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Wynyard et Table Cape
(Tasmanie, Australie)
Heure locale


Mardi 22 novembre 2016

 

Ce n'est pas qu'il y ait grand chose à voir dans la petite ville de Wynyard elle-même mais ses alentours immédiats présentent un certain intérêt. Ayant établi mon QG à Burnie depuis hier, je ne me trouve qu'à une demi-heure de Wynyard qui accueille en son sein Table Cape, une ancienne formation volcanique ressemblant à celle de Stanley. C'est en 1798 que Flinders et Bass donneront ce nom au gigantesque rocher au sommet plat, lors de leur voyage à bord du Norfolk. Au tout début, Wynyard s'appelait Inglis River, et ne prendra son nom actuel que dans les années 1850. Le premier aventurier à s'être installé à Table Cape fut John King, un fermier originaire de Dunedin, près de Launceston. Et d'exploiter alors 200 acres de terre au bord de la rivière, zone depuis occupée par un terrain de golf. Peu à peu, la petite ville prendra forme, avec la construction d'une jetée, sur la rivière Inglis, puis un premier hôtel, un magasin, un fabricant de chaussures, un forgeron...suivront. C'est vers 1850 que naitra le centre-ville actuel.


 

Table Cape se repère de loin. Haut de 180 mètres, ce rocher volcanique plus ou moins circulaire, offre l'avantage d'être plat en son sommet, et de disposer de bonnes terres. Je vous ai parlé récemment de la prestigieuse compagnie Van Diemen : Celle-ci a installé sa ferme de production de bulbes de tulipes à Table Cape : Le Major Alexander Roberts-Thomson s'installa sur place dès 1910 pour élever du bétail et cultiver des terres. Et la même ferme fut plus tard conservée par ses descendants qui eurent la bonne idée de tenter la production de tulipes à partir de bulbes importés de Hollande en 1984. Et d'offrir ainsi un fascinant spectacle annuel aux visiteurs, entre la fin septembre et la fin octobre de chaque année, celui de champs de tulipes multicolores (ci-dessous). La ferme, qui constitue la plus grande unité de production de l'hémisphère sud, ouvre aussi ses portes au publicà ce moment-là. Le climat frais et humide qui règne ici est idéal pour cultiver la tulipe, et les touristes de passage de découvrir la ferme en plein travail, ainsi que le hall d'exposition florale situé à l'intérieur. La floraison est un tel événement qu'il donne lieu à un festival Bloomin'Tulips à Wynyard (qui a déjà reçu le qualificatif de ville de la tulipe), accueillant plus de 10000 personnes.


 

Ce volcan éteint est âgé d'environ treize millions d'années, et les rejets de basalte lors de ses éruptions ont considérablement enrichis les sols en oxyde de fer. Il y a fort longtemps, le feu et la glace firent leur œuvre, avec d'abord l'éruption du volcan relâchant des torrents de sédiments ensuite recouverts de glace il y a 300 millions d'années pour former plus tard des tillites, roches sédimentaires formées par la compression d'un dépôt fluvio-glaciaire ancien ou d'un dépôt morainique (débris de roches). En ces temps éloignés existait alors un gigantesque glacier de 25 km de large qui filait vers l'océan. Peu à peu, ce glacier libèrera des blocs de rochers sous la forme d'icebergs, autant de sédiments qui enrichiront à terme les fonds marins. Il y a 22 millions d'années, le niveau des océans s'éleva et le travail produit par l 'érosion, de former une baie où se réfugièrent de nombreux animaux marins (coquillages et coraux notamment). Au fur et à mesure de la montée de l'océan, d'autres créatures apparaitront et formeront les couches inférieurs de la falaise appelée ici fossil bluff (ci-dessous en photo). Des animaux, des plus énormes (baleines) aux plus petits (coquillages) viendront ainsi enrichir l'écosystème local au fil des siècles. On découvrira notamment qu'à cette époque, vivait ici un mammifère préhistorique appelé Wynyardia bassinia qui se nourrissait de graines. Il fut l'un des premiers mammifères dont l'existence fut répertoriée en Australie. L'intérieur des falaises près de Wynyard permettra même de retrouver des traces de pollens, mettant en évidence l'existence d'une forêt humide en ces temps anciens. Le rétrécissement progressif de la baie coïncidera avec les éruptions volcaniques d'il y a treize millions d'années, recouvrant les vallées de lave et de cendres et libérant d'immenses quantités de basalte. L'existence de ce sol extrêmement riche explique l'existence de forêts denses alors difficilement pénétrables pour les premiers Européens. Et la terre de produire désormais de jolies tulipes qui sont exportées aux Pays-Bas. Quant à la falaise fossil bluff, il suffit de s'y pencher d'un peu plus près pour découvrir d'étranges sculptures marines découpées dans les roches anciennes, ce qui fait de cette formation géologique l'une des plus importantes de Tasmanie.

 

Les Aborigènes furent les premiers occupants de Table Cape, et ce, depuis des milliers d'années, cultivant les terres au rythme des saisons. Table Cape s'appelait alors Toin-Be-Noke, nom donné au rocher par la tribu des tommeginer, une des huit tribus ayant jadis occupé le nord-ouest de la Tasmanie. L'arrivée des Européens ne fit pas l'affaire des tommeginer qui utilisaient alors le rocher pour envoyer des messages codés à l'aide de feux. On sait également qu'ils faisaient usage de fumier pour leurs cultures et qu'ils se nourrissaient aussi des produits de la mer. Ce lieu restait (et reste encore de nos jours) pour eux un endroit symbolique, sacré, et une terre nourricière avec ses écrevisses géantes et ses coquillages.


 

L'emplacement privilégié du rocher volcanique ne cessera de fasciner les hommes. Après les feux codés des Aborigènes, les Européens construiront un phare (ci-dessous). On conquerra d'abord les terres au début des années 1840, puis des feux de signalisation seront bientôt installés en plusieurs endroits, afin de guider les navires. On suggérera d'abord, en 1879, l'érection d'un phare à Rocky Cape, en vain. Dès 1883, arbres et buissons sont alors nettoyés de Table Cape pour dégager un espace, en vue de la construction d'un phare. Le projet de construction est définitivement adopté quatre ans plus tard, et 20 000 briques sont chargées à Melbourne sur le bateau John Lewis afin d'être livrées à Table Cape pour bâtir l'ouvrage. Le 1er août 1888, le phare se mit à briller pour la première fois, à 17h00 en heure locale, utilisant dans un premier temps de l'huile de paraffine, puis de l'huile de colza pour alimenter son feu. Et son éclat fixe de devenir clignotant en 1912, avec une puissance de feu accrue. Un an plus tard, il ne restera plus que deux gardiens de phare sur les trois jusqu'ici en fonction, jusqu'au jour où il n'y eut plus aucun personnel sur place après l'automatisation de l'ensemble (deuxième photo) en 1920. Le tout premier gardien de phare aura été Robert Jackson, dès 1888, accompagné de son épouse et de ses onze enfants. La construction du phare sera, elle, confiée aux architectes Huckson et Hutchison (de Hobart) et l'édifice, bâti en deux parties, avec les fondations d'un côté, puis le phare en lui-même. La partie éclairage fut importée d'Angleterre. La lentille d'origine était une lentille Fresnel , placé dans une cage d'optique, lentille toujours en place aujourd'hui. Un système de lumière à acétylène, inventé par Gustav Daler en 1906, fonctionna entre 1920 et 1979.


Je quitte Wynyard et ses richesses pour filer sur Boat Harbour Beach, minuscule village côtier avec une plage idyllique aux eaux turquoises, lorsque le temps le permet, bien entendu (ci-dessous). Cette plage semi-circulaire au sable fin et blanc fait la fierté des 150 habitants vivant ici. Je ne verrai sur place aucun baigneur, l'eau devant être trop fraiche en cette saison. Pas de requin non plus dans le coin car il ne fait pas assez chaud. Seules les mouettes occupent les lieux.


 

A quelques kilomètres de là, se trouve une autre grande plage de trois kilomètres de long, Sisters Beach (la plage des Soeurs), située à l'intérieur du plus petit parc national de Tasmanie, le Rocky Cape National Park. La petite commune aligne de riches et belles maisons avec, pour chacune d'entre elles, une vue directe sur l'océan. Un havre de paix pour gens aisés au milieu d'un endroit reculé qui abrite cependant le grand arbre Banksia serrata, ou chèvrefeuille rouge, qu'on ne trouve en Tasmanie qu'à cet endroit. Quant aux sœurs qui ont ici leur plage, je ne saurai jamais à quelle famille elles sont rattachées.

Le parc national de Rocky Cape, lui, est situé en bordure du détroit de Bass, un bras de mer séparant le continent australien de la Tasmanie. Son nom provient du médecin George Bass qui accompagnait l'explorateur Matthew Flinders lors de son franchissement en 1798. Le parc ne peut être visité qu' en journée car rien n'est prévu pour y passer la nuit. On peut y découvrir des petites plages, des collines recouvertes de banksias avec de superbes vues sur le détroit de Bass. Des caves, jadis occupées par les Aborigènes (qui vécurent là pendant 8000 ans) sont également accessibles. De nombreuses randonnées sont donc possibles (d'une durée de 20 minutes...à 24 heures!) Sans compter les nombreuses espèces de plantes et d'oiseaux à découvrir.

 

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