Lundi 27 décembre 2021
Louis IX, dit « le Prudhomme » et plus souvent appelé Saint Louis, laisse encore aujourd'hui une trace dans l'histoire de notre pays. Décédé le 25 août 1270, à l'âge de 56 ans, il sera canonisé vingt-sept ans plus tard sous le nom de Saint Louis de France, sous l'impulsion de Philippe IV le Bel, son petit-fils. Difficile de succéder à un tel personnage, mais c'est pourtant à cette rude tache que devra s'atteler Philippe III, dit « Le Hardi », second fils du roi Louis IX et de Marguerite de Provence.
Cadet de la famille, Philippe III n'avait pas vocation à régner sur le trône de France. Son frère ainé, Louis, était prédestiné à cette succession mais celui-ci décédera en 1260 et laissera donc le champs libre à son frère Philippe, âgé de quinze ans seulement et d'un caractère plus doux, soumis, timide et versatile tout en disposant aussi de moins d'aptitudes. L'héritier ayant quitté cette terre, on préparera Philippe III à l'accession au trône, en le mariant dès 1262 à Isabelle d'Aragon. De cette union naitront quatre fils : Louis, Philippe, Robert et Charles. Plus un autre fils mort-né en 1271. Philippe III accompagnera son père à la huitième croisade à Tunis, cette croisade où succombera le roi Louis IX, à la suite d'un probable parasitose. Et d'être proclamé roi sous le nom de « Philippe III » à Tunis.
Le nouveau souverain est très pieux, et manque à la fois de personnalité et de volonté. Il est cependant bon cavalier, et cela lui vaudra sur surnom de « Hardi », dû à sa vaillance au combat. Lors de son retour en France, il s'avérera incapable de commander à ses troupes, affecté qu'il était par la disparition de son père. Le roi laissera ainsi son oncle, Charles 1er d'Anjou, négocier avec le sultan hafside de Tunis une trêve de dix ans pour lui permettre de rentrer en France. Le départ des croisés fera aussi l'objet du versement d'un tribut au calife. Cette maudite année 1270 s'acharnera sur le nouveau souverain en lui enlevant son beau-frère et son épouse Isabelle de France (sœur de Philippe III), puis l'épouse du roi, Isabelle d'Aragon un mois plus tard, qui tombera de cheval en se brisant la colonne vertébrale. De retour à Paris en mai 1271, le jeune souverain célébrera les funérailles de son père, puis sera sacré roi de France le 15 août de la même année à Reims.
Le règne de Philippe III sera un règne charnière, entre la disparition du roi d'Angleterre Henri III et la fin des croisades. Et Philippe III d'être alors confronté à des conflits territoriaux, des contestations d'héritages et des guerres de vassalité. Il conservera toutefois la plupart des conseillers de son père et aura pour grand chambellan, Pierre de la Brosse (qu'il fera pendre en 1278), ayant pour principale préoccupation d'agrandir le domaine royal (par le biais d'héritages, d'annexions, d'achats, d'unions et de guerres) et d'y affermir son autorité. Philippe III conduira également une politique matrimoniale active, en se faisant l'instigateur du mariage de sa cousine Mahaut d'Artois avec le comte Othon IV (dans le but d'incorporer le comté de Bourgogne à son royaume).
Le roi ne négligera pas pour autant les institutions pour lesquelles il introduira quelques nouveautés : majorité des rois fixée à quatorze ans, affermissement de la justice royale au détriment des justices seigneuriales, création d'un tribunal royal dans chaque baillage, amendes infligées aux nobles qui ne répondaient pas à la convocation à l'ost royal, création d'un impôt sur les transmissions de fiefs et institutionnalisation de la ségrégation des Juifs.
En matière de politique extérieure, les succès furent mitigés : Philippe III soutint les enfants de son beau-frère (lors du décès de celui-ci en 1275) contre Don Sanche qui sera finalement désigné comme successeur par le roi Alphonse X. En Italie, il soutint le pape Martin IV, puis la politique sicilienne de son oncle Charles d'Anjou. A la disparition de ce dernier en 1285, le roi de France engagera la croisade d'Aragon et attaquera, en vain, la Catalogne (Espagne) cette même année, une épidémie de dysenterie ayant fini par décimer ses troupes. Le souverain, contraint de battre en retraite, sera à nouveau attaqué puis défait le 1er octobre 1285 à la bataille du col de Panissars, avant de rendre l'âme quatre jours plus tard, à Perpignan. Décédé loin de chez lui, Philippe III sera le premier souverain de France à subir la tripartition de corps (séparation du corps en trois parties, le cœur, les entrailles et les ossements). Philippe III verra sa dépouille inhumée à la Cathédrale de Narbonne (pour ses chairs), à l'abbaye de la Noë, en Normandie (pour ses entrailles), à la nécropole royale de Saint-Denis (pour ses ossements) et aux Jacobins de Paris (pour son cœur).
Lui non,plus, à sa naissance en 1268, n'était pas destiné à devenir roi de France car lui aussi avait un frère ainé prénommé Louis (qui décèdera à l'âge de douze ans). C'est ainsi que Philippe le Bel sera sacré souverain à la suite de la mort de son père Philippe III. Surnommé « le Bel » et « le Roi de Fer », compte tenu de sa personnalité rigide et sévère, il est le onzième roi de la dynastie des Capétiens directs, à l'âge de 17 ans seulement. Cela ne l'empêchera pas d'être un roi de référence pour les historiens, sans doute grâce au fait que sous son règne, notre pays atteindra l'apogée de sa puissance médiévale. Avec 16 à 20 millions d'habitants, la France est alors l'Etat le plus peuplé de la chrétienté. Un Etat qui connait également une grande prospérité économique et un pouvoir royal considérablement renforcé. En cela, certains considèrent donc Philippe le Bel comme le premier souverain « moderne » d'un Etat puissant et centralisé.
Pourtant, Philippe IV éprouvera des difficultés à reprendre la maitrise des finances de son royaume t à mettre un terme aux mutations monétaires (https://fr.wikipedia.org/wiki/Mutation_monétaire). Ainsi abattra t-il l'ordre du Temple (ordre religieux et militaire issu de la chevalerie chrétienne du Moyen-Âge) devenu trop puissant, tout en expulsant les Juifs, en pratiquant la dévaluation en rétablissant une monnaie d'or qui restera ferme plus d'un siècle durant à tel point qu'à la fin de son règne, les foires champenoises seront concurrencées par le commerce maritime de l'Europe du Nord. Durant le règne de Philippe IV, les traditions féodales sont en effet abandonnées pour mettre en place une administration moderne. Mais cette centralisation monarchique n'est pas du goût des grands seigneurs tandis que les bourgeois qui subissent de nouveaux impôts se dressent contre le pouvoir royal. Désormais, la volonté du roi s'impose pourtant à tous et un même impôt est prélevé sur tout le royaume de France.
A force de persévérance, le roi assainit les finances du royaume en supprimant les puissances financières devenues au fil des ans un Etat dans l'Etat. Comme cité plus haut, l'Ordre des Templiers (devenu en quelque sorte une banque internationale) sera supprimé. Et de centraliser et réformer la collecte des droits fiscaux en punissant les auteurs de malversations. Au final, cet assainissement financier permettra de racheter le Quercy aux Anglais contre le versement d'une rente annuelle de 3000 livres. C'est que Philippe IV s'entoure de légistes, des conseillers compétents qui jouent un rôle déterminant dans sa politique. Au départ, ces légistes appartiennent dans leur majorité à la petite noblesse puis à la bourgeoisie ou à la noblesse de robe. Apparus sous le règne de Philippe Auguste, ces hommes sont formés au droit romain dans la perspective de faire évoluer la monarchie féodale, qui limite le pouvoir royal. Notre souverain reprend l'oeuvre initiée par son grand-père, à savoir la centralisation de l'Etat. Sous Philippe le Bel, l'administration du royaume est divisée en trois parties : le Grand Conseil (qui se charge des dossiers politiques), le Parlement (responsable de la justice) et la Chambre des Comptes ((affaires financières). Cette dernière entité établit les taxes pour l'exportation, soumet les terres de l'Eglise à une redevance (décimes), introduit une taxe lors de chaque vente et réalise des manipulations monétaires. Autant dire que toutes ces réformes rendirent Philippe IV très impopulaire dans toutes les couches de la société d'alors. Et pourtant, ce même roi sera à l'origine de la création des états généraux, en ordonnant la tenue d'assemblées formées de représentants des trois ordres, le clergé, la noblesse et la bourgeoisie.
En matière de territorialité, Philippe IV sera sur tous les fronts : le fait de confirmer sa suzeraineté sur le duché de Guyenne, alors gouverné par le roi d'Angleterre, entrainera un conflit militaire, de 1294 à 1297, générant l'occupation française de Bordeaux, capitale de la Guyenne, jusqu'en 1303. Un conflit qui sera l'un des prémices de la guerre de Cent Ans.
En 1297, Philippe IV mettra à profit la rupture de l'hommage du comte de Flandre, Gui de Dampierre, au roi de France , pour mobiliser 70000 hommes et envahir son comté. Et le souverain de développer alors le premier arsenal de marine et de se doter d'une flotte de guerre. Ayant renoncé à envahir l'Angleterre, Philippe IV se retourne contre les Flamands révoltés. Lille, Courtrai, Furnes, Bergues et Bruges tombent bientôt dans l'escarcelle du roi de France, avant que ce dernier ne subisse des revers à partir de 1302 (matines de Bruges, bataille des éperons d'or, victoire navale de Zierikzee...). Bref, de son vivant, le domaine royal s'agrandit notablement et l'influence du royaume de France en Europe augmente.
Une fois de plus, c'est tragiquement que le règne de Philippe le Bel prendra fin : le 4 novembre 1314, le roi rend visite à son oncle le comte Robert de Clermont, et tombe de cheval lors d'une partie de chasse. Le souverain, souffrant très probablement d'un AVC, ne peut plus prononcer une seule parole. Il ne se remettra pas de cette chute et mourra quelques semaines plus tard à Fontainebleau, à l'âge de 46 ans et après 29 ans de règne. Philippe IV est ainsi le premier roi de France qui nait et meurt au château de Fontainebleau.
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