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Les Patios du Palais de Viana
(Cordoue, Andalousie, Espagne)
Heure locale


Jeudi 20 novembre 2014

 

A Cordoue, il était (et il est encore) de tradition de se rassembler autour du patio, cette cour qui constitue le cœur de l'habitation typique. L'endroit permet à l'air et à la lumière de pénétrer dans la maison. Les orangers, citronniers et fleurs en pot qui le garnissent font du patio un paisible lieu de retraite et un oasis de fraicheur durant les heures chaudes de l'été. Il est souvent décoré d'arcades en brique, de tuiles de couleur vive ou d'éléments en fer forgé. Les Andalous aiment leurs patios, tout particulièrement à Cordoue, qui y consacre d'ailleurs une fête annuelle (photo dans les infos pratiques). Les plus beaux se trouvent dans les quartiers de San Lorenzo et la Juderia, dans le quartier de San Basilio et à l'ouest de la Mosquée.

Je décide ce matin de partir à la découverte du Palais de Viana, l'endroit d'exception pour ce type de jardins intérieurs puisqu'il en possède...treize ! Cet édifice se trouve au centre du quartier de Santa Marina, du nom d'une église qui fut construite au XIII ème siècle à la demande du roi Fernand III Le Saint. Le bâtiment principal de ce palais date du XIV ème et a été modifié à plusieurs reprises, ne serait-ce qu'entre 1953 et 1963, lorsqu'il devint le musée qu'il est encore de nos jours (des visites de groupes, avec un guide, sont possibles à l'intérieur du palais mais la prise de photographies est interdite). La superficie de l'ensemble dépasse les 6500 m2 (dont 4000 m2 de jardins et patios). L'endroit est discret : seule la porte d'entrée donnant sur la Place de Don Gome reflète quelque peu la richesse de cette maison qui appartint aux marquis de Viana. Le premier propriétaire des lieux fut Don Gomez de Figueroa, l'époux de Dona Lucrecia Mesia. Le couple eut deux fils, lesquels héritèrent plus tard de la propriété. Ces derniers firent alors l'acquisition d'autres maisons du quartier qui vinrent agrandir l'ensemble d'origine. Bien plus tard, la marquise Sofia de Lancaster sera la dernière détentrice des lieux, avant que le palais ne soit vendu à la banque CajaSUr , la caisse d'épargne de Cordoba, organisme qui gère désormais le destin de cette maison.

Anciennement connu sous le nom du Palais des grilles, le Palais de Viana, hôtel particulier unique m'ouvre ses portes. Celui-ci abrite la plus belle collection de patios cordouans existante, représentant cinq siècles d'histoire. L'endroit fut déclaré monument historique et artistique national en 1981, puis jardin historique et artistique deux ans plus tard.

Dix-huit propriétaires appartenant à la noblesse se succédèrent dans ce palais entre les XV è et la fin du XX è siècle. L'agencement est irrégulier car souvent le fruit de travaux d'agrandissement. Je pénètre dans le palais par la porte donnant sur la Place de Don Gome et suis accueilli par le premier jardin, le Patio de la Grille (ci-dessous en photo) correspondant à l'entrée du « nouveau » palais Viana. Celui-ci fut le patio d'entrée à la maison des Torres Cabrera, jusqu'à ce que cette propriété soit annexée à Viana au XIX ème siècle. Il fut autrefois doté d'un grenier à grain et d'écuries, et son aspect actuel date du milieu du XX ème siècle. On peut y admirer des papyrus à feuilles, des ifs communs et des roses de Banks, mais également des ficus, des géranium et des bougainvilliers. Ce patio est de forme rectangulaire et possède deux galeries tandis qu'une fontaine trône au centre.


 

Le Patio d'accueil, ci-dessous, les écuries et l'entrée principale de style renaissance, qui datent du XVI ème siècle, furent construits pour montrer le statut socio-économique de la famille des Villaseca. On trouve ici un patio imposant, caractérisé par l'harmonie existante entre l'ornementation végétale et l'architecture. Le patio est entouré de larges arcades, essentielles pour pouvoir entrer et sortir les chevaux à l'époque. Le roi Alphonse XIII (en 1921) mais aussi le Prince des Asturies, accompagné de son frère, Don Jaime (en 1927) visitèrent cet endroit. Ici, la végétation est omniprésente, avec ses acanthes à feuilles molles, ses belles de nuit et ses palmiers dattiers. Ici et là, on peut observer une cinquantaine de pièces archéologiques, sous les galeries.


 

Je me rends maintenant au Patio des Chats (ci-dessous). L'endroit est plus petit que le précédent et permet d'apercevoir un vieux lavoir (sur la gauche) qui jouxte une cuisine de la maison. L'apparence est relativement austère. Jadis cour de service, ce lieu n'était pas accessible jusqu'à un passé récent. Il s'agit là d'un des patios les plus méconnus du palais, qui appartenait aux maisons de Tres Canos, et les logements furent destinés à la location à l'époque médiévale. Ce patio de voisins est le plus ancien d Cordoue (archives à l'appui). Ce type de cour constituait en effet un lieu de rencontre entre voisins, témoignant du style de vie des habitants d'alors, avec portes ouvertes sur l'extérieur. Mais au fait, pourquoi surnomme t-on cette cour le Patio des Chats ? Tout simplement, ces derniers étaient nombreux à rappliquer, attirés qu'ils étaient par les odeurs provenant de la cuisine.


 

Le patio suivant est le Patio des orangers (ci-dessous) : au XV ème siècle, celui-ci était le patio d'entrée du palais. Il rappelle ces jardins hispano-musulmans de par sa structure fermée et son atmosphère intime, mais aussi le rôle important de l'eau (on y trouve deux fontaines) et l'utilisation combinée des fleurs et des arbres fruitiers. On y trouve six orangers centenaires qui entourent la fontaine centrale. Juste à côté, un joli bassin est garni de mosaïques. La glycine recouvre la presque totalité des murs voisins, Le bruit constant de l'eau, les recoins inaccessibles, la pénombre sont synonymes de mystère, solitude, intimité et de repos. Trois plantes principales ornent ce patio : l'oranger amer, la glycine de Chine et l'héliotrope, plante préférée du marquis d'alors.


 

Me voici maintenant dans le Patio des Grilles (ci-dessous), synonyme d'exhibition du pouvoir. On l'appelle ainsi à cause des trois portes fenêtres, trois grilles grandioses de style maniériste donnant sur la rue voisine et dont la fonction était d'exhiber le prestige et le pouvoir de ses occupants. Sa construction remonte à 1624. Les murs de cette cour sont ornés de citronniers, d'orangers et de bergamotes. A l'époque, lors de la semaine sainte, les marquis de Viana assistaient depuis ce patio à la procession de la Confrérie des Angoisses qui passait par la rue Rejas de Don Gome, du temps où cette confrérie avait son siège dans l'église voisine de Saint Augustin. On peut y trouver des bergamotiers, des centaurées et des cinéraires des fleuristes.


 

A présent, visitons le Patio de Madame (ci-dessous). Celui-ci fut réalisé lors des travaux de rénovation au XVIII ème. Il s'agit d'un patio de style classique et intime, conçu pour être vu de l'extérieur. Il doit son nom à la statue de cette dame de la fontaine qui préside les lieux. L'ensemble des cyprès taillés qui entoure la fontaine a été ajouté au début du XX ème siècle. On peut aussi trouver quelques colonnes et des restes archéologiques qui viennent embellir la cour. Sur place, les plantes principales sont le cyprès éternellement vert, le jasmin blanc, qui embaume et recouvre les murs, et le séneçon maritime.


 

Le Patio des Colonnes (en photo ci-dessous) symbolise quant à lui l'espace du XXI ème siècle. C'est le plus récent patio du palais de Viana, bâti depuis la reprise de sa gestion par la banque CajaSur. Il est prévu pour servir aux célébrations d'évènements culturels ou de spectacles et est assez grand pour cela. Le sol est recouvert de figures géométriques constituées de petits galets de couleurs différentes, tandis que plusieurs fontaines jaillissent de bassins longs et étroits. A noter toutefois que ce jardin ne fait pas partie du palais historique. On peut y admirer la myrte, la centaurée et le bougainvillée.


 

Plus vaste que ses prédécesseurs, Le Jardin (ci-dessous), de style baroque, est l'espace arboré le plus vaste du palais. Réalisé au début du XIX è siècle, il répondit au souhait du VII è marquis de Villaseca de doter la demeure d'un jardin, comme d'autres nobles en possédaient de semblables déjà à cette époque. Au centre, se trouve une fontaine, desservie par de petites allées aménagées entre une multitude de haies. A ne pas manquer sur place, le chêne vert, vieux de plus de quatre siècles, et une tonnelle de style grotesque, recouverte de lierre. A l'intérieur de chaque carré de haies, on peut admirer des parterres de fleurs, du moins, à la belle saison. Parmi les plantes remarquables, on trouve le buis, le chêne, le laurier rose et la magnolia de Chine.


 

A deux pas de là, voici le Patio du Bassin (ci-dessous) qui faisait partie de la zone réservée aux jardiniers, du temps de la maison des Torre Cabrera, maison qui fut annexée au palais, au cours du XIX ème siècle. Ce patio de travail est aujourd'hui devenu l'atelier des jardiniers du palais.


 

A côté, se trouve le Patio du Puits (ci-dessous). Le point d'intérêt de ce patio est son puits, ce fameux puits d'où l'on tirait l'eau depuis le Colodro, un ruisseau souterrain d'un débit suffisant pour alimenter tous les patios du palais. On pense que ce point d'eau aurait été creusé du temps des Romains. La forme de cette cour s'adapte au contour des rues adjacentes comme cette rue Zarco, à laquelle on a accès par un petit passage. La végétation y est abondante et on peut trouver notamment des bougainvillées, et des lantaniers. Curiosité de l'endroit : l'auge décorative du patio. Sur un mascaron, on peut apercevoir l'inscription suivante « 1913, fontaine de Dona Leonor », faisant allusion à la sœur du dernier marquis.


 

Le patio suivant est une longue cour appelée Patio des Jardiniers (ci-dessous). On surnomme ainsi ce patio car il abrite le matériel de l'équipe des jardiniers. Il se distingue par son mur recouvert de plumbago (plante surnommée aussi dentelaire du Cap, une grimpante appréciée pour ses fleurs et son feuillage) qui offre aux visiteurs un véritable jardin vertical. Des objets archéologiques, une jolie fontaine et des carreaux de faïence ornent aussi ce lieu. On accède à ce patio typiquement cordouan en franchissant une porte en forme d'arcade. Outre le plumbago, on peut y admirer le pourpier, une plante aux tiges rampantes.


 

Le Patio de la Chapelle (ci-dessous en photo) date du XVII ème siècle, mais il fut intégré au palais de Viana au XIX ème. Il doit son nom à l'existence d'une chapelle annexe, aujourd'hui réintégrée. Le lieu suggère le silence et est occupé par un petit musée archéologique de grande valeur, tant par le nombre et la valeur des objets qui le constituent. Des quatre côtés de ce patio, seuls deux d'entre eux comportent des galeries en forme d'arcades, galeries ornées d'un plafond en bois et d'un sol pavé. Le patio est agrémenté de huit orangers centenaires entourant une petite fontaine centrale. A ne pas manquer : les objets archéologiques. Les plantes remarquables sont le clivia, le monstera délicieux (ou ananas du pauvre) et la fougère.


 

Nous voici enfin dans le Baroque cordouan, avec le Patio de l'Archive (ci-dessous). C'est le plus intérieur des patios de ce palais. Il date du XVIII ème siècle et est un exemple de style baroque sobre, commun dans la ville de Cordoue, style caractérisé encore aujourd'hui par les façades des églises Saint Hypolite ou San Pedro de Alcantara . La mezzanine abrite les précieuses archives historiques du palais (d'où son nom). Ces archives renferment entre autre des documents datant du début du XIV è siècle et postérieurement. Les murs blancs de ce patio contrastent étonnement avec la verdure des orangers centenaires, et des mandariniers situés dans les angles. Les jeux de portes et des fenêtres de couleur bleue relèvent l'ensemble. Les espèces végétales remarquables de ce patio restent le mandarinier commun et la violette odorante.


 

Ainsi s'achève ce tour d'horizon des patios du palais de Viana. Bien entendu, il suffit de se promener dans les différents quartiers de Cordoue pour découvrir bien d'autres patios, qu'ils soient seigneuriaux, ou monumentaux, populaires, modernes, de travail, intérieurs ou semi-couverts, ou encore aménagés en jardin... Vous n'aurez que l'embarras du choix, le plus difficile étant peut être d'y accéder car il s'agit là de propriétés privées. Il vous reste cependant la possibilité de venir ici au mois de mai, pour participer au festival des patios : les habitants décorent leurs patios de fleurs multiples et les visiteurs peuvent alors facilement visiter ces patios splendides, parfois cachés en temps normal, patios qui se trouvent notamment dans les quartiers de San Augustin, San Lorenzo, La Juderia ou encore San Basilio. Un jury passe admirer chaque patio, lui attribue une note et procède à son classement. Tout au long de cette manifestation, on peut également assister à des danses et des chants, et faire la fête tous les soirs.

 

INFOS PRATIQUES :


  • Palais de Viana, Plaza de Don Gome, 2, Quartier Santa Marina, à Cordoue. Tél:(+34) 957 496 741. Ouvert du mardi au vendredi, de 10h00 à 19h00. Les samedis, dimanches et jours fériés, de 10h00 à 15h00. Du 1er juillet au 31 août : du mardi au dimanche, de 9h00 à 15h00. Durant tout le mois de mai (festival des patios cordouans), le palais est ouvert du lundi au dimanche, de 10h00 à 23h00. Entrée : 5 € (visite des patios) ou 8€ ( visite des patios et du palais). Prise de photos autorisée dans les patios mais pas dans le palais. Consigne à bagages gratuite. Dépliants en espagnol et en français. Boutique. Visites guidées de nuit (voir le site internet pour les détails).Site internet : http://www.palaciodeviana.com/es/home.asp

  • La meilleure époque pour visiter les patios du palais : mars, avril et mai

  • Festival des Patios de Cordoue : http://patios.cordoba.es/fr/

  • Si vous souhaitez emporter avec vous un patio miniature artisanal, voici un site internet dédié : http://www.patiosminiatura.es/

  • A deux pas du palais, pour vous restaurer, une excellente adresse : Rincon de las Beatillas, Plaza de las Beatillas, 1, à Cordoue. Tél : (+34) 957 48 33 36. Accueil très sympathique. Menu à 9€ incluant un verre de vin. Carte riche et abordable. Site internet : http://tabernabeatillas.com/








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