Jeudi 5 avril 2012
J'en avais entendu parler mais je ne m'y étais pas encore rendu. Yumi, mon professeur de japonais m'en a parlé hier car il y aura bientôt une fête sur place (voir infos pratiques). On y célèbrera le printemps comme dans beaucoup d'endroits au Japon. J'ai donc décidé de partir aujourd'hui à la découverte du...sanctuaire Yasukuni, situé à une dizaine de minutes de marche du métro Ichigaya. « Le sanctuaire du pays apaisé » est un sanctuaire shinto qui fut construit en 1869, sur la volonté de l'Empereur Meiji, pour rendre hommage aux Japonais qui donnèrent leur vie au nom de l'Empereur du Japon. Les petits Républicains que nous sommes sont bien incapables de comprendre cette dévotion envers un personnage au-dessus de tous, représentant de Dieu sur terre ( comme l'était notre roi de France jadis). Et pourtant, c'est pour ne pas oublier le sacrifice de ces deux millions d'âmes consentis entre 1868 et 1951, que ces soldats ont été déifiés dans ce sanctuaire. Considéré comme l'un des symboles du passé colonialiste du pays et des nationalistes, il est célèbrement connu pour les polémiques qu'il suscite, tant en Extrême-Orient qu'en Occident. En ce qui me concerne, j'ai rencontré une foule impressionnante de visiteurs, sans agressivité et très calmes.
Autrefois, ce sanctuaire s'appelait Tokyo Shokonsha. C'est à dire au tout début de sa construction dans le but d'honorer la mémoire des soldats disparus lors de la guerre civile de Boshin (conflit qui débuta en 1868 entre les armées et clans favorables à l'Empereur et le gouvernement shogunal d'Edo et les clans qui le soutenaient).Il s'y trouva d'abord seulement 3500 victimes de guerre. Puis d'autres morts (d'autres conflits internes) vinrent rejoindre ce lieu. C'est en 1879 que le sanctuaire prend le nom actuel de Yasukuni. Après la seconde guerre mondiale, il devint une association religieuse indépendante de l'Etat. Il ne faisait donc pas partie de l'association des sanctuaires shinto du pays. Le plus grand nombre de victimes honorées provient de la seconde guerre mondiale (2 150 000 personnes environ), puis la guerre russo-japonaise (environ 191000 victimes) , avec une majorité de militaires mais aussi des civils (dont 57000 femmes) et des enfants. Certains accusent ce sanctuaire de glorifier la guerre du Japon notamment par le biais du musée qui s'y trouve. L'ajout, en 1978 sur la liste des personnes déifiées, de plusieurs condamnés lors du procès de Tokyo en tant que martyrs de Showa, déplut fortement chez les alliés. On trouve aussi sur ces listes des personnages historiques comme Sakamoto Ryoma, Yoshida Shoin ou Tagasugi Shinsaku (informations sur ces personnages dans les infos pratiques) Les familles des personnes honorées dans ce sanctuaire n'ont aucun recours ( celui de refuser qu'on inscrive le nom de leur parent par exemple) car c'est le ministère de la Santé et le sanctuaire qui décident des personnes figurant sur la fameuse liste.
Je vous l'ai dit, le sanctuaire Yasukuni gère un musée , le musée Yushukan, qui offre de voir de nombreux objets historiques et des panneaux expliquant l'histoire militaire du Japon. Ce lieu fut créé en 1882 et rassembles 100 000 objets dont des peintures, des armes, flèches et œuvres d'art. Le nom du musée, Yushu, signifie apprendre des gens qui ont de grands principes. On y parle aussi des escadrons Tokkotai, ou encore escadrons de kamikazes (« vent divin »)qui se livrèrent à des missions suicides dans le Pacifique durant la seconde guerre mondiale. Les militaires concernés vouaient alors une admiration sans faille à l'Empereur Hirohito et récitaient un tanka (petit poème d'adieu) avant d'atteindre leur cible. Le mot kamikaze, aujourd'hui banalisé, date de l'invasion mongole de 1274 au cours de laquelle la flotte de Kubilai Khan aborda la baie de Hakata (Fukuoka) et attaqua les Japonais. Après une première journée de pertes pour les Japonais, un typhon se leva soudainement et dévasta une bonne partie de la flotte des envahisseurs qui durent battre en retraite. Les Japonais y ayant vu un signe de la providence appelèrent alors ce typhon « Kamikaze » (vent divin).
Le sanctuaire Yasukuni n'a plus été visité par l'Empereur du Japon depuis 1977 ( à, l'époque, le pays était sous le règne de l'Empereur Hirohito) et une visite d'un premier ministre à ce sanctuaire suscite immédiatement la polémique notamment en Chine et en Corée. Ceux qui l'ont fait affirment y être aller à titre personnel. 60% des Japonais approuvaient pourtant , en 2007, les visites du Premier ministre au sanctuaire Yasukuni. Et une association de parlementaires nippons soutient ce genre de visites.
En ce qui nous concerne, quoi de mieux qu'une visite des lieux en photos?
Le Honden constitue le sanctuaire principal, l'endroit où sont rassemblées les âmes défuntes. Le bâtiment fut restauré de 1986 à 1989.Il se trouve juste derrière le Haiden (bâtiment principal) mais n'était pas accessible lorsque je suis passé.
Le Reijibo Hoanden est l'endroit où reposent les divinités symboliques. Le bâtiment est situé derrière le sanctuaire principal, et fut construit en 1972. On y trouve les registres symboliques des âmes ( listes des noms des personnes défuntes honorées dans le sanctuaire Yasukuni, rédigées sur du papier japonais fait main).
Observons maintenant le Haiden, le Hall principal (ci-dessus). On remarque immédiatement son toit magnifique qui fut restauré en 1989. Une boite à offrandes en bois est située au centre, devant l'édifice. C'est là que les visiteurs déposent leurs contributions.
Motomiya est le sanctuaire d'origine. Il fut d'abord établi secrètement à Kyoto par des sympathisants des loyalistes du pouvoir impérial tués durant le bouleversement provoqué dans le pays par le révolution Meiji. Soixante dix ans plus tard, en 1931, il fut déplacé sur son lieu actuel et demeure le prototype en plus petit de ce qui devint ensuite le sanctuaire Yasukuni.
Chinreisha est le sanctuaire de l'esprit pacifique. Il fut érigé en 1965 afin de consoler les âmes de toutes les victimes de guerre.
Ci-dessus la porte sud du sanctuaire. IL existe aussi une porte principale (Shinmon, sur la deuxième photo). La porte principale fut achevée en 1934 et a été fabriquée en bois de cyprès. Chacune des portes arborent un chrysanthème d'un mètre et demi de diamètre (troisième photo). La restauration de la porte ( qui consista également au remplacement des tuiles du toit) s'acheva en 1994. Une seconde porte du sanctuaire (Daini Torii, sur la quatrième photo) fut construite en 1887. C'est la plus grande porte en bronze du Japon. Une troisième porte, Chumon Torii (cinquième photo), fut refaite en 2006 à l'aide de bois de cyprès venant de la Préfecture de Saitama. Ishi Torii (sixième photo) est une grande porte en pierre qui conduit à un parking. Enfin, une septième porte, Daiichi Torii (Grande porte ou première porte du sanctuaire)(dernière photo) figure comme la plus grande porte du pays. Elle fut construite en 1921, et décrite dans un poème comme « la grande porte qui semble fendre le ciel ». Sérieusement endommagée par les intempéries, elle fut démontée en 1943 et la porte actuelle fut installée en 1974 et mesure 25 mètres de haut.
Deux autres bâtiments figurent sur le plan que je me suis fait remettre par la boutique située en face du Haiden, d'abord le Saikan (endroit où l'on fait retraite pour se purifier) et Shamusho (photo ci-dessus) qui abrite les bureaux du sanctuaire.
Otemizusha (ci-dessus) est la principale fontaine de purification du sanctuaire. Ce bassin de purification fut offert par des citoyens japonais résidents aux Etats-Unis en 1940 . Il est fait en granit et pèse plus de 18 tonnes. Il est de coutume de se rincer la bouche et de se laver les mains à cet endroit avant de rendre ses hommages au temple.
On trouve aussi un théâtre de Noh au sanctuaire Yasukuni (ci-dessus). Il s'agit du Nogakudo. D'abord érigé dans le parc Shiba de Tokyo en 1881, il fut ensuite transféré au sanctuaire en 1903. On y joue régulièrement des pièces de Noh et on y exécute des danses traditionnelles en l'honneur des âmes sauvegardées.
Sanshuden (ci-dessus) est une salle de rassemblement qui a été refaite en 2004 et accueille des réceptions. La seconde photo représente Tochakuden, une salle de réception.
Il ne faut en aucun cas manquer ce superbe petit jardin, Shinchi Teien (« le jardin du bassin sacré »). C'est un des jardins les plus célèbres du pays, et il fut créé au début de l'ère Meiji. On prit vraiment conscience de sa beauté lors de sa restauration en 1999. Le lieu invite à la promenade et sa pièce maitresse est une chute d'eau qui recrée l'atmosphère de sérénité des montagnes. Malheureusement, j'y rencontrerai bien trop de monde pour retrouver la quiétude des lieux.
Une pause s'impose dans l'une des trois maisons de thé qu'abrite le sanctuaire Yasukuni dont Senshintei (première photo ci-dessus).
Après avoir repris quelques forces, on visitera le ring de sumo. Il se tint au sanctuaire Yasukuni une compétition de sumos en 1869 à l'occasion du festival du lieu. Depuis, des combats prennent place ici presque chaque année au printemps incluant de grands champions. Les combats peuvent être admirés gratuitement par les visiteurs. Je n'aurai pas la chance de prendre ne serait-ce qu'un cliché des lieux car l'accès est fermé au public.
Le bâtiment ci-dessus s'appelle Yasukuni Kaikan.
Ci-dessus, une photo de la statue de la veuve de guerre et ses enfants. La statue fut achevée en 1974 et est là pour rendre hommage à ces mères qui ont élevé leurs progénitures, seules, car elles avaient perdu leurs époux à la guerre. Elle a été financée par des enfants orphelins de guerre et qui, devenus adultes, ont voulu rendre hommage à ces mères.
Et voici le monument du Docteur Pal (ci-dessus). Achevé en 2005, ce monument rend hommage à Radha Binod Pal, qui fut un des juges ayant représenté l'Inde au Tribunal militaire international. Il fut le seul parmi les juges à affirmer que tous les défendeurs n'étaient pas coupables et à s'imposer contre l'acharnement général du moment.
Le sanctuaire accueille aussi des statues qui sont là pour honorer les animaux qui ont participé à leur façon aux conflits armés en rendant service à la nation japonaise: Chiens, chevaux et pigeons voyageurs (ci-dessus). Une statue de coursier, faite de bronze, honore la mémoire des chevaux dans ce sanctuaire depuis 1958. En 1982, on rajouta la statue d'un pigeon et d'un globe, puis en 1992, une autre statue, toujours en bronze, d'un berger allemand.
Il ne faut pas non plus passer à côté de ce pigeonnier qui est situé juste à côté du Théâtre de Noh. Celui-ci abrite environ 500 pigeons en permanence dans ce sanctuaire. On prétend qu'un seul pigeon sur 10 000 a une couleur d'un blanc pur.
Une autre statue s'élève au sanctuaire, c'est celle d'Omura Masujiro qui fut le fondateur de l'armée japonaise moderne. Installée en 1893, c'est aussi la première statue de style occidental.
Pêle-mêle , je cherche le monument Shagou Hyou, qui est une stèle sur laquelle on a gravé le nom du sanctuaire mais ai du mal à la trouver car elle est dissimulée derrière des stands installés pour le prochain festival du printemps. Même chose pour un autre monument, celui de Hitachimaru , et pour une magnifique sculpture nommée Irei no Izumi ( printemps qui régénère l'âme) qui n'est pas actuellement du tout mise en valeur. Cela nous conduit à la dernière étape de notre visite , les cerisiers en fleurs (ci-dessous). Ces cerisiers sont dominés par la lanterne haute (ci-dessous). Les arbres furent plantés pour la première fois dans ce sanctuaire en 1870, un an après sa construction. Ils symbolisent la fierté de ces combattants morts au combat. On compte aujourd'hui 600 arbres dont des yamazakura et des somei yoshino. C'est à ces cerisiers que l'institut météorologique japonais se fie chaque année pour publier un calendrier de floraison des arbres partout dans le pays.
INFOS PRATIQUES:
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Site internet du sanctuaire Yasukuni: http://www.yasukuni.or.jp/english/index.html
Jardin intérieur ouvert dès 6h00 du matin. Fermeture à 17 h00 ( en janvier,février, novembre et décembre), 18h00 ( en mars, avril, septembre et octobre) et à 19h00 ( en mai, juin, juillet et août). 3-1-1 Kudankita Chiyoda-ku à Tokyo. Tel: 03 3261 8326. Yushukan ,le musée du sanctuaire est ouvert tous les jours de 9h00 à 17h00 ( durant la fête Mitama, jusqu'à 21h00). Droit d'entrée: 800 yens (adulte)
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Fêtes au sanctuaire Yasukuni:
Le 1er janvier, Shinnensai ( Festival du Nouvel An)
Le 11 février, Kenkoku Kinensai (Jour de la fondation du Japon pat l'Empereur Jinmu)
Le 17 février, Kinensai (Fête du printemps pour la moisson)
Du 21 au 23 avril, Shunki Reitaisai (Festival du Printemps) (affiche ci-dessous)
Le 29 avril, Showasai (Kestival Showa). Anniversaire de l'Empereur Showa.
Le 29 juin, Gosoritsu Kinenbisai (Commémoration de la fondation du sanctuaire)
Du 13 au 16 juillet, Mitama Matsuri.
Du 17 au 20 octobre, Shuki Reitaisai (Festival d'automne)
Le 3 novembre, Meijisai (Anniversaire de l'Empereur Meiji)
Le 23 novembre, Niinamesai (Fête des premiers fruits)
Le 23 décembre, Tenno Gotanshin Hoshukusai (Anniversaire de l'Empereur actuel)
Les premier , onzième et 21è jour de chaque mois: Tukinamisai
Tous les jours, Asa Mikesai, Yu Mikesai, Eitai Kagurasai (fêtes Kagura perpétuelles)
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Accès: A 10 minutes à pied du métro Ichigaya ou Iidabashi (JR).
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Sakamoto Ryoma reste dans l'histoire du Japon comme l'une des figures du mouvement moderniste. En comprenant les enjeux politiques de l'ouverture de son pays, il permettra le passage de celui-ci de l'ère féodale au Japon moderne.
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Yoshida Shoin fut un intellectuel de la fin du shogunat de Tokugawa. Il aida à instruire les patriotes loyaux à l'Empereur (Ishin Shishi), permettant ainsi de contribuer à la restauration Meiji.
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Shinsaku Tagasugi était un samouraï du clan Choshu ayant contribué à la estauration Meiji, en étant par exemple à l'origine de l'idée révolutionnaire de la milice irrégulière auxiliaire, la shotai. IL fondera aussi la Kiheitai.