Mardi 12 septembre 2017
Cela fait déjà 70 ans que la Maison Christian Dior existe et le Musée des Arts décoratifs de Paris a saisi l'occasion de célébrer cet événement en nous conviant à l'exposition « Christian Dior, couturier du rêve », jusqu'au 7 janvier 2018. Lors de ma visite sur place, j'ai pu découvrir l'univers du fondateur de la prestigieuse maison et celui des couturiers de renom qui lui succédèrent, comme Yves Saint-Laurent , Marc Bohan, Gianfranco Ferré, John Galliano, Raf Simons et Maria Grazia Chiuri. Et de ressentir une certaine émotion à la découverte de toutes ces histoires vécues, des inspirations, des créations et des filiations qui relient cette sélection de plus de 300 robes de haute couture conçues de 1947 à nos jours. Des centaines de documents (illustrations, manuscrits, croquis, photographies de reportage...) et d'objets de mode (chapeaux, bijoux, sacs, chaussures, flacons de parfums...) viennent par ailleurs éclairer de manière exhaustive notre lanterne tout au long d'un parcours qui se révèle passionnant.
Christian Dior était tout à la fois un amoureux des musées et un homme de l'art, et ces 70 années de création dialoguent avec tableaux, meubles et objets d'art, autant d'oeuvres en forme de clin d'oeil, soulignant le regard du grand couturier sur les liens qu'il sut tisser entre la couture et toutes les formes d'art.
Le musée avait déjà organisé une précédente rétrospective consacrée au même couturier en 1987, exposition alors centrée sur les dix années de création de Christian Dior, de 1947 à 1957. Cette fois, les 3000 m2 d'exposition nous invitent à découvrir comment le couturier et les six directeurs artistiques qui lui ont succédé ont conçu, puis construit le rayonnement d'un nom synonyme de haute couture en France et dans le reste du monde. Notre homme fut en effet le personnage-clé de la mode du XX ème siècle depuis sa collection « New Look » du printemps-été 1947, en modifiant profondément l'image de la femme, à travers des robes exprimant une féminité moderne, celle d'une femme-fleur, autant de vêtements qui dessinaient un corps aux courbes sinueuses, des épaules douces, une poitrine précisée, et une taille marquée par des hanches magnifiées par l'envolée des jupes corolles. Au sortir de la guerre, Christian Dior contribuera ainsi au redémarrage de l'industrie textile nationale en employant de grands métrages d'étoffe. Il remettra également sur le devant de la scène les brodeurs et les paruriers. Pour sa première collection haute couture, Christian Dior dévoilera en effet une redéfinition radicale de cette image de la femme trop masculine d'après-guerre. D'où le terme New Look attaché à cet événement dont deux silhouettes dominantes ressortiront d'emblée: Corolle et En 8. La première robe se compose de jupes amples en forme de corolle, tandis que l'autre sera constituée de jupes étroites en forme de tige de fleur. Les deux œuvres offrent des bustes épanouis et des tailles fines. D'entrée, un rappel de la vie de l'illustre couturier m'est proposé. On y parle de son enfance à Granville (où j'avais, en 2011, consacré un précédent article sur Christian Dior : https://www.leglobeflyer.com/consulter-reportage.php?id=226&pays=), de ses années folles de découverte de l'avant-garde de l'art et des spectacles parisiens, de son apprentissage du dessin de mode et de son entrée dans la haute couture. C'est qu'avant de se diriger vers la mode, Monsieur Dior avait été directeur de galerie de tableaux avec ses amis Jacques Bonjean et Pierre Colle, de 1928 à 1934. Cette activité est évoquée dans cette exposition à travers des tableaux, des sculptures et des documents où des noms d'artistes prometteurs figuraient déjà : Giacometti, Sali, Calder, Leonor Fini, Max Jacob, Jean Cocteau, Christian Bérard... Amateur d'arts et d'antiquités, mais aussi collectionneur d'Art nouveau, il puisera dans toutes ces sources pour agrémenter ses résidences privées et pour définir l'esthétique de sa maison de couture et de ses créations.
Je découvrirai ainsi tour à tour ces thématiques créatives : art et photographie, profusion des couleurs et des textures, élégance stricte parisienne, référence au décor néo-classique, trésors de l'exotisme ou fascination pour l'art floral. La mise en scène de ces thèmes est réalisée à travers diverses ambiances évoquant une galerie d'art, un atelier, une rue, un boudoir, les voyages, ou un jardin merveilleux. Et tout au long du parcours, d'admirer tableaux, sculptures et objets d'art, autant de témoignages d'inspiration de Christian Dior. Ma visite se poursuit ensuite dans la nef, et me conduit à un parcours chronologique de 1947 à 2007. On y aborde l'élan fondateur et l'héritage de l'esprit Dior à travers les décennies. J'y remarque le tailleur « Bar », un ensemble en noir et blanc concentrant la nouveauté de l'esthétique Dior, symbolisant le début des Trente glorieuses de la mode. Modèle phare du style New Look, ce tailleur fera référence au bar du Plaza Athénée, palace voisin de la maison Dior et passage obligé des élégantes. La générosité des proportions, l'architecture affirmée et l'allure dansante du New Look seront le symbole d'une époque de renouveau et de reconstruction. L'exposition montre aussi l'empreinte des différents directeurs techniques qui succéderont à Christian Dior, après sa disparition en 1957. Six galeries leur sont consacrées et permettent au visiteur de décrypter la propre création de chacun d'entre eux , toujours dans l'esprit Dior. On y découvre le choix risqué du jeune Saint-Laurent, l'esprit rationnel de Marc Bohan, l'arrivée flamboyante de Gianfrano Ferré, celle, fracassante de John Galliano, l'affirmation minimaliste de Raf Simons, et la vision engagée de la féminité de Maria Grazia Chiuri.
Lors de ma visite, je noterai la reconstitution d'un atelier avec des ouvrières à l'ouvrage, entourées de mannequins de couturières, de croquis et de toiles. Des savoir-faire et des techniques sans lesquels la haute couture ne saurait exister. Une galerie propose également un résumé de l'évolution de la ligne et de l'allure Dior depuis 1947, avec, comme illustrations, des robes, des extraits de films ou des vidéos de défilés.
Mon parcours s'achèvera dans ce cadre somptueux de la nef décorée comme une salle de bal pour une présentation des robes du soir les plus élégantes, dont certaines sont réunies pour la première fois à Paris. Certaines de ces robes ont été portées par des clientes célèbres, comme, par exemple la princesse Grace de Monaco, Lady Diana, Charlie Theron ou Jennifer Lawrence. Sur place, figure aussi une robe intitulée « Soirée brillante » qui défila en 1955 dans ce même musée des Arts décoratifs, du temps de Christian Dior. Il s'agissait à l'époque d'une exposition présentant les grands ébénistes français du XVIII ème siècle, et le grand couturier comptait au nombre des prêteurs. Et l'inauguration de cet événement de se transformer en un show à la fois culturel, mondain et élégant grâce à ses créations. Ce jour-là, des mannequins de la maison Dior déambulèrent en robes du soir, en prenant la pose parmi les meubles et les objets d'art. Une manière d'affirmer déjà à cette époque la place naturelle des ornements de la féminité au cœur des arts appliqués et le rôle prépondérant joué par Christian Dior dans l'histoire des arts décoratifs. Quant à l'exposition qui nous intéresse, elle présente dans la plupart des cas des œuvres issues du fonds Dior Héritage, le plus souvent jamais vues dans notre capitale. S'y ajoutent des prêts du musée des Arts décoratifs,, de l'Union française des Arts du costume, du Palais Galliera, de la fondation Pierre Bergé - Saint Laurent, du musée Christian Dior de Granville, et d'autres musées étrangers, sans oublier des prêts d'oeuvres d'art émanant des musées du Louvre, d'Orsay, de l'Orangerie, du Centre Pompidou et du Château de Versailles.
INFOS PRATIQUES :
- Exposition « Christian Dior, couturier du rêve », jusqu'au 7 janvier 2018, au Musée des Arts décoratifs, 107, rue de Rivoli à Paris (1er). Tél : 01 44 55 57 50. Métro : Palais-Royal, Tuileries, Pyramides. Ouvert du mardi au dimanche de 11h00 à 18h00. Nocturne de jeudi jusqu'à 21h00. Entrée : 11€. Site internet : http://www.lesartsdecoratifs.fr/francais/musees/musee-des-arts-decoratifs/actualites/expositions-en-cours/mode-et-textile/christian-dior-couturier-du-reve/
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Catalogue de l'exposition, 464 pages, 350 illustrations environ, ouvrage relié. 59€.
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Merci au service de presse du musée pour son aide