Lundi 21 février 2022
Domaine skiable de renommée internationale et une des plus grandes stations de ski de France, Serre Chevalier (05) célèbre cette année le 80ème anniversaire du téléphérique de la station, l'un des plus longs d'Europe, qui fut inauguré le 21 décembre 1941, en temps de guerre. Cet hiver est le moment opportun pour visiter Serre Chevalier dont l'histoire évolue entre tradition, audace et innovation.
C'est bien connu, les Alpes sont accueillantes et offrent toutes les conditions requises pour pratiquer les sports de neige. Située dans le Briançonnais, Serre Chevalier (aussi appelée Serre Che) est nichée dans la vallée de la Guisane, dans les Hautes-Alpes, tout près du parc national des Ecrins. C'est précisément en 1941 que cette station vit le jour avec la construction d'un téléphérique depuis Chantemerle vers le sommet de Serre-Chevalier (2483 mètres). Plus grande station de sports d'hiver des Alpes du Sud, davantage par l'importance du kilométrage de piste (81 pistes sur 250 km dont 80% se trouvent à plus de 2000 mètres d'altitude) que par son nombre de visiteurs, son domaine skiable s'étend sur plusieurs communes : Briançon, Puy-Saint-Pierre, Puy-Saint-André, Saint-Chaffrey, La-Salle-les-Alpes, Monêtier-les-Bains et Pelvoux. Ce sont au total 410 hectares de pistes balisées et entretenues entre 1300 et 2800 mètres sur un domaine skiable de 3910 hectares.De son côté, Briançon promeut également les énergies renouvelables et le développement durable tout en cultivant ses atouts culturels (ses fortifications sont classées au Patrimoine Mondial de l'UNESCO) et ses eaux naturellement chaudes.
Si le téléphérique fête ses 80 ans, le ski est pratiqué dans le Briançonnais depuis 120 ans, ce qui fait de Serre-Chevalier l'une des stations pionnières du monde en la matière. 1874 marque l'apparition du ski dans la région, avec la création de la section des Hautes-Alpes du Club Alpin français dont la devise sera « pour la patrie, par la montagne ». En 1901, le Capitaine Clerc, commandant de la 7ème compagnie du 159ème Régiment d'Infanterie Alpine, obtient l'autorisation d'initier quelques soldats au ski durant l'hiver. En 1904, le Capitaine Rivas de cette même compagnie ouvre l'Ecole Normale du Ski à Briançon. Et de créer aussi une fabrique de skis qui permet aux militaires ainsi qu'à la population locale de s'équiper à moindre frais, en mettant au point une forme à ski économique, dite « la Briançonnaise » fabriquée avec les bois locaux. Une bille de mélèze brute de 20 cm de diamètre pour 2m30 de longueur, creusée en reproduisant les courbures du ski, et à l'intérieur de laquelle on cale une planche de frêne, de hêtre, pin cembo ou mélèze, taillées puis séchées dans un four de boulanger, retaillés, polis puis vernis. Ce nouveau moyen de locomotion hivernal permet les sorties en reconnaissance des cols et sommets jusqu'alors infranchissables tels que l'Izoard ou les Ecrins. Les Officiers rédigent bientôt des « Guides de secteurs » détaillés. L'engouement est général puisque les briançonnais rentrent massivement à l'Ecole du ski du 159 RIA » pour y remplir leurs obligations militaires avant de retourner dans leurs villages et de devenir moniteurs ou fabricants de ski. Deux ans plus tard, le Capitaine Rivas écrit « Le Petit Manuel du Skieur », un outil destiné à former les skieurs militaires en les habituant dès l'enfance à la pratique du ski, tout en répandant dans les populations montagneuses le goût d'un sport susceptible de rendre de réels services, comme, par exemple, faciliter les communications entre les villages.
Le premier concours international de ski en France voit le jour en février 1907 à Montgenèvre, avec plus de 1500 participants amateurs et professionnels venus de France, de Suisse, de Norvège ou d'Italie. Le ski motive et attire, mais il faudra attendre 1925 pour que le député Maurice Petsche mette tout en œuvre afin de faire admettre que le tourisme peut être le complément indispensable aux maigres ressources économiques des Hautes-Alpes. De nombreux commerçants enthousiastes participent alors au développement régional avec la création d'hôtels, de refuges et de boutiques pour accueillir les premiers touristes et célébrités (à l'image de Jean Cocteau, Jean Gabin, Colette ou Paul-Emile Victor) venant s'essayer à ce nouveau sport de glisse. L'impulsion d'André Georges , un des représentants du Club Alpin français, sera déterminante dans le développement du ski dans la vallée de Guisane d'autant plus que le massif de Serre-Chevalier possédait tous les atouts pour la pratique de ce sport. Et c'est naturellement qu'il fut envisagé d'y construire une remontée mécanique, car il n'existait pas dans les Hautes-Alpes de sommet qui pouvait se prêter à l'aménagement d'itinéraires de skieurs. Les travaux du téléphérique débuteront en 1938 sur la commune de Saint Chaffrey-Chantemerle, la vallée étant encore en zone libre (rappelons que l'armée allemande occupe une partie du pays). Deux tronçons sont prévus pour 4 km de montée : de ChanteMerle (1350 m) à Serre Ratier (1900 m) puis de Serre Ratier au Serre-Chevalier (2480 m), constituant ainsi l'une des plus longues lignes de téléphérique d'Europe pour l'époque. Huit pistes seront ensuite aménagées et balisées pour la descente à ski, pour les débutants comme pour les skieurs confirmés. Et le téléphérique d'être inauguré le 21 décembre 1941, une ouverture de bonne augure compte tenu du retentissement qu'aura cet événement dans la presse régionale et parisienne. Les trois années suivantes propulseront le Briançonnais au rang de région sportive avec une succession de concours de ski, de luge, de raquette, de bobsleigh, de patin à glace, de hockey sur glace et de saut. Serre-Chevalier accueillera d'ailleurs les Championnats de France de ski en 1942, 1943 et 1944. Après-guerre, en 1947, le domaine skiable poursuivra son développement avec la construction de remontées mécaniques sur les communes de La Salle les Alpes et du Monêtier les Bains (dès 1948). Villeneuve (Aravet) accueillera à son tour sa télécabine multicolore en 1957 avec plusieurs téléskis et de nouvelles pistes .
Les années 1980 seront aussi riches en évènements, et Serre Chevalier devient la station du « ski décontracté » en 1981. Il ne manquera plus que la jonction avec Monêtier les Bains pour donner naissance au « Grand Serre Che » avec 200 km de pistes. C'est chose faite en 1984. Trois ans plus tard, Serre Chevalier communique sur le slogan « Serre Chevalier la douce, Serre Che la dingue ! ». Briançon rejoindra le domaine en 1989, avec sa télécabine du Prorel qui conduit les skieurs du centre-ville au sommet.
La décennie suivante, le succès de Serre Chevalier ne se dément pas et la station accueille la Coupe de Monde de Ski Dames en 1991, 1996 et 1999. Quant à Luc Alphand (ci-dessous), il hissera haut les couleurs de la station en remportant la Coupe du Monde de Descente en 1995 et 1996. A la fin des années 1990, Serre Chevalier devient « la plus belle neige sous le soleil ». Elle prépare aussi l'avenir grâce à son club de sport qui se transforme en pépinière de champions, avec pas moins de 25 skieurs alpins sortis en équipe de France en moins de cinquante ans, dont certains sur le circuit mondial. Sans oublier les champions olympiques et paralympiques Pierre Vaultier (double champion olympique en snowboardcross) et Arthur Bauchet (quadruple médaillé paralympique en ski alpin), fiertés de Serre Chevalier.
Une fois le constat posé, place aux réjouissances ! Les célébrations du 80ème anniversaire du célèbre téléphérique ont lieu tout cet hiver et tout au long de l'ouverture du domaine skiable (jusqu'au 18 avril). Prochain événement : le Grand Prix de Serre Chevalier les 19 et 20 mars prochains et l'ISSS (International Society of Skying Safety Congress) de 27 mars au 2 avril. Dans l'intervalle, plusieurs nouveautés ouvrent leurs bras aux visiteurs :
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La tyrolienne géante : installée à Serre Chevalier, elle offre aux skieurs (et non-skieurs) un survol inédit des pistes, à 100 km/heure. Située entre le Grand Serre (2491 mètres) et le Grand Alpe (2193 mètres), cette descente intense d'une longueur d'1,1 km avec 300 mètres de dénivelé mêle sensations fortes et vue imprenable.
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Les becs sucrés ont désormais leur adresse, celle da la cabane au sucre où l'on confectionne des sucettes au miel local. Située à plus de 2000 mètres d'altitude, sur le secteur de Prorel, cette cabane 100% écologique et autonome, propose une expérience insolite inspirée des cabanes à sucre d'érable canadiennes, où des trappeurs accueillent les touristes pour déguster sur place des sucettes au miel ou des chamallows grillés au brasero sur la terrasse.
Dernier aspect de cette station de Serre Chevalier : son programme d'énergies renouvelables : 12 sites de production photovoltaïque devraient être renforcés avec deux nouvelles installations. Par ailleurs, deux petites éoliennes de 10 kW sont fonctionnelles au col du Prorel et permettent de tester cette énergie en altitude. Côté hydroélectricité, une première turbine est en cours d'installation, turbine dont la mise en production est prévue pour ce printemps 2022. Une seconde turbine, située sur le torrent du Bez à La Salle les Alpes, devrait être construite cette année pour une mise en service au printemps 2023. Production annuelle attendue : 3 000 000 kWh par an, soit 20,7% de la consommation annuelle du domaine skiable. L'objectif de réduire de moitié l'empreinte carbone d'ici à 2030 est bien engagé. Mieux ! Serre Chevalier Vallée Domaine skiable reste la première station de ski à produire sa propre électricité.
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