Samedi 27 janvier 2018

C'est tôt ce matin que je quitte Brisbane à bord d'un boeing 737 de la compagnie Qantas pour me rendre à Cairns. Mon camping-car m'attend en effet là-bas et cette ville sera donc le point de départ de mon séjour dans l'outback (arrière-pays) du Queensland. J'avais déjà traversé Cairns en 2007 lors d'un premier séjour sur la Gold Coast et avait remarqué que le paysage était vert. Normal, me répond t-on à la descente de l'avion, car c'est actuellement la saison des pluies et des averses sont toujours possibles même si celles-ci ne durent pas. J'en ferai l'expérience au cours des heures suivantes.

Fondée en 1876, la cité sera baptisée du nom du gouverneur du Queensland de l'époque, William Wellington Cairns. L'endroit servira d'abord de centre économique pour les chercheurs d'or de la rivière Hodgkinson, puis déclinera après la découverte d'une voie d'accès plus aisée de la région depuis Port Douglas. De nos jours, Cairns est devenue une ville touristique de premier ordre avec, entre autres, sa grande barrière de corail située à une heure et demie seulement de bateau, de nombreuses îles comme par exemple Green Island et bien sûr la forêt pluviale.

Je décide cette fois de parcourir l'esplanade, ce front de mer où les habitants, mais aussi les touristes, viennent se prélasser. Il existe une promenade que l'on peut se procurer à l'office du tourisme de Cairns, et qui décrit les quatorze principaux centres d'intérêt de l'endroit.

Ma balade débute sur le quai Trinity (Trinity Wharf), d'abord construit en bois. Nous sommes alors en 1906 et dix ans plus tard, d'importants travaux viendront renforcer ce quai grâce à l'utilisation de béton. Dès 1915, des navires plus gros pourront ainsi accoster sur place pour déverser leurs flots de touristes et de matières premières. Et le port de la ville de voir augmenter considérablement ses recettes au cours des années 1920 et 1930.

A deux pas de là, sur la Wharf Street, se dresse encore aujourd'hui la façade de l'édifice Jack & Newell (ci-dessous) : cet immeuble fut bâti en 1911 pour le compte de Feamley & Company. Quant à Jack et Newell, ils étaient de riches marchands du nord de l'Etat de Queensland exerçant leur talent à proximité de ce lieu. Tous deux feront l'acquisition de cette maison en 1939. Ils en resteront propriétaires jusque dans les années 1970. Depuis, un projet immobilier a pris place (en 2003) à cet endroit même où s'élève en retrait une tour construite par le groupe Hedley, mais l'édifice a été sauvegardé.

Quelques mètres plus loin, se trouve encore le Barrier Reef Hotel (ci-dessous) qui porta longtemps le nom d'Empire Hotel dès 1898. Il s'agit là d'un immeuble à deux niveaux bâti à l'origine pour des marchands de vins et spiritueux P.J Dayle, et qui fut érigé en 1926 à l'aide de béton armé, ce qui était novateur pour l'époque et très utile dans une région où sévissent les cyclones. L'endroit sera en partie réquisitionné par la Royal Air Force australienne durant la seconde Guerre mondiale, puis l'hôtel restera ensuite ouvert 24 heures sur 24 dans les années 1950, afin d'accueillir de nombreux ouvriers et employés travaillant sur le port et dans les plantations de canne à sucre environnantes. Curieusement, l'hôtel ne prendra son nom actuel qu'au cours des années 1960 afin de marquer sans doute l'importance croissante du tourisme local.

Je m'arrête ensuite au parc érigé à la mémoire des soldats de l'ANZAC (combattants australiens et néo-zélandais). A l'origine, ce lieu abritait le jardin de la résidence du sous-collecteur des douanes. Les arbres qui s'y trouvent furent plantés en octobre 1876 par Walter Hill, botaniste australien. Le jardin de la résidence offrait alors une magnifique rotonde qui était utilisée lors de cérémonies évènementielles. Une promenade dans ce parc permet d'admirer différentes sculptures en hommages aux soldats disparus lors de guerres successives. On aperçoit même une stèle en hommage au Dr Koch, arrivé à Cairns en 1882. Ce médecin oeuvrera pour combattre la malaria et d'autres fièvres, en mettant au point un traitement approprié contre ces maladies.

Juste en face, se trouve le parc Fogarty (en photo ci-dessous), baptisé du nom d'un homme d'affaires local et bienfaiteur, Sir Reginald Frances Graham Fogarty, ancien propriétaire de la North Queensland Brewery et membre du conseil municipal de Cairn et de la Chambre de commerce. Outre une scène ouverte aux artistes en tous genres, le parc est devenu un lieu de concerts sur l'esplanade depuis les travaux de réhabilitation effectués en 2003. Sur place se dresse encore une ancre de bateau (deuxième photo) qui fut repêchée non loin de là et qui symbolise le centenaire de la ville de Cairns en rendant hommage aux premiers navigateurs qui ont fréquenté la région. Cette ancre est placée près de l'endroit même où fut établi pour la première fois le port de Cairns le 6 octobre 1876.

Les anciens bureaux du comté abritent quant à eux l'office du tourisme de Cairns au N°51 de l'Esplanade. L'édifice fut construit en 1912 sur le site de la toute première école de la ville. En 1940, le comté de Cairns sera rebaptisé comté de Mulgrave, avant d'être définitivement intégré dans la ville de Cairns en 1995.

L'Esplanade offre en ce samedi après-midi un climat d'insouciance et un lieu de détente avec des fontaines réparties ici et là pour les plus grand plaisir des enfants qui se baignent dans les bassins aménagés à leur intention. Oeuvre sculpturale de choix, « The Herd » que l'on traduira par troupeau, est un ensemble de quelques blocs de pierre sculptés et posés à même le sol (ci-dessous). Les deux artistes à l'origine de ce travail se prénomment Hew Chee Fong et Loretta Noonan. Le premier est un sculpteur australien contemporain qui a marqué son passage par de nombreuses œuvres à travers le pays, notamment à Brisbane et à Adélaïde. La sculpture « The Herd » représente un troupeau émergeant de l'océan. Sculptées dans le granit, les oeuvres ressemblent à ces flaques de boue laissées sur le rivage à marée basse. Quand l'imagination est au pouvoir, il n'y a plus de limites...

Une autre stèle, celle qui rend hommage aux JO de 1956, se trouve aussi sur l'Esplanade (en photo ci-dessous). Le monument symbolise le départ de la flamme olympique depuis Cairns. De là, la flamme se rendra jusqu'à Melbourne. Ces Jeux Olympiques d'été se tinrent en effet cette année-là en Australie et furent les premiers du genre à se tenir en Océanie. Ces Jeux seront officiellement lancés à l'époque par le Duc d'Edimbourg, Commonwealth oblige. Et la torche olympique fièrement portée par Ron Clarke. Melbourne avait alors remporté les Jeux face à Buenos-Aires (Argentine), Mexico City, Montréal et six autres villes nord-américaines également en lice.

En poursuivant ma promenade sur l'Esplanade, j'aperçois bientôt le Cénotaphe de Cairns (ci-dessous), en mémoire aux soldats tombés lors de la première Guerre mondiale. Une plaque de marbre porte 142 noms gravés d'habitants de Cairns qui périrent lors de ce conflit, tandis qu'au sommet du mémorial se dresse la statue d'un terrassier et une horloge. A noter que ce cénotaphe rejoignit son site actuel en 1972. Au pied de ce mémorial, je remarque un canon mitrailleur (deuxième photo), canon réalisé par le département des transports ferroviaires de Woolwich (Angleterre) en 1887. Ce type de pièce d'artillerie fut largement utilisée par les Britanniques des années 1940 jusqu'aux années 1970.

Une autre curiosité de cette balade : le RSL building et son style art-déco. La Returned Services League est une association australienne venant en aide aux hommes et femmes qui servent ou ont servi dans les forces armées. Le site où se dresse l'édifice fut acheté en 1918 par George Mayers pour y construire à l'époque une maison de repos destinée aux anciens combattants. Un incendie détruira malheureusement la salle du club en 1963 et l'endroit sera restauré deux ans plus tard. Aujourd'hui, l'endroit est le QG de la ligue RSL.

On le voit de loin compte tenu de sa hauteur. Le mémorial Catalina (en photo ci-dessous) rend hommage aux 11è et 20è escadrons de la Royal Air Force avec, en son sommet, une réplique d'avion qui fut posée là en 1995, lors des célébrations du 50è anniversaire de la Seconde Guerre mondiale. Il est intéressant de lire le long texte (en anglais) figurant sur une plaque de cuivre située au pied du monument. On y apprend en effet le rôle primordial que jouèrent les escadrons de la RAAF afin de contrer la progression des forces japonaises dans le Pacifique. En janvier 1942, les deux escadrons australiens attaquèrent ainsi la principale base navale japonaise située dans les îles Carolines, avant de bombarder plus tard Tulagi, à partir de Cairns. Ne renonçant jamais, ces aviateurs prendront tous les risques afin de bombarder les positions ennemies, souvent de nuit.

Etrange nom pour un arbre que celui qui lui est donné. « La tonnelle des amoureux » est le nom attribué à un magnifique figuier (ci-dessous) autour duquel les enfants de Cairns avaient pris l'habitude de venir jouer durant les années 1950. Puis les amoureux vinrent s'y réfugier, du moins c'est ce qui se dit ici. Ce figuier sert désormais de refuge à de nombreux salariés qui y trouvent un peu d'ombre sur le soleil agressif du Queensland à l'heure de la pause déjeuner.

J'achève ce tour d'horizon en face de la maison Floriana (deuxième photo), édifice construit par Sam Zammit durant les années 1930. Cette famille est ici connue pour ses talents musicaux, mais aussi pour la salle de bal qui avait été aménagée au rez-de-chaussée de cette demeure lors de la seconde Guerre mondiale. Aujourd'hui, tourisme oblige, cette maison est devenue l'une des guest-houses les plus chics de la ville.

INFOS PRATIQUES :

• Conseil régional du tourisme : découvrez ici le Cairns Esplanade Heritage Walk http://www.cairns.qld.gov.au/region/facts/drives,-trails-and-walks

• Je vous suggère de vous garer dans Wharf Street. Il y a de nombreuses places et on peut payer son parcmètre en CB (4 AUD$ les 3 heures).

• Hew Chee Fong : http://www.hewcheefong.blogspot.com.au

• Des panneaux signalent la présence de crocodiles le long de la plage. Ces animaux pouvant provoquer de graves blessures, mieux vaut être prudents. Un habitant m'a affirmé n'en avoir jamais vu à cet endroit, mais un homme averti en vaut deux.