Jeudi 15 septembre 2011
A l'heure où , à Paris et dans les provinces françaises, on réinvestit dans le développement du tramway, les Tokyoites, eux ont conservé quelques lignes. Ainsi, la Toden Arakawa Line propose t-elle à ses voyageurs de les transporter de Waseda à Minowabashi, une bonne occasion pour découvrir le nord de la capitale. Une promenade fort sympathique à laquelle je vous convie maintenant, au fil du tram , sur une distance de 12 kilomètres environ. Tokyo disposait autrefois d'un important réseau de tramway et la première ligne fut mise en service entre Shinbashin et Nihonbashi le 25 juin 1882. Il s'agissait à l'époque d'une traction hippomobile qui sera plus tard remplacée par une traction électrique ( cette nouvelle technique fut présentée durant la III ème exposition industrielle de 1890 qui se tenait au parc Ueno). Il est d'ailleurs intéressant de noter que le mot gare (éki, en japonais) signifie la station de chevaux, car on utilisait autrefois couramment ces animaux pour se déplacer. La première ligne de tramway électrique circulera ainsi dans Tokyo, entre Shinagawa et Shinbashi , dès le 22 août 1903. En 1906, trois sociétés se partageaient l'exploitation de 919 tramways, sur 144 kilomètres de voies ferrées. Ce moyen de transport restera en effet le principal mode de transport jusqu'à la mise en service du métro dans la capitale. La croissance du trafic automobile ainsi que la nouvelle politique de transports de l'agglomération tokyoite eurent raison du tramway dès les années 1960 et seules deux lignes survécurent: La ligne Minowabashi-Akabane et la ligne Arakawa-Waseda, qui fusionnèrent en 1974 pour donner la ligne actuelle.
De nos jours, la ligne Arakawa transporte environ 53000 voyageurs chaque jour, grâce à différents tramways qui sillonnent constamment la ligne.
Mieux qu'un simple trajet en tramway, je vous invite à découvrir différents lieux disponibles le long de la ligne Arakawa. Notre promenade débute ainsi à Waseda. Ce quartier accueille une université japonaise privée dont la devise est « l'indépendance par l'éducation ». Sage maxime. Cette université fournit entre autre au gouvernement du pays sept premiers ministres de l'après-guerre parmi ses anciens étudiants. A l'origine, l'école fut fondée en 1882 par Shigenobu Okuma, un jeune homme de bonne famille, destiné au départ à devenir samouraï. L'école , très marquée par l'esprit d'indépendance de son créateur devint université à part entière en 1902. Elle accueille désormais quelques 5600 étudiants. Deux musées sont à découvrir: Le Musée du théâtre Tsubouchi, dédié aux différentes formes théâtrales, est situé sur le campus principal. Je ne me rendrai pas cette fois à ce musée mais je ne manquerai pas de vous en reparler lors d'un prochain reportage. Le musée Aizu, lui, est consacré aux arts orientaux. On y retrouve plusieurs collections, parmi lesquelles des pièces chinoises (dont 395 pièces d'art funéraire chinois) , 208 miroirs dont la plupart datent de l'époque des Royaumes des Combattants, et des tuiles des périodes Qin et Han. Les collections d'art japonais comprennent calligraphies, pièces d'art moderne, pièces archéologiques et artefacts aïnous.
J'embarque à bord du tram, au départ de Waseda. Je me suis muni d'un ticket journée pour me permettre de descendre là où je veux et quand je veux. Ma première halte aura lieu à la station Kishibojimmae. Non loin de cette station se trouve le temple de Kishibojin (photo ci-dessous), consacré à Hariti, la déesse protectrice des enfants et des accouchements difficiles. Il faut tout de même préciser qu'à l'origine, Hariti était une déesse cannibale, qui dévorait les petits enfants. Avec l'arrivée du bouddhisme, les mères endeuillées vont se mettre à prier le Bouddha Sakyamuni. Celui-ci enlèvera l'un des plus jeunes fils d'Hariti. Affolée, la déesse cherche son enfant dans tout l'univers. Sakyamuni lui demande de se mettre à la place de toutes ces mères dont elle a dévoré les progénitures. Hariti promet alors de protéger désormais tous les enfants, se repent et se convertit au bouddhisme. CE temple se trouve dans la zone de Zochigaya, un quartier de Tokyo très agréable, calme et verdoyant. Non loin de là, se trouve également le temple Otori.
De l'autre côté de la ligne de tram, et dans le même quartier se trouve le cimetière de Zochigaya, un cimetière public qui accueille les sépultures de gens célèbres comme Natsume Soseki, Lafcadio Hearn, Takehisa Yumeji ou encore Nakahama Manjiro. Il fut fondé en 1874.
Je remonte dans le tramway pour m'arrêter à la station Mukohara. A quinze minutes de là, j'ai lu qu'un musée de la monnaie offrait de découvrir l'histoire des piécettes de la devise japonaise. J'ai d'abord éprouvé des difficultés pour trouver l'endroit et j'ai du demander mon chemin à plusieurs personnes (voir infos pratiques). Sur place, on explique l'histoire et l'origine de la monnaie japonaise, son organisation puis sa production (d'anciennes machines sont exposées). Quatre mille pièces sont exposées dans des vitrines dont des piécettes japonaises (depuis l'ère Meiji )mais aussi des pièces étrangères et des objets d'art en métal. Je découvre également des médailles d'honneur et enfin un coffre, le Senryo Bako, qui pouvait contenir jusqu'à mille pièces « Koban » de la période Edo (photo ).
Je ne quitte pas ma ligne de tramway car c'est le fil conducteur de ma visite. Me voici parti pour SugamoShinden. Je descends à cette station avec la promesse de découvrir le fameux quartier de Sugamo, mais aussi la rue commerçante Jizo Dori et sa fameuse boutique affriolante Maruji. Le quartier de Sugamo Togenuki Jizo n'est pas inconnu des passants à qui je demande mon chemin. C'est, dit-on , désormais, le quartier des grand-mères. Il fait partie des vieux quartiers de la capitale, autrefois quartier industriel. On y trouve quelques temples, dont celui de Koganji (photo ci-dessous) si bien qu'on a surnommé cet endroit le quartier des nannies car on y croise beaucoup de personnes âgées. Un moine y distribue d'ailleurs ses bénédictions à la chaîne contre quelques piécettes. Le temple Koganji est un temple bouddhiste. Il fut créé en 1596 dans la banlieue de Tokyo , avant de rejoindre son emplacement actuel en 1891. L'endroit est surtout célèbre pour sa statue de bouddha (appelée aussi Jizo). L'image du bouddha aurait un pouvoir curatif, dont les longues queues de personnes qui attendent de pouvoir croiser le regard de la statue. La rue Jizo-dori s'étend sur environ 800 mètres, offrant près de 200 boutiques en tous genres. Je m'arrête devant une boutique qui confectionne des pâtisseries locales (photo) , j'en goûte une, reste perplexe car ce n'est pas mauvais, mais …...si différent de nos pâtisseries françaises! La spécialité de Sugamo, c'est le « shio-daifuku », un petit gâteau en forme de boule de riz avec, en son centre, un cœur de pâte de haricot rouge. C'est l'effet glouk! Un peu plus loin, je m'arrête chez Maruji, un magasin de sous-vêtements (entre autre). Ici, on vend la fameuse culotte féminine de couleur rouge. Je la repère assez vite et la prend en photo juste avant qu'une vendeuse me fasse remarquer que les photos sont interdites dans le magasin. Ouf, c'est fait, j'ai mis la culotte (photo ci-dessous) en boite, la fameuse culotte rouge dont on prétend qu'elle porte bonheur. Les personnes âgées en raffolent ( question de libido tardive?). Les dates en « quatre » (les 4, 14 et 24 du mois) sont considérées comme providentielles , et l'animation du quartier de Sugamo est alors à son comble. Ainsi , les 24 janvier, 24 mai et 24 septembre sont des dates festives à ne pas manquer si vous passez par là.
Je choisis de poursuivre ma promenade au-delà de Jizo-dori et de la gare JR de Sugamo. A 2 kilomètres à pied, se trouve le jardin japonais de Riku-gyen (photo) qui fera l'objet d'un reportage ultérieur. Cet endroit est à la fois relaxant , reposant et rafraîchissant par les fortes chaleurs qui règnent actuellement à Tokyo. Ce jardin a été créé sur l'inspiration Waka (poème court traditionnel japonais) et est un héritage de la période Edo. A découvrir!
Petite halte à la station Oji ekimae : Un sanctuaire nous attend, il s'agit du Oji Inari shrine. Remontant à la période Heian, ce lieu possède un sanctuaire construit en bois , avec un magnifique plafond peint, et un jardin superbe derrière le bâtiment. Autrefois, ce sanctuaire était le plus important de la région du Kanto à l'époque Edo et est toujours dédié de nos jours à Inari, la déesse de la culture du riz, avec pour symbole les statues de renards habillées. Chaque année, au début du printemps, on y vient nombreux pour prier et demander de bonnes récoltes.
A la station Oji ekimae, je me rends au parc Asukayama. C'est le 8 ème Shogun de Tokugawa ,Yoshimune, qui planta des cerisiers à cet endroit et ouvrit le parc au public , devenant ainsi le premier jardin public au Japon. On a trouvé sur les lieux des restes d'un village ancien insi que des trésors archéologiques des périodes Jomon et Yayoi. Le parc n'a rien d'extraordinaire par ailleurs si ce n'est la présence de trains anciens juste en face du Paper Museum (photo ci-dessous) où l'on explique l'introduction du papier dans le pays et l'invention du papier washi. Le quartier de Kita-ku, où se trouve ce musée, fut l'endroit où apparut le papier pour la première fois au Japon. La Shoshi Paper factory ouvrit d'abord ses portes en 1873, puis le Musée du Papier fut inauguré en 1950, d'abord dans un ancien local de fabrication de papier, puis rejoignit le bâtiment actuel dès 1998. On y trouve 50000 objets ayant une relation avec le papier. Non loin de là, se trouvent également deux autres curiosités: le Musée d'Asukayama ( histoire du quartier de Kita-ku) et le Shibusawa Memorial Museum ( documents et objets de Shibusawa Eiichi, homme d'affaires et financier japonais, qui joua un rôle important dans le développement économique de son pays).
Je m'étais promis de passer à la boutique Akemi Seika, haut-lieu de la pâtisserie japonaise. Je descends du tramway à la station Kajiwara et je ne suis pas déçu: La façade laisse entrevoir une vitrine prometteuse derrière laquelle s'affairent plusieurs employés. On y trouve une trentaine de gâteaux différents, de quoi faire des heureux. Je ne résiste pas au plaisir d'en rapporter quelques-uns dans ma demeure tokyoite. Et la patronne, généreuse, de m'en offrir deux autres! Un gâteau, le Monaka, est enfermé dans une petite boite en carton, reproduction fidèle d'un tramway. Quelle bonne idée de souvenir! Je me présente en tant que Globeflyer, remets ma carte de visite et suis merveilleusement accueilli.
Je termine ma promenade en m'arrêtant au parc d'attractions d'Arakawa (station Arakawa Yuen chi mae). Cet après-midi, l'entrée est gratuite (chic!) mais je pense que cela s'explique par l'entretien des lieux ( aucun manège ne fonctionne). C'est le plus petit parc d'attraction de Tokyo, mais il a son charme: Sa grande roue (photo ci-dessous), son manège de chevaux de bois , mais aussi son bassin avec des carpes, et d'autres bassins où l'on peut tranquillement pêcher. Un petit zoo accueille singes, biches, poneys, oiseaux et même ….une vache. A droite en entrant dans le parc, allez visiter le musée du train:Vous y découvrirez des maquettes d'anciens tramways, et aussi une grande maquette paysagée rassemblant différents trains miniature que le responsable du parc , Monsieur Tanada, m'a gentiment mis en service. Les grands enfants que nous sommes risquent fort de craquer sur ce type d'attractions.
INFOS PRATIQUES:
-
Site de la ligne de tram Arakawa (en anglais): http://www.kotsu.metro.tokyo.jp/eng/services/streetcar.html
Ouverte de 6 h 00 à 23h00 chaque jour, fréquence de 5-6mn entre chaque tramway. Prix: 160 yens (adulte) , mais il est plus intéressant d'achter le ticket journée à 400 yens qui vous permet de descendre du tram autant de fois que vous voulez. Il vous suffit juste de présenter votre ticket lors de la montée. Les tickets sont disponibles à bord des tramways.
-
Université Waseda: Site officiel http://www.waseda.jp/top/index-e.html
-
Musée du théâtre Tsubouchi, bâtiments 5 et 6 du campus de l'université Waseda, 1-6-1 NishiwasedaShinjuku-ku,Tokyo. Tel: 03 5286 1829. Ouvert de 10h à 17h les lundi,mercredi,jeudi, samedi et dimanche. De 10h à 19h les mardi et vendredi. Entrée libre. Brochure en langue française.
-
Musée Aizu, Nishiwaseda 1-6-1, Shinjuku-ku,Tokyo, sur le campus de l'université. Tel: 03 5286 3835. Ouvert de 10h à 17h (vérifiez les jours d'ouverture avant de vous déplacer sur le site du musée: http://www.waseda.jp/aizu/index.html
-
Temple de Kishibojin, à dix minutes à pied de la station de tram Kishibojimmae. Ouvert de 9h00 à 23h00. Un souvenir à ramener: Un jouet en forme de petite chouette (susukimimizuku).
-
Cimetière de Zochigaya – site internet (en anglais):http://www.tokyo-park.or.jp/english/
-
Musée Mint (musée de la monnaie japonaise) , 4-42-1 Higashi Ikebukuro 4 Chome, Toshima,Tokyo. Tel: 03 3987 3521. Ouvert de 9h00 à 17h00. Entrée libre. Pour vous y rendre, lorsque vous arrivez par tram de Waseda, prendre à gauche à la sortie de la station (grande avenue), tournez à gauche au niveau de la station-service, puis marchez tout droit ( en laissant un terrain de jeu et une école sur votre gauche) jusqu'à arriver à un carrefour (avec un feu). Continuez tout droit sur une centaine de mètres et l'entrée du musée se trouve sur votre droite. Un jeton vous est remis une fois que vous avez rempli un formulaire avec Nom, heure d'arrivée....Le musée est situé au 2è étage du bâtiment. Brochure disponible en anglais. Photos permises uniquement dans certaines salles. Site internet: http://www.mint.go.jp/eng/plant/museum_tokyo.html
-
Le jardin de Rikugi-en, 6-16-3 Hon-komagome,Bunkyo-ku Tokyo. Tel: 03 3941 2222. Entrée: 300 yens. Ouvert de 9h à 17h00. Brochure en français. Site internet: http://www.tokyo-park.or.jp/english/park/detail_08.html#rikugien
-
Pâtisserie « AKEMI SEIKA » , 3-30-12 Honifune, Kita-ku, Tokyo. Tel: 03 3919 2354. Ouvert tous les jours ( sauf le lundi) de 10h00 à 19h30. A 2 minutes de la station de tramway: Kajiwara ( dans une rue commerçante).
-
Parc Asukayama, Tel: 03 3908 9275. Entrée libre.
-
Asukayama Museum, 1-1-3 Oji, Kita-ku, Tokyo. A 5 minutes de la gare JR d'Oji ( par la sortie sud). Tel: 03 3916 1133. Ouvert de 10h à 17h00 (fermé le lundi). Entrée: 300 yens.
-
Paper Museum, 1-1-3 Oji, Kita-ku,Tokyo. Tel: 03 3916 2320. Ouvert de 10h à 17h00 sauf le lundi. Entrée: 300 yens. Photos autorisées dans certaines salles. Site internet: http://www.papermuseum.jp/en/
-
Shibusawa Memorial Museum, 16-1 Nishigahara 2-Chome, Kita-ku,Tokyo. Tel: 03 3910 0005. Accès par la station Asukayama de la ligne de tram Arakawa. Ouvert de 10h à 17h (sauf lundi). Entrée: 300 yens. Accès libre au jardin de Shibusawa.
-
Arakawa Yuen Parc, station de tramway: Arakawa Yuen Chi mae. Ouvert de 9h00 à 17h00 ( 18h00 les dimanche et fêtes). Le parc est fermé le mardi. Entrée: 200 yens (adulte). D'autres tickets sont nécessaires pour les manèges, le bassin des pêcheurs, la nourriture au mini-zoo, les balades en poney. Passeport valable une journée: 1200 yens (adulte), entrée + attractions incluses). Tel: 03 3893 6003. Site internet (en japonais): http://www.city.arakawa.tokyo.jp/yuuen/