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Dax, une affaire de patrimoine
(Landes, France)
Heure locale

 

Samedi 5 décembre 2020

 

Partons aujourd'hui dans le Sud-Ouest, plus précisément dans le département des Landes (40), département créé en 1790 à partir d'une partie de la province de Guyenne et Gascogne (sous l'Ancien Régime) et aujourd'hui inclus dans l'ancienne région Aquitaine. L'endroit abrite la plus grande forêt de France, la forêt des Landes, qui couvre 67% de la surface totale de ce département. Outre Mont-de-Marsan, Préfecture des Landes, on trouve également Dax, ville d'art et d'histoire.

 

Ville d'eau par excellence, les origines de cette sous-préfecture remontent à l'époque gallo-romaine, du temps ou la ville était déjà courue pour ses sources thermales. D'abord baptisée «Les eaux des Tarbelles » (en référence aux Romains qui avait fait de cette cité la capitale du pagus du peuple celte aquitain des Tarbelli), la ville prendra le nom de Acqs, D'Acqs puis Dax. Réputée depuis la Haute Antiquité pour ses eaux chaudes bienfaisantes, Dax est aussi renommée pour sa tauromachie landaise et espagnole et pour son rugby.

Il y a donc rien d'étonnant à ce que cette ville soit devenue depuis 2019 la seule destination des Landes à avoir rejoint le réseau national des 199 territoires labellisés en France, soit 123 villes d'art et d'histoire et 76 Pays d'art de d'histoire. Ce label de Ville d'art et d'histoire, créé en 1985, est attribué par le Ministère de la Culture, à l'issue d'un long processus de candidature (qui dura cinq ans dans le cas de Dax) tenant compte des différents patrimoines de la cité : vestiges antiques, centre ancien, maisons basco-landaises, architecture Art déco, patrimoine thermal, cultuel et naturel...


 

La présence d'eaux thermales en bordure de l'Adour sera effectivement déterminante dans l'installation des premières populations locales. Les fondations de la célèbre Fontaine Chaude datent du 2è siècle, au même titre que les vestiges de la basilique romaine découverts dans le centre ancien. Ce site, aujourd'hui ouvert au public, rassemble une partie des collections archéologiques du musée municipal de Borda, comme par exemple « le Trésor des Halles » découvert en 1982. Plus tardivement, c'est à dire au 4è siècle, s'élèvera l'impressionnante muraille gallo-romaine dont une partie a été conservée et qui rappelle la position stratégique de Dax à cette époque.

Soulignons que le cœur de Dax a conservé son ancien tracé, celui d'une petite cité médiévale quadrillée de rues étroites, que les siècles suivants enrichiront d'hôtels particuliers dotés de portails monumentaux et de cours intérieures. Le 19è siècle et l'important essor du thermalisme contribuera également au renforcement patrimonial local avec ces magnifiques villas qui seront construites dans les faubourgs de la ville. La cathédrale néo-classique, érigée de 1662 à 1894, et classée monument historique fait aussi partie de ce patrimoine, tout comme d'ailleurs cette architecture rurale identifiable par les anciennes fermes landaises. Enfin, ne négligeons pas le style Art déco brillamment illustré par le Splendid Hotel et l'Atrium-Casino construits respectivement en 1928 et 1929. Ces deux édifices sont l 'œuvre de l'architecte André Granet qui adopta un plan en H et des façades scandées d'une multitude d'oriels (fenêtres en encorbellement). Le Splendid Hotel est à lui seul une merveille, avec son mur de lumière en verre fumé de diverses couleurs orné de formes géométriques répondant au luxe monumental du grand hall. Face au Splendid Hotel, se dresse l'Hôtel des Thermes, dessiné et réalisé par l'architecte Jean Nouvel dans les années 1990. Autre époque et autre style.

 

Dax possède également un patrimoine immatériel conséquent : les fêtes patronales landaises en font d'ailleurs partie dans la mesure ou plus de 250 communes s'activent chaque été pour célébrer la culture locale. Et la ville de Dax de s'habiller pour l'occasion de rouge et de blanc afin de fêter course landaise, musique et gastronomie cinq jours durant. Le reste de l'année, marchés, épiceries et restaurants promeuvent vin, magret, foie gras et madeleines dacquoises.

N'oublions pas le patrimoine naturel avec l'immense forêt de pins du nord du département des Landes qui ne saurait méconnaitre la diversité des paysages de la rivière Adour : réserve naturelle des carrières de Tercis, tourbières de Mées et barthes de l'Adour. La cité dacquoise, elle, abrite en son coeur le parc du Sarrat, à la fois jardin et monument historique mais aussi conservatoire botanique et lieu de transmission de patrimoine paysager.

 

Quid de la préservation du patrimoine ? Le label Ville et Pays d'art et d'histoire qui fut remis à la ville de Dax en 2019 couronne dix ans de restauration des grands monuments de la cité, parmi lesquels la Fontaine chaude, l'Atrium, les Arènes, la Cathédrale, les remparts, l'immeuble Biraben, l'ancien hôtel des Baignots et l'hôtel Splendid. Une restauration initiée aux côtés des habitants, grâce à des actions de sensibilisation comme par exemple la visite organisée du chantier du Splendid, travail de mémoire dans certains quartiers, journées du patrimoine, mise en valeur du patrimoine immatériel lors des Férias, Street Art...

Tout visiteur est invité à parcourir les endroits remarquables de cette ville qui deviendra très vite une cité importante grâce à ses eaux thermales : d'abord romaine, et après avoir essuyé les attaques barbares (du 5è au 10è siècle), Dax renaitra sous l'autorité des Ducs et Comtes de Gascogne avant de passer sous domination anglaise trois siècles durant, à la suite du mariage d'Aliénor d'Aquitaine et d'Henri Plantagenêt. Elle résistera ensuite aux guerres de Religion et aux troubles de la Fronde avant de s'acheminer vers plus de sérénité à partir de la fin du 17è siècle. Et l’arrivée du chemin de fer conjuguée à la construction des premiers établissements thermaux au 19è siècle de faire de la cité une station thermale de renom.

La promenade débute Place Roger Ducos, sur laquelle se dresse la Cathédrale Notre-Dame, de style classique « néo-grec » édifiée entre le milieu du 17è et la fin du 19è siècle. L'intérieur de l'édifice permet d'observer un porte ogivale dite des apôtres, vestige de l'ancienne cathédrale gothique (13è siècle). On trouve également sur place de beaux tableaux dont « Jésus et ses disciples » de Honthorst, école flamande du 17è siècle et « L'Adoration des Bergers » de Hans Von Aachen (fin 16è).

Rendons-nous maintenant Rue Saint Vincent où se dresse la statue d'un légionnaire romain et de son chien, à l'ombre d'oliviers centenaires. Cette statue témoigne d'une légende dacquoise solidement accrochée à la découverte des bienfaits des eaux chaudes locales, celle d'un légionnaire en garnison à Dax avec son chien. Le soldat partant en campagne, tout en sachant que son animal perclus de rhumatismes ne pourrait l'accompagner, décide de l'abandonner sur les bords de la rivière Adour. On prétend alors qu'à son retour, le légionnaire découvrit son chien revigoré par les bienfaits de la boue du cours d'eau, d'où la naissance du thermalisme. Au pied de cette œuvre de Jacques Lasserre, se trouvent trois mosaïques en granit réalisées par Danièle Justes, qui rappellent les trois statuettes en bronze du 1er siècle, découvertes lors de fouilles dans le centre-ville. Ces trois statuettes représentent Esculape, Mercure et un sanglier.

A une encablure de là, nous voici rue Cazade, au N°27 de laquelle s'élève l'hôtel Saint Martin-d'Agès, hôtel particulier du 17è siècle. A cet endroit se trouve la crypte archéologique (vestiges gallo-romains d'une ancienne basilique civile).

 

Au détour de la rue du Palais, on admirera la Fontaine Sévigné (17è siècle) installée devant l'hôtel Neurisse (abritant désormais la bibliothèque). Les remparts gallo-romains (enfin, ce qu'il en reste!) s'offrent à nous rue des Barnabites, Place des Salines et Parc Théodore Denis : édifiés au 4è siècle, ceux-ci forment une enceinte de quatre mètres d'épaisseur sur dix mètres de haut, et un périmètre de 1465 mètres, dont il ne reste aujourd'hui que 320 mètres après démolition de la muraille au milieu du 19è. C'est d'ailleurs durant ce siècle qu'une exploitation minière de sel (d'où le nom de Place des Salines) provoquera l'effondrement de l'ensemble. Dominant l'endroit, l'immeuble Biraben (dont la façade fur rénovée en 2013) sera édifié en 1909 par Albert Pomade.

Prochaine étape : Place de la course et esplanade de Gaulle. Le 19è siècle verra l'installation à cet endroit d'arènes en bois destinées à accueillir les spectacles taurins et ladite place offre aujourd'hui en son centre, une structure vitrée contenant l'un des cinq forages thermaux de la ville. Sur cette même place s'affiche la statue de l'écarteur, œuvre de Christian Maas, qui représente un écart (une figure de la course landaise, ce sport taurin traditionnel des Landes). On apprend à cette occasion que l'écart parfait sera réalisé au 20è siècle par l'écarteur face à « Fédérale », une des meilleures vaches landaises de l'époque.

D'autres arènes succéderont aux premières constructions en 1913. De style andalou, elles seront bâties au Parc Théodore Denis afin d'accueillir 8000 spectateurs venus assister aux traditionnelles courses landaises, aux corridas espagnoles qui ont lieu lors de la Feria du 15 août  et au festival Toros y Salsa de septembre. A ne pas manquer, la sculpture d'une tête de taureau surplombant la porte principale ainsi que la fresque murale installée à gauche de l'entrée principale à l'occasion du centenaire de l'édifice. Le parc a quant à lui été construit sur un ancien marécage au 19è siècle et porte le nom d'un ancien maire dacquois décédé en 1908. L'entrée Ouest arbore les armoiries de Dax avec sa devise « Regia Semper » (Toujours Royale).

 

En redescendant vers la Place Thiers, arrêtons-nous quelques instants pour admirer la statue de Jean-Charles de Borda, qui trône à cet endroit. Né à Dax en 1933, ce mathématicien et physicien est l'un des pères du système métrique. Egalement ingénieur maritime, il inventera aussi plusieurs instruments d'aide à la navigation.

Proche de là, la Place de la Fontaine Chaude accueille la Fontaine Chaude (ou source de la Nèhe), nom d'une déesse nordique des eaux. Ce monument, qui constitue le vrai symbole de cette station, fut construite au 19è siècle sur l'emplacement supposé des anciens thermes romains. Son débit journalier était alors de 2 400 000 litres d'eau à une température de 64°C, le précieux liquide surgissant d'une profondeur de 2000 mètres. Le bassin de la fontaine permet de distinguer la présence d'algues, lesquelles, mélangées avec le limon de l'Adour et l'eau thermale entrent dans la composition de la boue thermale de Dax. Un médicament naturel connu sous le nom de Péloïde et utilisé en rhumatologie.

Empruntons à présent le Cours de Verdun et admirons (au N°2) l'Hôtel Splendid, érigé sur les ruines d'un château. Ce fleuron architectural des années 1920 a été pensé et conçu par l'architecte André Granet et il suffit d'entrer dans le grand hall pour replonger immédiatement dans le style Art déco de l'époque (https://www.splendid-hotel-spa.com/le-splendid/visite-en-realite-virtuelle/). Des visites guidées de l'hôtel sont bien entendu disponibles (s'adresser à l'Office de Tourisme).

Les Thermes ne sont pas très loin, puisque dans le prolongement de l'hôtel Splendid. L'architecture de l'édifice tranche par contre avec son voisin, par le style résolument moderne (1992) réalisé par Jean Nouvel.


 

Cours Foch, se dresse l'Atrium, ensemble architectural Art déco bâti par André Granet, ancien casino et premier espace d'animation de ce type dans les Landes inauguré en 1928. L'intérieur renferme une salle de spectacle superbement décorée, une galerie d'exposition et un restaurant par lequel on accède à un patio offrant une vue sur l'ancien théâtre extérieur.

Place Saint-Vincent, se trouve l'église Saint-Vincent-de-Xaintes (qui peut être visitée du lundi au vendredi de 9h00 à 12h00 et de 15h00 à 18h00, le samedi de 10h00 à midi) : ce lieu de culte de style néo-roman, qui porte le nom du premier évêque de la ville ayant été martyrisé à cet endroit et qui date de 1893, est remarquable par le chrisme (symbole chrétien) se trouvant au-dessus de la porte d'entrée, vestige d'une église construite au 11è siècle. Le choeur permet quant à lui d'admirer une superbe mosaïque du 5è siècle.

Une promenade sur les berges de l'Adour s'impose en rejoignant ce cours d'eau long de 335 km par le Boulevard Carnot, jusqu'à atteindre l'Allée des Baignots, laquelle offre un point de vue privilégié sur ce fleuve qui prend sa source au pied du Tourmalet pour se jeter dans l'océan Atlantique au lieu-dit « La Barre » à Anglet. Cette promenade appelée Les Baignots est bordée de liquidambars et de marronniers et mène vers l'ancien hôpital des Baignots, rénové en 2013. Bâti entre 1888 et 1902, cet établissement thermal compta durant les années 1920, parmi les plus luxueux et les plus modernes de ce type en France. On s'attardera sur la belle marquise protégeant l'ancienne entrée de l'hôtel, avant de se rendre au parc des Baignots (à l'arrière du bâtiment) qui abrite un chêne-liège de 150 ans, des palmiers chinois, des cèdres et un saule pleureur de 80 ans. Non loin de là, arrêtons-nous au trou des pauvres (Pr. Paul Delmas Marsalet, au bas du Casino), endroit où les pauvres venaient jadis se baigner pour profiter des bienfaits de la boue chaude. Lors des crues du fleuve, et au moment du retrait des eaux, le limon se déposait en effet à cet endroit près des émergences d'eau chaude. Ce principe naturel est celui qui a toujours pérennisé le Péloïde de Dax.


Un jardin qui vaut le détour est celui de la Potinière (Avenue Eugène Milliès-Lacroix), avec sa fontaine en escalier, bordée par des plantes de milieu humide (primevères japonaises, iris, carex...) au contraire des plantes de terrains secs (Phlomis, fructicosa, agave, bambous...) qui ornent le reste du jardin. Nous reviendrons sur nos pas par ce même Boulevard Carnot, bordé lui aussi de magnifiques liquidambars, mais aussi de superbes villas dont la villa basco-landaise conçue par l'architecte Albert Pomade : celle-ci est reconnaissable à son toit formé pAr deux pans symétriques, ses colombages et ses volets de couleur identique.

Un peu à l'écart de la vieille ville, on visitera le Bois de Boulogne, un sous-bois bordé de chênes pédonculés que l'on atteint par la digue surplombant l'Adour . Là, se dresse une stèle en commémoration de quatre jeunes résistants dacquois fusillés par les Allemands en 1944. Quant à l'Allée du Bois de Boulogne, elle abrite la Maison de la Barthe, une ancienne ferme présentant une exposition permanente sur les Barthes (chasse, pêche, agriculture...) et ses espèces protégées. Autre lieu, le Parc du Sarrat et sa rue du Sel Gemme : à la fois parc botanique à la française et jardin paysager, ce site exceptionnel de plus de 700 arbres de 27 espèces différentes est incontournable. Enfin sur les bords de l'Adour (au pied du pont des Arènes) se niche l'étang de l'Estey, classé « Natura 2000 ». Cet endroit riche d'écosystèmes aquatiques, d'espèces remarquables et de zones de végétation particulières se trouve au cœur d'une zone naturelle de treize hectares.

 

 

Vous l'avez compris, Dax est une ville d'exception en matière de patrimoine et vous aurez certainement envie d'en apprendre davantage sur l'histoire de la ville. L'office de tourisme dacquois propose à ce titre des visites guidées (https://www.dax-tourisme.com/fr/que-voir-que-faire/visite-guidee-excursions), mais il existe également la possibilité de faire appel à un guide indépendant pour découvrir Dax et ses secrets cachés. Enfant du pays, Kevin Laussu est un amoureux du patrimoine, ce qui l'a conduit à entamer des recherches sur les œuvres réalisées par l'architecte dacquois Albert Pomade en Nouvelle-Aquitaine. Et de vous faire découvrir, grâce à son œil d'historien de l'art, les secrets de l'architecture basque et landaise, à travers visites savantes et érudites, visites généralistes, visites particulières ou promenades architecturales (voir infos pratiques). Au terme de la visite, il vous sera même possible de prolonger celle-ci par la lecture des deux ouvrages écrits par Kevin : « Dax Architecture de la Belle Epoque » (Tome 1) paru en mai 2020, ouvrage qui sera suivi par le tome 2 dont la sortie est prévue pour le 15 avril 2021. Avis aux curieux du patrimoine !

 

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