Revoir le globe
Top


Si Tokyo m'était contée
(1) (Japon)
Heure locale



 

Vendredi 1er septembre 2017

 

Connaissez-vous le musée de l'université privée Meiji ? Le sous-sol de son bâtiment est divisé en trois sections principales : la section archéologique, tout comme celle des biens de consommation s'avèrent fort intéressantes mais la section de criminologie, elle, est la plus surprenante car on y trouve une riche collection d'objets liée à l'histoire des lois, des jugements et des peines. On peut y voir entre autres de minutieuses illustrations des pratiques de torture utilisées sous la période Edo avec les outils appropriés. On y décrit également les méthodes d'exécution plus ou moins créatives selon la gravité du crime commis, à travers des dessins ou d'anciennes photos très spectaculaires. A l'époque, on ne plaisantait pas comme aujourd'hui avec les criminels, et même s'il s'agit de répliques du début du XX ème siècle, ce musée possède la seule vierge (instrument de torture en forme de sarcophage, recouvert de longues pointes métalliques, dont l'Inquisition espagnole faisait aussi usage) du Japon et d'une guillotine (radicale contre les maux de tête!). Je pourrai enfin observer sur place d'anciennes lois manuscrites, des planches d'édits de lois en bois et des reproductions d'instruments utilisés pour capturer les fugitifs à l'époque Edo. D'autres objets de supplice sont bien sûr exposés dans cette section de criminologie dont la visite reste toutefois déconseillée aux âmes sensibles, l'endroit s'apparentant à un Musée de la torture.

 

Tokyo révèle bien des surprises à ceux qui souhaitent en percer les secrets. Ainsi, le minuscule quartier d'Akihabara cache un pont sans cours d'eau au niveau de la sortie sud de la station Akihabara, entre Yodobashi et la rivière Kandagawa. Akihabara laisse penser que l'endroit est énorme mais cela est inexact. Si les néons des alentours de la gare font sensation, ils sont éparpillés dans plusieurs quartiers du même arrondissement de Chiyoda, tandis que le quartier administratif d'Akihabara, lui, se trouve dans Taito, à presque 500 mètres au nord de la gare. Il s'agit simplement de quelques pâtés de bâtiments assez ordinaires longeant les voies de chemin de fer. En ce qui concerne le pont mystérieux qui nous intéresse, des piliers indicateurs, ceux de ce même pont, se dressent du côté sud du parc Akihabara et de l'autre côté de l'avenue vers la rivière. Ces piliers gravés du nom du pont qu'ils marquaient, rappellent l'existence du pont de Sakumabashi (Pont de Sakuma), un pont bien étrange puisqu'il ne semble pas qu'un cours d'eau n'ait jamais traversé l'endroit. Il faut chercher l'explication dans l'histoire du quartier : au tout début de son existence, Akihabara était un lieu de transport multi-modal où transitaient des cargaisons de fret qui étaient acheminées par bateau via la rivière Kandagawa avant d'être conduites jusqu'à la gare par un petit canal creusé à la fin du XIX ème siècle (canal désormais comblé), lui-même surmonté par le pont de Sakuma. A la fin de la période Meiji, Akihabara était devenu la seconde gare de fret la plus active de la ville, alors que cette même gare ne sera ouverte au trafic de passagers qu'en 1925. Et le canal d'être définitivement bouché en 1960. Bien avant le commerce de l'électronique, c'est celui du bois qui s'imposait ici grâce à plusieurs marchands dont Sakuma Heihachi, qui laissa son nom au pont et au quartier.


 

Si, comme moi, vous aimez les trains, il faut vous rendre à la plate-forme d'observation des trains située à deux pas de la gare d'Akihabara, dans l'ancienne gare de Manseibashi qui ferma en 1943, avant d'être rénovée pour rouvrir en septembre 2013 sous la forme d'un centre commercial, le mAAch Ecute Kanda Manseibashi, lequel réutilise certains éléments de structure de l'ancienne gare, dont ses briques rouges (photo ci-dessous). Sur place, vous trouverez quelques restaurants, des boutiques et des cafés mais la curiosité de l'endroit réside dans les quais de la vieille gare reconvertis depuis en plate-forme d'observation des trains de la ligne Chuo. Cette plate-forme vitrée, désormais occupée par un restaurant, permet de profiter du spectacle à l'abri des intempéries. Le café qui occupe une partie des quais rénovés permet de grignoter à l'occasion un encas si le cœur vous en dit. Pour y accéder, il faut emprunter deux escaliers d'origine, l'un datant de 1935 et l'autre, de 1912. Les horaires tardifs de fermeture et l'éclairage adapté permet aux visiteurs de profiter des trains jusqu'à une heure avancée de la nuit, avec, en toile de fond, les lumières d'Akihabara.

La gare de Manseibashi fut quant à elle inaugurée en 1912 et servit à l'époque de terminus de la ligne Chuo. Elle fut conçue par Tatsuno Kingo, architecte de l'ère Meiji, lequel bâtit également celle de Tokyo, gare qui sera fatale à Manseibashi sept ans plus tard. Notre homme fera ses études au Japon, puis se rendra en Angleterre où il travaillera dans la compagnie William Burges en 1881-1882, avant d'enseigner quelques temps à l'Université impériale de Tokyo puis de créer son propre cabinet d'architecte en 1903. Ses première œuvres seront fortement influencées par son séjour en Angleterre (comme le manoir Shibusawa) avant la construction de la gare de Tokyo (https://www.leglobeflyer.com/consulter-reportage.php?id=723&pays=). Le bâtiment original de la gare Manseibashi brûlera lors du tremblement de terre de 1923 mais ne sera pas reconstruit à l'identique. La fréquentation de cette gare chutera sérieusement à la suite de l'ouverture des gares de Kanda et d'Akihabara, et cela aboutira à sa fermeture définitive en 1943, jusqu'à ce qu'elle soit occupée par un musée ferroviaire qui fermera lui aussi en 2006. Une autre gare, souterraine celle-là, exista aussi sous le nom de Manseibashi, sur la ligne Ginza, entre Kanda et Suehirocho. Cette station ne servit que deux années durant, en 1930 et 1931. Bien que celle-ci soit fermée, on remarquera une variation dans la fréquence des piliers de support du tunnel sur le trajet vers Kanda,, pourvu qu'on regarde par les fenêtres du métro de la ligne Ginza. Et les puits d'aération de cette station d'être toujours là, sous les grillages du trottoir de la Chuo-dori, près du magasin Laox d'Akihabara.


 

Tokyo marie à merveille tradition et modernisme, et le promeneur croisera de nombreux temples et sanctuaires lors de ses promenades. Le temple Minobu-Betsuin (en photo ci-dessous) est un petit temple qu'il ne faut pas confondre avec son voisin bien plus grand, Daianrakuji. Il suffit d'entrer dans son enceinte pour admirer une statuette rutilante et bien dodue représentant Daikokuten, et l'un des quelques Aburakake-Daikokuten (Daikoku à arroser d'huile) disséminés dans tout le Japon, mais le seul à Tokyo. La tradition veut en effet qu'on asperge d'huile cette sculpture pour s'attirer les bons auspices de la statuette, d'où cet aspect brillant. Juste après la guerre, l'épouse de l'acteur Hasegawa Kazuo (acteur japonais célèbre qui joua au cinéma et au théâtre dans les années 1940-1950) qui était particulièrement croyante, vit Daikokuten dans l'un de ses rêves et relata cette apparition au temple. Ce dernier fit aussitôt ériger une statuette afin de permettre aux Tokyoïtes de vénérer comme il se doit Daikokuten. Cette statuette étant entourée d'huile, il suffit de faire usage de la petite louche à disposition pour arroser la sculpture. Dans l'enceinte du même temple, on peut également observer une stèle érigée en 1983 par un groupe de restaurateurs locaux, vendeurs de kabayaki (brochettes), une spécialité réputée du quartier réalisée à base d'anguille. La statue en question a été placée à cet endroit afin de remercier le poisson qui fait vivre ces commerçants.


 

Juste en face du temple Minobu-Betsuin, se trouve le parc de Jisshi-Koen qui fut instauré sur l'emplacement de la prison de Denmacho qui existait à l'époque de l'ère Edo. Au milieu de ce parc se dresse un petit clocher en béton, qui protège la cloche de Kokucho (ci-dessous), une cloche détruite à plusieurs reprises lors d'incendies. La cloche actuelle date de 1711 et était autrefois située à près de 200 mètres du site actuel.Ses sonneries étaient jadis utilisées pour déterminer le moment des exécutions à l'intérieur de la prison. De nos jours, celle-ci ne sonne plus qu'au Premier de l'An. Elle est l'une des neuf cloches d'Edo installées autrefois afin d'indiquer les heures aux habitants. Deux autres cloches persistent encore de nos jours, l'une d'entre elles dans le parc d'Ueno (à proximité du visage de Bouddha) et l'autre dans le temple de Senso-ji à Asakusa. Les six autres cloches, elles, ont disparu.

Au temps d'Edo, la journée était divisée en 12 heures associées aux signes zodiacaux chinois (six nocturnes et six diurnes) de durée variable, en fonction de la durée du jour et donc des saisons. Et le gouvernement Meiji d'adopter finalement le système occidental en 1872, avec des durées constantes pour les 24 heures. Il reste que sonner automatiquement des heures de durée variable était un défi de taille en terme d’ingénierie qui fut à l'origine de quelques pièces mécaniques impressionnantes comme, par exemple, l'horloge universelle de Tanaka Hisashige, qui date de 1851 et qu'on peut admirer au Musée national de la nature et des sciences du parc d'Ueno.


 

INFOS PRATIQUES :

 

  • Section de criminologie du musée de l’Université Meiji, 1-1 Kanda-Surugadai, Chiyoda-ku, à Tokyo. Depuis la station Ochanomizu ou Shin-Ochanomizu, marcher cinq minutes. Lignes JR Sobu/Chuo, Tokyo Metro Marunouchi (ou Chiyoda). Musée ouvert de 10h00 à 17h00 tous les jours sauf les dimanches et jours fériés. Entrée gratuite. https://www.meiji.ac.jp/cip/english/institute/museum.html
  • Pont de Sakumabashi, 1 Kanda-Sakumachi, Chiyoda-ku, à Tokyo. A 5 minutes de marche de la station Akihabara (sortie sud), sur le même trottoir que le Washington Hotel (à 150 mètres)

  • Plate-forme d'observation des trains de Manseibashi, 1-25-4 Kanda-Sudacho, Chiyoda-ku, à Tokyo. A 5 minutes de la station Akihabara, au complexe commercial MAAch Ecute Kanda Manseibashi situé le long de la ligne de chemin de fer en hauteur, au restaurant Platinum Fish (http://platinumfish.jp

    ) de 11h00 à 23h00, du lundi au samedi et de 11h00 à 21h00 les dimanches et jours fériés.

  • Temple Minobu-Betsuin, 3-2 Nihonbashi-Kodenmacho, Chuo-ku, à Tokyo. A 2 minutes de la station Kodenmacho (ligne Tokyo Metro Hibiya). A l'arrivée à Kodenmacho, par métro, empruntez la sortie Honcho Gate, puis sur le quai 2, l'ascenseur. Prendre à droite en sortant de l'ascenseur en sortant au niveau de la rue, puis tourner à gauche (entrée du temple) https://m.facebook.com/minobubetsuin/




 



Retour aux reportages







Qui Suis Je - Reportages - Médiathèque - Calendrier - Pays - La lettre - Contact
Site réalisé par Kevin LABECOT
Disclaimer - Version mobile