Samedi 18 juin 2022
Cela fait longtemps que je m’étais promis de me rendre à Lourdes (65) sans en avoir eu jusqu’ici l’occasion. Qui aurait pu prédire la destinée de ce bourg paisible, traversé par le Gave de Pau, où vivront dix ans durant François et Louise Soubirous, et leurs quatre enfants, dont l’ainée, Bernadette ? Ce lieu, empreint de spiritualité et d’émotion, est le point de rencontre de femmes et d’hommes du monde entier venus ici pour se recueillir et prier.
En 1854, un tragique accident bouleverse le destin de la famille Soubirous : François perd un œil lors d’un accident du travail au moulin de Boly, la maison familiale, mais est aussi accusé de vol et est jeté en prison. C’est la faillite du moulin. La petite Bernadette, elle, sera d’une santé fragile toute sa vie à cause du choléra et de la tuberculose dont elle est atteinte. Contrainte de quitter le moulin, la famille Soubirous trouve refuge dans une ancienne prison, appelée le Cachot, en 1856.
A 14 ans, Bernadette, qui ne sait ni lire ni écrire va vivre une rencontre extraordinaire : ce 11 février 1858, elle part chercher du bois dans une grotte appelée Massabielle, accompagnée de sa sœur Toinette et de son amie Jeanne Abadie lorsqu’elle entend un bruit, comme un coup de vent. Et d’assister à la première apparition de la Vierge (il y en aura 17 autres). Dix ans plus tard, Bernadette quitte Lourdes pour Nevers où elle entre au Couvent Saint-Gildard. Elle y décèdera le 16 avril 1879.
Je quitte Toulouse ce samedi matin vers 9h00. 175 km d’autoroute me séparent de ma prochaine destination, Lourdes. Point de jonction des sept vallées du Lavedan, la ville se situe au sud-ouest du département des Hautes-Pyrénées, blottie dans un bassin de verdure et baignée par le Gave aux eaux claires. L’histoire de Lourdes fut étroitement liée à celle de son château-fort qui vit passer sous son enceinte Charlemagne, le Prince Noir et Du Guesclin. En 1858, cette place forte avait perdu de sa superbe et la petite ville ne comptait que 4000 habitants. Quant aux commerçants, ils fournissaient la subsistance aux détachements de troupe qui y tenaient garnison, la grande majorité de la population vivant alors de l’agriculture ou de l’exploitation des carrières de pierres et d’ardoises locales. Mon arrivée à Lourdes me donne une première bonne impression, celle d’une petite ville où il est facile de circuler et de se garer grâce aux nombreux parkings gratuits répartis ici et là.
Pourtant, Lourdes a bien changé depuis les apparitions de la Vierge puisque ce sont plus de cinq millions de pèlerins qui viennent ici chaque année, en simple visiteur des sanctuaires (ce qui sera mon cas), pour visiter de la famille ou par le biais d’un pèlerinage organisé. Ce qui me surprend immédiatement, ce sont les nombreuses conversations en langue étrangère dont je saisis quelques bribes, notamment dans l’hôtel où je suis descendu. Un groupe de pèlerins espagnols originaire de Valencia vient en effet de débarquer. Ambiance garantie ! Mon lieu de villégiature se trouve sur le boulevard de la Grotte, une artère que je me contenterai de descendre et qui me conduira en dix minutes de marche sur le pont franchissant le Gave, puis au Sanctuaire. Là, une immense esplanade s’ouvre à moi avec, au fond, la basilique Notre-Dame du Rosaire, au pied de laquelle est blottie la grotte de Massabielle.
Après m’être rendu au bureau d’information du sanctuaire, ma première visite me conduit à la grotte de Lourdes, celle-là même où la Vierge Marie apparut à plusieurs reprises à Bernadette Soubirous en 1858. La première apparition a lieu le 11 février, alors que Bernadette ramasse du bois avec deux autres fillettes, sa sœur Antoinette et son amie Jeanne : Bernadette entend alors comme un bruit de vent du côté de la grotte en face de laquelle elle se trouvait. Et d’apercevoir une dame vêtue de blanc. Apeurée, la petit fille se frotta les yeux mais la dame était toujours là et l’invita bientôt à s’approcher. Puis la Vierge disparut soudainement. Bernadette, doutant de la vision qu’elle avait eu, choisira d’abord de ne rien dire, avant de céder devant l’insistance de ses deux compagnonnes (qui, trahissant leur promesse de garder le secret, divulgueront largement la nouvelle de retour à la maison).
Malgré l’interdiction qui lui sera faite de retourner à la grotte de Massabielle, Bernadette, poussée par une force intérieure, obtient malgré tout la permission de sa mère et retourne sur place trois jours sur place, le 14 février. Sur son chemin, elle prend soin de remplir une petite bouteille d’eau bénite pour en jeter le contenu en cas de nouvelle apparition. Sur place, et alors que Bernadette venait de terminer la première dizaine du Rosaire, la Vierge réapparut et la petite fille l’aspergea d’eau bénite sous le regard amusé et souriant de la Dame vêtue de blanc qui ne tardera pas à disparaître à nouveau une fois le Rosaire terminé.
La troisième apparition, qui a lieu le 18 février 1858, voit la Dame parler pour la première fois. Ce jour-là, quelques personnes respectables accompagnent Bernadette laquelle a emporté une feuille de papier, une plume et de l’encre car elle a l’intention de demander à la Dame en blanc d’immortaliser ses propos sur papier. La Vierge, amusée par la requête de la fillette lui demandera si elle accepterait de revenir la voir quinze jours durant. Bernadette, qui acceptera l’invitation se verra alors promettre le bonheur dans l’autre monde. Et la Vision d’apparaitre régulièrement à la grotte, excepté un lundi et un vendredi.
La quatrième apparition, le 19 février 1858, sera plus brève qu’à l’accoutumée, ne durant qu’un quart d’heure, sans message et silencieuse. Bernadette entrera en extase après le troisième Ave Maria. Cette fois, la fillette a apporté avec elle un cierge béni, un cierge qu’elle conservera sur elle à chaque visite à la grotte, et jusqu’au jour de la 14ème apparition.
La cinquième apparition, le 20 février, a lieu devant une trentaine de personnes à l’issue d’un quart d’heure de prière. Le visage de la fillette sera marqué d’une grande tristesse ce jour-là. Le lendemain a lieu la sixième apparition , tôt ce dimanche matin et devant une une centaine de personnes, sans événement particulier.
Le lundi 22 février, jour de la septième apparItion, laisse Bernadette interrogative car la Vision n’apparait plus. La fillette se demande alors ce qu’elle a bien pu faire pour contrarier la Dame en blanc.
Le mardi 23 février, Bernadette qui a obtenu de ses parents l’autorisation de se rendre à la Grotte de Massabielle, est accompagnée par une centaine de personnes dont plusieurs notables de Lourdes. C’est lors de cette septième apparition qu’elle confiera avoir reçu un secret « rien que pour elle ». Un médecin, le Docteur Dozous, était aussi dans l’assistance ce jour-là, afin de démasquer « le coup monté » de Massabielle. En fait, cet homme d’abord incrédule finira par se convertir.
Le lendemain, 24 février, eut lieu la huitième apparition en présence de près de 300 personnes. Alors que Bernadette entre en extase, on lit de la tristesse sur son visage tandis que la Vierge appelle à la pénitence.
En ce 25 février 1858, et malgré la pluie et le froid, 300 personnes assistent à la neuvième apparition : Bernadette rapporte alors que la Dame en blanc lui demanda de boire à la fontaine. Et la fillette de se rendre au bord du Gave car il n’y avait pas d’autre point d’eau. La Vierge la reprit en lui désignant un endroit de la grotte d’où suintait une eau vaseuse. Bernadette creusa la terre et put finalement boire une eau claire jaillissant du sol. Le soir même, le Procureur impérial Dutour menace la fillette de la jeter en prison si elle poursuit ses visites à la grotte.
Pas d’apparition le vendredi 26 février, malgré la présence d’une foule de 600 personnes. Qu’à cela ne tienne, Bernadette récite son Rosaire tout en se demandant à nouveau ce qu’elle avait pu faire à la Dame pour qu’elle ne vienne pas. Le lendemain, la Vierge fit sa dixième apparition devant 800 personnes, puis devant plus de mille personnes (le 28 février pour sa onzième apparition), puis 1500 personnes (le 1er mars pour sa douzième apparition).
La treizième apparition (qui a lieu le 2 mars) permet à la Dame en blanc de délivrer un message aux prêtres : Bernadette, à qui la Vierge demandait qu’on érigea une chapelle près de la grotte, délivrera ce message au curé Peyramale, qui lui signifia que cette dame, dont on ne connaissait même pas le nom, se moquait d’elle. Et d’exiger aussi une preuve, comme le fleurissement du rosier de la grotte en plein hiver.
Au fur et à mesure des apparitions, la foule devient plus nombreuse et c’est devant plus de 3000 personnes que devra avoir lieu la quatorzième apparition le 3 mars 1858. En vain, cat la Vision n’aura pas lieu. La Dame vêtue de blanc n’invitera Bernadette à la rejoindre à la grotte qu’en fin de journée, après l’école. En réponse à la demande de la fillette (c’est à dire l’identité de la Dame), la Vierge adresse à Bernadette un sourire très doux.
Le 4 mars, ou jour de la quinzième apparition, devait être prometteur pour ces 8000 personnes qui s’étaient déplacées. Les badauds s’en allèrent déçus car rien d’extraordinaire n’eut lieu. Bernadette se rendit alors chez le curé, mais celui-ci, toujours aussi intransigeant, maintint ses conditions quant à la construction de la chapelle.
Vingt jours s’écouleront alors, pendant lesquels aucune apparition n’aura lieu. Bernadette reprend alors une vie normale tout en se remémorant l’expérience exceptionnelle qu’elle a vécue avec cette Dame dont elle ignore toujours le nom.
Arrive bientôt le 25 mars (jour de la seizième apparition), la date la plus importante de toute l’histoire de Lourdes, car c’est ce jour-là que la Vision révèle son nom. « Je suis l’Immaculée Conception » dit-elle à la fillette. Et Bernadette de se rendre sans tarder auprès du curé pour l’informer du nom de la Vision. Dès lors, le curé croira la fillette.
C’est le 7 avril qu’a lieu la dix-septième apparition, avec, comme témoin exceptionnel, le Docteur Dozous. Celui-ci assistera au « miracle du cierge » : alors qu’elle était en extase, Bernadette, qui tenait de sa main droite un gros cierge allumé fit l’objet d’un événement surnaturel, lorsque l’assistance fut témoin de l’enroulement de la flamme du cierge autour de la main gauche de la fillette, sans la brûler. Le Docteur Dozous observe l’évènement et se rend à l’évidence.
La dix-huitième apparition, elle, a lieu le 16 juillet 1858, jour de la fête de Notre-Dame de Mont-Carmel. Bernadette reçoit une invitation à se rendre à la grotte alors que l’accès habituel est barré d’une palissade. La fillette empruntera donc un autre chemin jusqu’à arriver face à la grotte, mais sur l’autre rive du Gave. La Vierge apparaît au début du Rosaire et fait ses adieux à Bernadette. La fillette déclarera ne jamais l’avoir vu aussi belle...
Face à l’Esplanade des Sanctuaires, se dresse la Basilique du Rosaire, avec son gigantesque dôme se situant à la hauteur de la crypte, chapelle édifiée sur le rocher même de la grotte. Cette chapelle forme le piédestal de la Basilique Supérieure qui dominent les sanctuaires (derrière la Basilique du Rosaire). Une autre basilique, souterraine celle-là, complète l’ensemble et porte le nom de Saint Pie X.
Au-dessous de la basilique du Rosaire se trouve la grotte miraculeuse, à droite de laquelle un sentier à lacets conduit aux quatorze stations d’un monumental Chemin de Croix. Plus loin, le long du Gave, se dressent les chapelles où brûlent les cierges, les fontaines et les piscines.
La célèbre grotte , portant aussi le nom de Grotte de Massabielle (« vieille roche » en Bigourdan) fut l’endroit où la Vierge apparut à Bernadette à de multiples reprises. L’intérieur est formé de trois ouvertures communicantes mais c’est dans la niche ovale supérieure à droite que la Dame vêtue de blanc fera ses apparitions. Une plaque, sur laquelle est écrit « Je suis l’Immaculée Conception » (en patois bigourdan), fut posée au pied de la statue de la Vierge (la statue fut posée le 4 mars 1864).
La chaleur des jours précédents m’a fatigué et j’ai perdu tout enthousiasme à l’idée d’explorer les curiosités touristiques de Lourdes. A l’intérieur du sanctuaire, un gardien m’informe qu’en suivant le ruban bleu fixé au sol, je marcherai dans les pas de Bernadette et verrai ainsi les différents endroits qu’elle fréquentait. Je trouve l’idée séduisante et quitte le sanctuaire par où je suis entré, c’est à dire la Porte Saint-Michel, qui se trouve dans le prolongement du pont franchissant le Gave (au bout du boulevard de la Grotte).
Outre l’aspect mercantile de certaines rues (avec de nombreuses boutiques vendant des articles religieux), je reconnais que la ville est agréable à visiter même si beaucoup d’endroits sont fermés à l’heure de midi pour ne rouvrir qu’à 14h00. Ce sera le cas de la maison paternelle de Bernadette (en photo ci-dessous). Son véritable nom est d’ailleurs « moulin Lacadé », du nom d’un ancien maire de Lourdes, à l’époque des apparitions.
Dernier lieu incontournable dans la ville, le château-fort de Lourdes, accroché à un pic rocheux, qui domine à l’ouest la vallée du Gave et les sanctuaires, et à l’Est, la Ville Haute. Là encore, entre midi et 14h00, point de salut pour les visiteurs qui trouvent porte close mais il est intéressant de savoir qu’un panorama grandiose donnant sur la vallée et les montagnes environnantes s’offre aux visiteurs depuis le haut du donjon. C’est que cette forteresse joua un rôle de premier plan en tant que poste militaire, en affrontant plusieurs sièges. Il deviendra prison d’Etat à la fin du 17ème siècle et abrite désormais le musée Pyrénéen.
INFOS PRATIQUES :
- Sanctuaires Notre-Dame de Lourdes, 1 Avenue Monseigneur Théas, à Lourdes (65). https://www.lourdes-france.org
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Centre d’information des sanctuaires ouvert tous les jours de 9h00 à 12h00 et de 13h30 à 17h30. Tél : 05 62 42 20 08
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Maison paternelle de Sainte Bernadette, Rue Bernadette à Lourdes (65). Ouverte d’avril à octobre de 9h30 à 12h15 et de 14h15 à 18h30.
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Château-Fort, 25 rue du Fort, à Lourdes (65). Tél : 05 62 42 37 37. Ouvert tous les jours de 10h00 à 13h00 et de 14h00 à 19h00.