Dimanche 29 janvier 2012
Usuki est une petite cité d'environ 40 000 habitants située au bord de la mer et qui a pour symbole le kabosu. Ce petit arbre est un citronnier qui donne des citrons verts. Le jus du kabosu est couramment employé dans la cuisine japonaise en remplacement du vinaigre pour agrémenter certains plats comme le poisson grillé, le sashimi ou le pot-au-feu. On l'utilise aussi comme extrait naturel dans la préparation de gâteaux secs. A l'origine, le kabosu fut importé depuis la Chine dont il est originaire vers la période Edo. Sa production est concentrée dans la préfecture d'Oita et plus particulièrement dans deux villes: Taketa et Usuki. Usuki offre même une deuxième variéré de kabosu, le kabosu jaune qui est récolté pendant l'hiver dès le mois de novembre.
La ville d'Usuki est aussi le symbole du Sekibutsu, ces fameux bouddhas de pierre que je vous ai fait découvrir dans un autre reportage. Chaque année, de nombreux touristes se rendent à Usuki tout spécialement pour cette attraction. Saviez-vous qu'Usuki possède également sa fleur? Il s'agit de la sauge splendide, une espèce de plante herbacée vivace venue tout droit du Brésil et qui ressemble à notre sauge française. Mais la plus belle fleur de ma visite restera sans aucun doute cette vieille dame qui me servit gentiment de guide durant la visite des vieux quartiers (photo ci-dessous). C'est en montant dans l'autobus qui devait me conduire aux bouddhas de pierre que j'ai aperçu cette charmante habitante. Nous échangeâmes seulement quelques mots et chacun poursuivit son chemin. Au retour de ma visite du site archéologique, j'eus la surprise de retrouver cette même dame à bord de l'autobus qui me ramenait en ville. Lui ayant fait part de mon projet de visiter les anciens quartiers, elle me proposa aussitôt de m'accompagner et c'est ainsi que nous parcourûmes ensemble, cahin-caha, les rues d'Usuki. Jusqu'à découvrir sa passion pour les chats qu'elle vient souvent nourrir au parc du château.
La ville d'Usuki est située sur la côte et est bordée par les villes d'Oita, Saiki, Tsukumi et Bungo-Ono. A l'est, elle fait d'ailleurs face au canal de Bungo. La ville enserre une jolie baie , la Baie d'Usuki que l'on aperçoit facilement depuis les hauteurs du parc de l'ancien château, avec, au premier plan, le port de la cité (photo ci-dessous), avec au nord la péninsule de Saganoseki, et au sud, la péninsule Nagame. Au large, on peut observer deux îles, l'île Tsukumi et l'île Kuroshima. Les eaux de cette baie remontent ainsi la rivière Usuki qui est bordée d'une plaine. Un peu plus loin, au sud, Usuki est dominée par des chaines montagneuses dont l'altitude voisine entre 500 et 600 mètres au-dessus du niveau de la mer.
Fondée le 1er avril 1950, Usuki a une histoire qui remonte à l'époque où elle s'appelait Bungo. En 1600, Le Liefde, un navire marchand néerlandais dérive au large d'Usuki, dans la baie de Bungo. Son capitaine est anglais et se prénomme William Adams. L'équipage, mourant, sera emprisonné au château d'Osaka sur l'ordre de Ieyasu Tokugawa. William Adams connaitra ensuite une destinée peu commune puisqu'il deviendra le premier samouraï étranger. Ayant servi très jeune sur la Royal Navy sous les ordres de Francis Drake, William Adams est attiré par le commerce des Pays-Bas avec l'Inde, embarque pour un périple qui le conduira à terme au Japon. Les moines Jésuite portugais alors présents prétendent que le Liefde est un bateau pirate et qu'il faut détruire tout ce qui s'y trouve. Les connaissances des navires, des mathématiques nautiques et de la construction navale, acquises par William Adams lors de ses apprentissages durant sa jeunesse plaisent à Tokugawa qui épargnera Adams et ses hommes. Le shogun prend même William Adams en affection et le nomme bientôt diplomate, conseiller puis samouraï. Ce contact avec l'Occident sera déterminant pour le Japon puisque les armes saisies à bord du Liefde seront utilisées lors de la bataille de Sekigahara qui verra l'avènement de Ieyasu Tokugawa en tant que shogun.
Un autre personnage important dans l'histoire d'Usuki fut Otomo Yoshishige (nommé par la suite Otomo Sorin), qui fut le fils ainé de Yoshiaki, alors le XX ème maitre de la famille Otomo, en 1530. Après être devenu le 21è maitre, Otomo Sorin devint fort riche grâce au commerce maritime. Et étendit ses prises de territoire à toute l'île de Kyushu. Ainsi en 1560, devint-il le maitre des six provinces de l'île. En 1562, il déménagea à Usuki , se fit quelques temps plus tard baptiser par le missionnaire Cabral à Usuki même, et se fera appeler Don Francisco en 1578. Sa foi grandissante envers le christianisme le conduira à mener ses troupes au combat dans la région de Hyuga (préfecture de Miyazaki) où il sera défait. Dès lors, il perdra une grande partie de son pouvoir et mourra à Tsukumi en 1587.
Entre enfin en scène la famille Inaba, issue du clan Inaba, un groupe de samouraîs prédominants pendant les périodes de Sengoku et d'Edo. La famille Inaba qui s'installa sur le domaine d'Usuki en 1600 descendait de la branche principale de ce clan. Le fief des Inaba valait à l'époque 50 000 koku ( c'est à dire 9000 tonnes de rendement de riz à l'année) durant la période Edo. Le chef de la famille était alors Sadamichi, qui se rangera aux côtés de Tokugawa lors de la bataille de Sekigahara. Militaire glorieux lors de cette bataille, il sera récompensé à juste titre. Des documents conservés de nos jours à la bibliothèque municipale de la ville attestent qu'en novembre 1600, une troupe de vieux vassaux héréditaires entrèrent en éclaireurs à Usuki, et prit possession du château d'Usuki qui était alors entre les mains du Lord Nakagawa. Actuellement, il ne reste plus grand chose de ce château qui fut à l'origine construit par Otomo Sorin en 1562. En 1586, le château tomba aux mains de Shimazu Yoshihiro , un daimyo de Kagoshima , avant d'être secouru par Toyotomi Hideyoshi. Il n'en reste aujourd'hui que quelques remparts et bâtmients. Le château ayant été démantelé et son emplacement transformé en parc et jardins photos ci-dessous).
Je passe devant l'ancienne villa de la famille Inaba, une résidence de samouraï (photos ci-dessous). La villa actuelle fut érigée par des volontaires en 1902 et ses 3500 m² d'habitations et de jardins sont désormais ouverts au public.
La vieille ville d'Usuki offre, pour celui ou celle qui prend le temps de marcher, un certain nombre de rues historiques rassemblées dans le quartier historique de Nioza (photos ci-dessous). De jour comme de nuit, il se dégage de ces rues anciennes une atmosphère toute particulière et très mystérieuse. Ces rues offrent d'admirer des maison anciennes et de nombreux temples majestueux ( en particulier le temple Shinko qui peut être visité librement par les touristes). C'est dans ce quartier, qu'ayant entendu un air de flûte, je découvrais un concert impromptu organisé par des habitants de la cité. Ces derniers m'invitaient aussitôt à les rejoindre. Cela a donné quatre vidéos de morceaux de musique traditionnelle, accompagnés de danses japonaise. Je vous invite à les découvrir sur le site, dans la M2diathèque---> Vidéos.
Je ne manque pas de me rendre au Temple Ryugenji, avec sa superbe pagode à trois étages (photo ci-dessous). Cette pagode est aussi appelée « Pagode Taishi » car elle fut érigée en l'honneur de Shotoku-Taishi, en 1858. C'est l'une des deux dernières pagodes en bois qui existent encore de nos jours sur l'île de Kyushu. La pagode possède à chaque angle du toit, un petit diable sculpté qui semble porter tout le poids de la charpente sur ses épaules. Les quatre sculpture offrent des expressions différentes (Voir les autres photos de ce reportage dans la Médiathèque--> album Asie) . Le Prince Shotoku-Taishi , lui, fut un régent et un politicien de la Cour impériale du Japon mais aussi un des fils de l'Empereur Yomei. Il est surtout connu pour avoir développé le bouddhisme au pays du soleil levant. Pour l'anecdote, le Prince Shotoku-Taishi apparut en effigie sur le premier billet de 10 000 yens mis en circulation le 1er décembre 1958.
Je me promène un moment dans ce qui fut l'enceinte du château d'Usuki, accompagné de ma guide préférée. Je redescendrai seul vers la ville basse et passerai devant un petit sanctuaire dédié à la déesse Inari que nous avions déjà abordé lors de précédents reportages ( ci-dessous). Une allée couverte de dizaines de torii s'ouvre à moi (deuxième photo) et me conduit à un bâtiment à trois étages appelé Utonoguchi-mon-wakiyagura (troisième photo). Je me trouve alors dans la zone d'Utono Guchi, qui , sous la période Edo, servait de sortie de secours pour le Lord d'Usuki et sa famille. Le bâtiment, lui, il sera reconstruit plusieurs durant cette même période ( la construction actuelle remonte à 1854) et sera affecté à plusieurs usages tout au long de son histoire.
Les alentours d'Usuki ne manquent pas non plus d'attraits mais le temps me manque et il me faut rebrousser chemin. Non loin de là se trouve la vallée d'Hakubakei, située près de la source de la rivière Usuki. Sa beauté légendaire est due en partie aux magnifiques azalées qui y fleurissent au printemps et aux couleurs des arbres au moment du momiji ( automne japonais).
La source minérale de Rokkasado peut aussi un but de promenade.
Une ancienne résidence de samouraï, la maison de la famille Marumo mérite aussi d'être visitée d'autant plus qu'elle est ouverte au public.
Une autre curiosité des environs: Les grottes calcaires de Furen, découvertes en 1926 par une association de jeunes de Tomari. Deux ans plus tard, l'endroit était déclaré monument national. Profondes de 500 mètres, ces grottes permettent d'apprécier n calcaire d'une blancheur extraordinaire, ainsi que Kyoshuho, l'attraction des lieux, avec ses 10 mètres de haut et ses 16 mètres de circonférence. Un château, celui de Ryugu, d'une surface de 12500 m², se trouve à l'intérieur de ces caves.
Une pagode à neuf étages, construite en 1267, mérite aussi toute votre attention. Durant la période Kamakura, celle-ci était un édifice à multi étages et est depuis reconnue comme une construction solide en dépit de sa fragilité apparente et comme un monument d'importance à cause de sa beauté artistique.
Quatre vidéos de musique et de danse traditionnelles sont disponibles sur le site, section Médiathèque, Vidéos. Ne les manquez pas!
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