, temple taoïste de Pékin. Ce lieu est considéré comme l'une des trois grandes cours ancestrales de l'Ecole taoïste de la Voie de la parfaite complétude, ce qui ne l'empêche pas de porter tout de même le nom de «temple du paradis éternel».

A la fois philosophie et religion chinoise, le taoïsme regroupe vingt millions de pratiquants et plonge ses racines dans la culture ancienne: Le courant se fonde en effet sur des textes dont le Tao To King de Lao Tseu , des auteurs, des croyances, s'exprime également par des pratiques qui ont influencé tout l'Extrême Orient et se fonde même sur des évènements historiques étalés sur plus de 2500 d'histoire. La catégorie « tao » (c'est ainsi qu'on la surnomme) est née sous la dynastie Han, du besoin qu'il existait alors de classer les fonds des bibliothèques princières et impériales. En ce qui concerne la Voie de la parfaite complétude, elle est aussi appelée Quanzhen Dao, ou voie de la complétude de l'authentique. Cette école taoïste-là est , avec Zhengyi Dao, l'une des deux plus importantes écoles taoïstes nées à la fin des Song et la première en Chine populaire. Le patronage des empereurs Jin, de Gengis Khan (qui fonda la dynastie Yuan) et de ses successeurs aida beaucoup à rendre le taoïsme prospère. L'alchimie interne de ce courant et le sérieux de son ascèse, très monarchique tout en accueillant malgré tout les Laïcs, lui permettront de traverser les différentes époques sans encombres jusqu'à nos jours.


 

Le Temple du Nuage blanc se trouve à l'emplacement du monastère taoïste de la Perpétuité céleste qui fut fondé au milieu du VIII ème siècle, en 741, durant le règne de l'empereur Xuanzong, sous la dynastie Tang, alors soutenu et dirigé par l'élite du clergé. De 1125 à 1215, alors que l'actuelle ville de Pékin était placé sous le contrôle de la dynastie Jin, ce monastère servit de siège administratif taoïste et joua un rôle important dans les cultes d'état. Détruit par le feu en 1160, il sera reconstruit entre 1167 et 1174 sur l'ordre de l'empereur Shizong puis baptisé monastère de la Perpétuité céleste des dix orients. On y dépose alors le Canon de Xuandu, livre taoïste sacré, surnommé aussi « trésor de Dao», dont la première édition fut composée au V ème siècle par Lu Xiujing. La version actuelle est basée sur l'édition Ming et comprend plus de 5000 textes tout en conservant la structure d'origine de l'ouvrage. Le monastère prendra feu une seconde fois, en 1202, et sera rebâti sous le nom de Temple du Faîte suprême. Puis, il sera laissé à l'abandon après le départ de la cour Jin en 1215, avant d'être attribué en 1224 au patriarche Quanzhen Qiu Chuji, lequel entreprit de restaurer l'endroit. Qiu Chuji était un moine taoïste de la province de Shandong et disciple du fondateur du courant Quanzhen Dao Wang Chongyang. Il fonda lui- même la branche du taoïsme Longmen. Ce fut un personnage influent à la cour des Jin à tel point que Gengis Khan lui fera appel et le recevra à Kaboul en mai 1222 avec dix-huit de ses disciples. Une fois restauré, le temple prendra cette fois le nom de Printemps éternel (Chang Chun Gong) , d'après le nom religieux de Qiu Chuji et devint le siège du fameux courant Longmen, et ce, jusqu'à l'établissement de la dynastie Ming. Qiu Chuji décéda en 1227 et fut remplacé par Yin Zhiping qui fit construire, à l'est du temple, une dépendance abritant une salle dans laquelle on déposa son cercueil (ci-dessous). Cette salle porte le nom de Qiu Zu et fut bâtie en 1228 sous la dynastie des Yuan, pour abriter la dépouille du moine défunt. Lors de la disparition du temple pendant la guerre, cette salle sera la seule à être épargnée. On peut y trouver un grand récipient destiné à recevoir les dons des fidèles, le « Ying Bowl). Celui-ci est un cadeau de l'empereur Qianlong (dynastie des Qing).


 

Le temple sera à nouveau détruit à la fin du XIII ème siècle lors des guerres des Ming contre les Mongols, et le monastère du Nuage blanc sera reconstruit autour de cette salle Qiu Zu restée debout, puis reprit ses anciennes fonctions. Sous les Ming, les moines de l'école Zhengyi (unité orthodoxe) reprirent les activités du temple tout en perpétuant les traditions Quanzhen et les cérémonies d'ordination. Le monastère fut à nouveau restauré en 1443. Et le monopole Zhengyi s'interrompit au début de la dynastie des Qing car le temple fut attribué au maître Quanzhen Wang Changyue (important maitre de l'école taoïste Quanzhen Dao, et septième patriarche de la branche Longmen). Et le temple du Nuage blanc d'être resté jusqu'à maintenant sous le contrôle de Quanzhen. Une importante restauration eut lieu en 1706 et lui donne beaucoup de son aspect actuel. Durant la Première république de Chine, les autorités ne s'intéressèrent pas beaucoup au taoïsme et l'endroit resta sans abbé durant les années 1940 avant d'être fermé par les Communistes lors de leur arrivée au pouvoir en 1949. Le temple du Nuage blanc, contrairement à d'autres sites historiques, ne souffrit pas de dommages durant la révolution culturelle et resta un lieu sûr. Et il est aujourd'hui redevenu un monastère opérationnel, siège de l'association chinoise taoïste. La surface totale des constructions représente à présent 10000 m² mais celle du temple tout entier, 60000 m². L'endroit est classé monument historique depuis 2001.


 

Comme dans beaucoup de cas en Chine, le temple se compose de plusieurs bâtiments ordonné selon un axe nord-sud avec l'entrée à l'extrémité sud. Il s'étend sur environ deux hectares et , sur la cinquantaine de constructions de tailles diverses, on peut distinguer cinq salles principales alignées d'après l'axe central une fois franchi un espace d'entrée composé d'un mur-paravent destiné à arrêter les influences néfastes, un portique, le grand portail, et le pont Wo Feng. Ce pont fut bâti en 1706 (et rénové en 1988) durant le règne de l'empereur Shengzu (dynastie des Qing). La coutume existante consiste pour les fidèles à lancer des pièces sur les cloches en bronze dans le but d'être chanceux (première photo ci-dessus). On trouve ainsi la salle Linguan (deuxième photo ci-dessus) qui fut érigée en 1443 durant le règne de l'empereur Ying Zong (sous la dynastie des Ming), puis reconstruite en 1456 et restaurée en 1662. Cette salle abrite la statue de l'officier divin Wang, le protecteur qui repousse les influences mauvaises à l'extérieur du temple. Il a un visage rouge et trois yeux, est revêtu d'une cape jaune et tient un fouet en acier dans une main. Il a le pouvoir d'exorciser les démons et de guérir les malades. On fête son anniversaire le 23 juin du calendrier lunaire. On y voit aussi sur les murs de chaque côté les portraits de quatre maréchaux appartenant à différentes époques de l'histoire chinoise: Zhao Gong Ming, Ma Sheng, Wen Qiong et Yue Fei. La salle Yuhuang (ci-dessous), elle, est consacrée à l'empereur de Jade et fut bâtie en 1438 sous le règne de l'empereur Ying Zong (dynastie des Ming), restaurée en 1661 puis reconstruite en 1788. Elle comprend trois travées qui supportent un toit à pignons et est flanquée de deux tours abritant un tambour et une cloche. Les mots figurant sur le panneau au-dessus de la porte ont été écrits en 1956 par Li Jishen , alors vice-président du gouvernement chinois. La draperie du hall fut offerte par la Reine mère Ci Xi ( à l'époque des Qing). L'empereur de jade (aussi appelé Yuhuang Dadi), lui, est un dieu chinois d'origine taoïste qui régit les autres dieux. Il est lié au ciel et à la souveraineté. Il est, comme l'empereur de Chine, seul, enfermé dans son palais et inaccessible et ne s'occupe que de sa cour et de ses hauts fonctionnaires. Il régentait la bureaucratie céleste, mais seuls les fonctionnaires divins avaient affaire à lui. Il ne s'occupait guère des humains et ceux-ci le lui rendaient bien car rares sont les autels en son honneur ou les statues le représentant. Il est représenté sous les traits d'un empereur assis sur son trône avec une coiffe d'où pendaient des rangées de perles qui lui cachaient le visage. Et il portait un sceptre à deux mains.


 

La disposition de la salle Laolü (ci-dessous) est identique à celle de la salle Yuhuang et fut initialement construite en 1228 sous la dynastie des Yuan. Elle est aussi appelée Hall des sept véritables Saints. Et abrite les sept immortels de QuanZhen: Qiu Chuji (au centre), Liu Chuxuan, TanChuduan et Ma Yu (côté Est), Wang Chuyi, Hao Datong et Sun Buer (côté Ouest). Elle sera restaurée en 1662. La communauté monastique y tient chaque jour deux offices, des prières et les écritures quotidiennes, et c'est à cet endroit qu'étaient délivrés les certificats d'ordination durant la dynastie des Qing. D'où son nom: La règle (Lu) de Lao. Du temps de la dynastie des Qing, le Temple du Nuage blanc était en effet le plus important des vingt centres d'ordination Quanzhen. Les novices devaient d'abord passer trois années au temple avant de devenir éligibles pour devenir prêtre taoïste. Le processus se voulait très dur, car ces novices subissaient cent jours d'une formation brutale qui s'avérait même parfois mortelle. Cette formation passa ensuite à 53 jours et n'est plus aussi dangereuse qu'avant. Les candidats subissaient ensuite des examens sur les classiques, la poésie, et les préceptes taoïstes. Sous les Qing, 200 novices en moyenne étaient ordonnés prêtres tous les quatre ans. Et puis les cérémonies d'ordination furent interrompues après 1927, pour ne reprendre qu'en 1989. La salle Qiuzu fut quant à elle bâtie en 1228 pour commémorer Qiu Chuji et comprend trois travées bordées par une galerie avant. L'anniversaire de Qiu Chuji est toujours célébré, chaque année, au 19 ème jour du premier mois lunaire. Et c'est au Temple du Nuage blanc qu'a lieu cette cérémonie. Les fidèles pensent alors que Qiu Chuji revient sur la terre en tant qu'immortel ce jour-là. L'origine de cette fête remonte à la dynastie des Yuan mais elle fut suspendue après la fondation de la république populaire de Chine en 1949. Le temple la relança avec succès en 1990 puisqu'elle est depuis célébrée tous les ans.


 

La dernière des salles importantes de ce temple est la salle Sanqing (ci-dessous), construite en 1428, durant le règne de l'empereur Xuan Zong (sous la dynastie des Ming). Il s'agit d'un duplex comprenant cinq travées et un toit à pignon. A l'étage supérieur, elle contient les statues des Trois Purs (Sanqing). Les Trois Purs sont les trois dieux les plus élevés du panthéon taoïste. Leurs noms et leurs détails varient selon les écoles. Ces dieux sont au sommet du panthéon et occupent les trois ciels les plus élevés. D'après les conceptions taoïstes, tout est souffle et les souffles les plus purs s'élèvent le plus haut. Au commencement l'air primordial se divisa en trois airs: QingWei Tian, Yuyu Tian et Dashi Tian. Ces trois airs formèrent trois cieux où résideront pour toujours les Trois Purs. A l'étage inférieur de la salle Sanqing, se trouvent les statues des quatre Majestés: Ces statues représentent les quatre divinités du panthéon des principales écoles taoïstes. Placées directement sous les Trois Purs, ou l'empereur de jade, elles représentent les quatre domaines de l'univers. Il y a d'abord l'empereur de jade qui représente les dieux qu'il dirige, puis on trouve Ziweibeiji (l'empereur du pôle céleste nord), qui a son siège dans l'étoile Ras Algethi (appelée aussi trône) au centre du zodiaque chinois. Il représente le ciel et préside au monde des astres. Ensuite vient Gouchenshangong Dadi (Empereur de la maison astrale supérieure) représentant les quatre astérismes les plus proches du pôle céleste nord. Il est l'axe de l'univers et préside aux évènements humains, guerres et calamités. Enfin, on trouve Houtu Huangdizhi (Impératrice du sol) qui porte le nom d'une ancienne divinité de la Terre formant un couple avec le ciel. Elle gouverne les fluctuations entre le Yin et le Yang ainsi que les naissances et la nature.

A l'est de cette dernière salle se trouve la bibliothèque destinée depuis les Ming à abriter le Canon taoïste.


 

D'autres salles existent à l'intérieur du Temple du Nuage blanc: Je m'arrête ainsi quelques instants devant la salle Cai Shen (ci-dessous). De nombreux fidèles y font la queue, comme devant toutes les autres salles, munis de leurs bâtons d'encens et prêts à adresser leur courte prière. L'endroit abrite les trois dieux de la richesse: Bi Gan (au centre) que l'on fête le 5 janvier, Zhao Gong Ming (à gauche), fêté le 15 mars et Guan Yu (à droite), célébré le 24 juin du calendrier lunaire. Ces dieux apportent la prospérité dans les affaires et aident les croyants à s'enrichir.


 

Deux autres salles, le Hall Jiu Ku (ci-dessous) et la salle San Xing (deuxième photo ci-dessous) retiendront aussi mon attention. Le Hall Jiu Ku abrite Tai Yi Jiu Ku Tian Zun, le dieu céleste du salut, qui règne sur le royaume taoïste du monde du néant. Il préserve ainsi les âmes des morts, à qui il permet de trouver la lumière et de se réincarner. Il pardonne aussi à tous les êtres leurs péchés. On le célèbre le 11 novembre du calendrier lunaire. La salle San Xing abrite pour sa part trois dieux des étoiles: Fu Xing ( au centre) qui veille sur la famille et apporte bonheur et harmonie, Lu Xing ( côté ouest) aide les gens à trouver un bon emploi et à gagner de la promotion, et Shou Xing (côté est) donne aux êtres humains une bonne santé et une longue existence.


 

Je ne visiterai pas toutes les salles car elles sont nombreuses mais le lieu est agréable et très fréquenté par des fidèles chinois ( j'étais le seul blanc!) qui viennent se recueillir sur place. Je n'ai pas été autorisé à prendre des photographies à l'intérieur des salles, sauf une seule fois, dans la salle Sanguan (ci-dessous). Mais je n'ai jamais senti de tension ou d'animosité lorsque je pénétrais à l'intérieur. Et les quelques personnes à qui j'ai demandé mon chemin furent très coopérantes. A l'intérieur du temple, il y a aussi un centre de soins qui dispense aux patients acuponcture et massages ( voir infos pratiques ci-dessous). J'y fus en ce qui me concerne très bien accueilli et servi immédiatement et...gratuitement! Est-ce parce que je suis étranger?


 

 

 

INFOS PRATIQUES:

 

 


  • Temple du Nuage Blanc, 6 Baiyunguan Jie, Xibianmenwai à Pékin. Tel: 010 63 46 35 31. Ouvert tous les jours de 8h30 à 16h00 . Entrée : 10 RMB. Aucune brochure en anglais n'est disponible. Des panneaux d'information en chinois et en anglais sont disponibles pour chaque curiosité. Juste à gauche de la porte Mountian, un kiosque vend des billets à 10 RMB mais je n'ai pas réussi à savoir pour quoi (peut être ces billets s'échangent-ils contre des bâtons d'encens?). Le temple héberge aussi un hôpital (dont l'entrée se situe au nord du temple). L'établissement est ouvert de 8h00 à 11h30 et de 13h00 à 16h30. Comptez 20 RMB pour une séance d'acuponcture, 60 RMB pour un massage thérapeutique (des viscères) ainsi que pour une préparation médicinale.

  • Pour se rendre au Temple du Nuage Blanc, j'ai emprunté la ligne de métro N°1, puis suis descendu à la station Nanli Shi Lu. Prix du ticket de métro: 2 yuans. Ai emprunté la sortie C, puis ai tourné à gauche en haut des escaliers (carrefour), puis encore à gauche. Puis, au premier passage protégé, ai tourné à droite, ai marché cinq minutes puis ai emprunté la rue ZenWu Miao Lu (grande rue) en tournant sur ma gauche. Suis arrivé à un feu, ai traversé le passage protégé pour me rendre dans le parc en face. Celui-ci longe la rivière face à vous. Prenez alors sur votre droite et longez cette rivière jusqu'à atteindre un pont: Franchissez-le (sur votre gauche) puis marchez tout droit. Le Temple se trouve sur votre gauche (niveau parkings), à cinq minutes de marche. Un dernier conseil! Faites-vous inscrire sur un morceau de papier le nom du temple du Nuage Blanc en idéogrammes puis montrez-le aux passants. Ils comprendront mieux.

 









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