Samedi 25 janvier 2014
Okinawa, après les épreuves traversées au siècle dernier, est plus que jamais attachée à la paix. Le Hall de la Paix et le musée préfectorale de la paix sont là pour en témoigner. Le Hall de la Paix est visible de loin grâce à sa tour (ci-dessous) d'un blanc immaculé. Cette pyramide à sept côtés surmonte un bâtiment qui accueille la statue de prière pour la paix. Elle a une hauteur de 45 mètres. Le bâtiment offre quant à lui une superficie de 1571 m2. On y entre par une grande porte (ci-dessous, deuxième photo) et on traverse une galerie d'art garnie de plusieurs peintures, avant de pénétrer dans une immense salle où trône la fameuse statue de la paix (troisième photo). L'endroit ouvrit ses portes en octobre 1978.
Près du Hall de la Paix, j'aperçois une cloche : la cloche de la paix, qui ne sonne que lors de commémorations, est un don du Lion's Club. On peut y lire l'inscription suivante »Préservez l'âme des victimes de guerre ». Ce lieu, extrêmement étendu par sa superficie, offre aussi de voir une statue en bronze d'un petit garçon, en mémoire des enfants qui furent victimes de la bataille d'Okinawa. En 1982, c'est à dire dix ans après la rétrocession de l'île au Japon, par les Etats-Unis, on érigea cette statue en souvenir de ces enfants qui moururent pour la patrie. C'est aussi un message de paix envoyé au monde. Cette sculpture fut financée par des dons des écoliers de toutes les écoles du pays.
Dans ce parc, que je n'ai malheureusement pas le temps de visiter entièrement, est élevé le papillon Ogomadara, le plus grand papillon du Japon. Ses ailes atteignent les 13 centimètres et son nom signifie « âme » en grec. Tout un programme...
Intéressons-nous maintenant de plus près à la statue de la paix : celle-ci fut construite dans le but de symboliser le fort désir de paix des Japonais. C'est aussi un endroit sacré où l'on commémore les victimes de guerre. Shinzan Yamada (ci-dessous) en fut le concepteur, 18 années durant. Financée par des dons des diverses communautés d'Okinawa et des écoles de l'île, cette statue fut conçue par un artiste populaire à Okinawa. Né en 1885, Shinzan Yamada, mourut en 1977. Il passera les dernières années de son existence à construire cette œuvre. L'ensemble mesure douze mètres de haut et huit mètres de large. Les mains jointes de la statue expriment le recueillement pour les victimes de guerre et le désir de paix pour le monde , quelque soient les religions, idéologies, politiques, races ou pays.
Shinzan Yamada utilisa les techniques traditionnelles de la laque tsuikin pour réaliser la statue. C'est ainsi que celle-ci fut recouverte d'une laque en trois dimensions, spécialement imaginée par l'artiste. 3,5 tonnes de laque furent ainsi utilisées pour recouvrir l'ensemble. De la laque importée de Chine. Sur la tête de la statue, on peut distinguer plusieurs étoiles qui représentent l'espace cosmique veillant sur l'âme des morts. Les sept piliers symbolisent les sept mers qui entourent la statue de prière et la base de celle-ci comprend de nombreuses petites pierres ramassées sur toute la planète.
C'est en 1906 que Shinzan Yamada rejoignit l'école des Arts de Tokyo pour se spécialiser dans la sculpture et la peinture japonaise. Diplômé en 1910, il partit pour Pékin, afin d'exercer comme maitre au collège des Arts. Puis, il revint au Japon deux ans plus tard, et travailla l'art des cercles. On peut admirer ses œuvres au musée d'art du sanctuaire Meiji. En 1940, l'artiste s'en revint à Okinawa. Il perdit deux de ses fils durant la bataille d'Okinawa. C'est en 1957 qu'il annonça son souhait de créer une statue de paix qui protégerait à jamais les êtres humains des conflits armés. La population okinawaienne abonda dans son sens et offrit les fonds nécessaires à la construction de l'oeuvre. L'artiste avait déjà atteint l'âge respectable de 72 ans lorsqu'il débuta les travaux. Et il termina la statue à l'âge de 90 ans. Entre temps, il chuta à deux reprises de l’échafaudage où il se trouvait mais il s'en tira miraculeusement. Oui, cette oeuvre-là est bien le fruit d'un homme obstiné.
Dans le monument de la paix, se trouve également la flamme de la paix, non loin de la falaise qui borde l'ensemble, et d'où on peut profiter d'une vue panoramique sur l'océan (ci-dessous). Cette flamme est composée de trois flammes venues de trois endroits différents : de Zamami, un village de l'île d'Akajima, d'Hiroshima et de Nagasaki. Cette flamme brûle depuis 1991 mais n'a rejoint son lieu actuel que le 23 juillet 1995 (Journée de la mémoire à Okinawa).
Sur place, on trouve aussi le mausolée de la paix, un sentier de la mémoire (qui passe à proximité des 32 monuments de paix, dont la pirogue sur laquelle le Général Ushijima mit fin à ses jours).
Situé sur la colline de Mabuni, le parc de la mémoire offre une vue magnifique sur cette côte méridionale d'Okinawa, là où se déroula les combats décisifs de la bataille d'Okinawa. Le projet de parc à cet endroit fut finalisé après la rétrocession de l'île au Japon, en 1972. Les touristes japonais mais aussi du monde entier foule chaque année ce sol, sans oublier les groupes scolaires qui viennent ici pour comprendre. Ce lieu de recueillement est aussi idéal pour pique-niquer lors des vacances scolaires. Une aire de jeux est d'ailleurs prévue. Le parc a une surface totale de 47 hectares.
Terminons cette visite par le musée préfectoral de la paix. Celui-ci est abrité dans une construction monumentale qui contient au rez-de-chaussée une salle destinée aux enfants. Divisée en trois parties, celle-ci propose plusieurs expositions suscitant la curiosité des enfants et leur intérêt pour la paix dans le monde. Une bibliothèque rassemblant un nombre important d'ouvrages sur la paix offre aux visiteurs la possibilité de compléter ses connaissances. On peut y visionner les témoignages de survivants de la guerre sur écran vidéo. Des bornes interactives informent enfin les visiteurs sur les attractions offertes dans le musée.
Pris par le temps, je me rends immédiatement au premier étage où se trouve une exposition consacrée à la mémoire : la première salle parle du chemin vers la bataille d'Okinawa. Des panneaux d'information (en japonais seulement!) expliquent l'annexion par le Japon du Royaume des Ryukyu, sous la période Meiji. L'arrivée d'une armée japonaise forte sur Okinawa, puis les guerres sino-japonaise et du Pacifique.
La salle suivante porte le nom de « Typhoon of Steel » (déluge d'acier). On y aborde la bataille d'Okinawa et les dégâts qu'elle provoqua sur l'île. En seulement trois mois, ce « déluge d'acier » parvint à tuer 200 000 être humains, et à modifier la physionomie des lieux.
La troisième salle, surnommée « champs de bataille du diable » aborde le repli des troupes japonaises depuis Shuri jusqu'à la côte sud de l'île. Troupes qui seront ensuite prises en étau par les forces américaines. On y évoque la vie infernale des soldats et des civils, contraints de se réfugier dans les grottes. Certains moururent de faim, d'autres furent poussés au suicide par des soldats.
La quatrième salle est consacrée aux témoignages.
La dernière salle, elle, s'intéresse à l'histoire d'après-guerre d'Okinawa, histoire qui débuta dans les camps de prisonniers. Puis l'île se transforma en un vaste camp militaire américain dès la période de la guerre froide entre la Russie et les Etats-Unis. On confisqua des terres, et on oppressa les habitants. De là naquit un fort sentiment de revanche et le désir de rétrocession de l'île au Japon, par les Américains, ce qui sera chose faite en 1972.
INFOS PRATIQUES :
-
Parc de la mémoire, colline de Mabuni, à Itoman. Tel : 098 997 2765. Pour vous y rendre, en voiture, emprunter le taxi (3000 à 3500 yens depuis Naha) ou sa propre voiture en prenant les routes 7 puis 331. Par bus, depuis le terminal de bus de Naha, prendre la ligne 89 (coût : 560 yens l'aller).
-
Musée Préfectoral de la Paix, 614-1 Aza-Mabuni, à Itoman. Tel : 098 997 3844. Ouvert tous les jours de 9h00 à 17h00. Entrée : 300 yens. Guides audio disponibles en anglais, chinois, espagnol, coréen et japonais. Site internet : http://www.peace-museum.pref.okinawa.jp/english/index.html
-
Cette visite fait partie de l'excursion consacrée à la guerre et au souvenir à Okinawa (coût : 4800 yens, repas inclus). Départ de l'excursion à 9h30 et retour à 15h30. Guide audio disponible en anglais pour le prix de 500 yens.
Okinawa Bus Tour (excursions) (en japonais) : http://okinawabus.com/
Izumizaki 1-10-16, Naha-shi ( à deux minutes de marche du terminal de bus de Naha), Naha. Tel : 098 861 0083. On parle anglais à l'accueil. Mèl : kankou@okinawabus.com