Lundi 3 février 2014
Le nom « Ryukyu » provient d'écrits chinois datant du Livre des Sui en 607, et signifie Dragon à corne glacée. C'est à l'histoire de ces îles Ryukyu que nous allons aujourd'hui nous intéresser puisque je vous emmène au Musée préfectoral de Naha qui propose une exposition permanente sur ce thème. La généalogie des actuels habitants de ces îles n'est pas certaine. Certains prétendent que les premiers habitants auraient traversé un passage terrestre préhistorique en provenance de la Chine moderne, ce qui aurait permis la venue d'Austronésiens, de Micronésiens, puis de Japonais. L'archipel des Ryukyu aurait été séparé puis relié à plusieurs reprises au continent eurasien ou à des îles comme Taïwan et Kyushu, par des bandes de terre. Ce qui est sûr, c'est que l'homme de Minatogawa existait il y a 18 000 ans et fut découvert au sud d'Okinawa. C'est le seul être humain du Paléolithique à avoir été découvert intact au Japon, qui plus est, entouré d'ossements de daims, cochons sauvages ou serpents habu, ce qui laisse présager qu'à cette époque, Okinawa devait être recouverte d'une forêt dense, variant selon les îles. On pense que cet homme venait de Chine mais l'on ne retrouva aucun outil de pierre près de lui. Pendant les 12 000 ans qui suivent, aucune trace de sites archéologiques ne sera retrouvée après la découverte de l'homme de Minatogawa. On compte dans cette partie du monde plus de 190 îles, petites et grandes, avec, pour chacune, son propre micro système, ses forêts et sa culture. Des micro systèmes qui se sont développés à la faveur de l'isolement de ces îles par l'océan. D'où cette biote unique que l'on trouve à Okinawa. A l'époque, le climat était chaud, avec de fortes précipitations presque toute l'année, un climat favorisant la croissance de forêts différentes selon le type de sols, de géologie, et selon les interactions entre l'océan et les plans d'eau intérieurs. Dans la région d'Amami, à Okinawa et sur les îles de Yaeyama, on trouvait par exemple des forêts denses en montagne, tandis que ces forêts étaient moins denses sur l'île de Miyako, au centre et au sud de l'île d'Okinawa. Des mangroves existaient aussi à l'embouchure des rivières dans les grandes îles.
Il existait également une culture d'amas coquillier à Okinawa : la première période correspond à l'époque Jomon et la deuxième à la période Yayoi. On penche pour une société de chasseurs-cueilleurs assortie de l'apparition de poteries Jomon. Dans la seconde partie de la période Jomon, les sites archéologiques se rapprochent de la mer, ce qui suggère que l'homme vécut de la pêche. A Okinawa, le riz n'est pas cultivé pendant la période Yayoi mais la riziculture débutera au cours de la dernière période de l'âge des amas coquilliers. Des anneaux de coquillages trouvés dans l'archipel Sakishima, sur les îles Miyako et Yaeyama, seront importés par le Japon et l'on trouvera aux mêmes endroits des haches en coquillage datant d'il y a 2500 ans suggérant l'influence de la culture du sud du Pacifique.
Le groupe descendant des ancêtre japonais arriva à la fin de l'époque pléistocène, c'est à dire il y a 30 000- 40 000 ans (la plupart de ces êtres humains proviennent d'Okinawa).
Le premier texte d'Okinawa est le Chuzanseikan (miroirs de Chuzan), compilé par Sho Shoken. On y parle d'un samouraï, Minamoto no Tametomo qui combattit la rébellion de Högen de 1156 puis s'enfuit sur l'île d'Izu, avant de se rendre à Okinawa. Cette histoire est toutefois remise en cause par certains. Après les amas coquilliers, on note l'apparition de l'agriculture vers le XII è siècle. L'homme quitte le bord de mer pour s'installer à l'intérieur des terres et sur des endroits plus élevés. Cette période est appelée gusuku, constituée de lieux saints, de logements entourés de pierres et l'apparition de châteaux. Le commerce de la porcelaine se développe alors entre Okinawa et d'autres pays. Les rois de Ryukyus comme Shunten ou Eiso sont considérés comme des gouverneurs importants. En 1291, une invasion mongole survient mais la dynastie Eiso défend ses terres. Les hiragana importés du Japon apparaissent grâce à Ganjin en 1265. et les noro, chamanes ou prêtresses font aussi leur apparition. On comptera plus de 300 gusuku (forteresses) dans les îles Ryukyu, de tailles et de formes différentes. Des lords (Aji) font leur apparition, et se battent entre eux pour le pouvoir, avant d'être assimilés plus tard dans une même nation.
Les premiers visiteurs chinois apprécient l'hospitalité des habitants ryukyu et notent des différences notables entre la petite bourgeoisie d'alors et le reste du peuple, plus pauvre. D'importantes relations commerciales vont se développer entre les îles Ryukyus , la Chine, et d'autres pays d'Asie du sud-est. Plus tard, Okinawa rencontreront même les Hollandais, les Portugais, les Anglais et les Français. Les îles Ryukyu, subordonnées à la Chine, versaient un tribut , appelé shinko ou choko. Des agents plénipotentiaires étaient alors envoyés par bateau tributaire (ci-dessous) pour apporter ce tribut aux empereurs chinois. Une partie de ces 200 agents embarquaient depuis le port de Naha, traversaient la Mer de Chine , accostaient à Fujian puis parcouraient encore plus de 6000 kilomètres avant d'arriver à Pékin avec leurs tributs (dont des chevaux des îles, du soufre et d'autres marchandises d'Asie du sud-est). A l'époque, Naha était le port de ce royaume maritime et Shuri, sa capitale. Le développement de liens étroits entre la Chine et les îles Ryukyus permirent de nourrir la culture locale (on en voit des exemple dans la décoration des temples, les monuments, les cloches ou encore l'artisanat ryukyu).
La période des Trois Royaumes, surnommée par le Japonais « époque Sanzan », s'étend de 1322 à 1429. Et se caractérise par la consolidation progressive du pouvoir de la famille Sho. Sho Hashi conquiert ainsi Chuzan, le royaume central en 1404. Il conquerra plus tard le Royaume du nord Hokuzan en 1416, puis celui du sud, Nanzan. En 1429, il réussit ainsi à unifier ces trois entités en une seul Royaume de Ryukyu. L'empereur de la Chine Ming reconnaitra Sho Hashi en tant que représentant de ce royaume. Et offrira au roi une tablette laquée de couleur rouge connue sous le nom de « tablette de Chuzan ». Les rois de Ryukyus, bien qu'indépendants, présenteront régulièrement leurs hommages aux empereurs chinois. Sho Shin sera le troisième roi de la seconde dynastie Sho, et son règne sera marqué par une période de paix et de prospérité. Il est le fils de Sho En, son prédécesseur, celui qui fonda la dynastie par Yosoidon, son épouse souvent désignée comme la reine mère. D'autres petites monarchies existent aussi sur les îles de Miyako et Ishigaki. Cette époque a laissé des traces patrimoniales comme la cloche ci-dessous. C'est sur ordre du roi Sho Taiku que sera coulée, en 1458, cette cloche Bankoku-Shinryo-nokane, connue aussi sous le nom de «cloche du pont international ». Elle sera suspendue dans le Seiden du Château de Shuri et représentera les esprits ryukyus, ceux qui vont et viennent des mers d'Asie.
De nombreux Chinois s'installent aux îles Ryukyu pour servir le gouvernement ou pour commercer durant cette période. La dynastie Ming envoie 36 familles originaires de Fujian à la demande du roi des Ryukyu afin de gérer les relations océaniques dans le royaume en 1392. Beaucoup de fonctionnaires des Ryukyus descendent de ces familles chinoises. Ils participeront au développement du royaume en utilisant leurs techniques et leurs relations diplomatiques. En 1609, les îles Ryukyus subissent l'invasion du clan Shimazu, depuis la Province de Satsuma. Trois mille hommes et plus d'une centaine de jonques de guerre prennent la mer à partir de Kagoshima (sud de Kyushu). Le roi des Ryukyu ordonne à ses sujets de ne pas combattre car, dit-il, la vie est trop précieuse. Le royaume assiste donc au pillage en règle des trésors culturels inestimables qui sont rapportés à Kagoshima. A l'issue de ce conflit, les îles Amami sont cédées au clan Shimazu dont la domination sur les territoires commence en 1613. Désormais, les rois Ryukyus deviennent vassaux du clan Shimazu, bien que le royaume reste indépendant. Le gouvernement ryukyu est restructuré et des réformes des lois régionales sont engagées. Le peuple est divisé entre les samouraïs (lords) et les fermiers (contribuables). 1689 voit la création du keizuka, le premier bureau de généalogie du royaume, permettant de classer les familles importantes selon leurs rangs et leurs privilèges. Des sceaux distincts (première photo ci-dessous) étaient utilisés : le sceau de Shuri servait aux usages domestiques et le sceau du Roi servait pour les courriers adressés à la dynastie chinoise des Qing. Au XVII è siècle, les îles Ryukyus sont à la fois tributaires de la Chine et du Japon. Les Shimazu interdiront aux habitants de posséder des épées, d'où l'apparition du karaté qui utilise des objets domestiques comme armes (kobudo). On introduit aussi le Feng Sui et la morale confucianiste depuis la Chine car le désir de renforcer les liens avec ce pays sont forts. Les îles, tombées sous l'influence du shogunat Tokugawa, continuent à envoyer des agents plénipotentiaires dans cette Chine qui a désormais à sa tête la dynastie Qing. On envoie des bateaux en Chine (pour payer le tribut) mais aussi au Japon (en signe de reconnaissance du shogunat naissant) puisque celui-ci avait bien voulu reconnaître le Royaume des Ryukyus. Ces agents plénipotentiaires, appelée To-Tabi, se rendaient à Pékin tous les deux ans. Economiquement parlant, le royaume ryukyu est alors dépendant du commerce avec la Chine et le Japon. Le royaume revendait ainsi au Japon des produits fabriqués en Chine. Il vendait aussi à la Chine le cuivre et le varech japonais. La culture de la canne à sucre apparaît bientôt et les îles importent les techniques de construction navale chinoise. Dès le XVII è siècle, la canne à sucre et sa transformation devint la spécialité d'Okinawa. Le royaume en fit même un monopole, ce qui lui rapportera des ressources financière conséquentes. Chaque village possédait alors sa coopérative sucrière et sa maison sucrière. Les moulins à sucre , introduits de Chine, resteront effectifs jusqu'à la fin de la seconde guerre mondiale. Gima Shinjo introduira quant à lui la patate douce dans les îles : né à Kakinohana, il héritera de la propriété familiale en 1593 et deviendra lord de son village. Il répandra la culture de ce légume rapporté de Chine en 1605 par Nogumi-sokan, un agent plénipotentiaire. Des missionnaires seront, de leur côté, envoyés en Chine en 1623 afin de promouvoir l'industrie de la patate douce mais aussi l'industrie sucrière. Ci-dessous, on peut voir une peinture datant du XVIII è siècle et représentant des bateaux au mouillage lors de la venue du prince ryukyu au Japon.
Ryukyu tentait d'exister en tant que culture unique tout en maintenant de forts liens commerciaux avec l'étranger. Elle adopta de nombreux éléments culturels chinois et japonais, pays privilégiés dans ces relations. Mais il arrivait aussi que la culture ryukyu s'exporte au Japon, par exemple, comme ces instruments de musique de cour ryukyus (ci-dessous) qui furent introduits à la cour d'Edo par des agents Edo-nobori afin de jouer les musiques rojigaku et ozagaku. Parmi eux, le souna, le honteu, le riipa, le tonru, le ryanpan, le yankin, le iekin, le ruhien et et le susuen. Ces instruments étaient superbes, une fois décorés de feuilles d'or (chinkin), de hakue, ou de raden (décoration sur bois laqué). Les arts ryukyus furent plus tard influencés par ceux de la cour ryukyu. Dès l'ère ancienne, le sanshin, instrument à trois cordes est rapporté de Chine et permet l'introduction de la musique classique dans les îles. Des pièces de cour (kumiodori) et des danses classiques sont bientôt créées afin de divertir les agents plénipotentiaires chinois (sakuho-shi). Autant de divertissements qui se populariseront à la création de la préfecture d'Okinawa.
Le royaume va se retrouver au pied du mur dès le début du XIX è siècle. Il lui était en effet devenu impossible de fonctionner par manque de ressources financières. Les villages étaient à bout, tant ils avaient été pressurés durant des années et l'argent ne rentrait plus. Trop d'impôt ne tue t-il pas l'impôt ? Ensuite, les Occidentaux, qui exploraient le continent asiatique menaçait de débarquer dans la région. La Hollande, le Royaume-Uni, la France et les Etats-Unis souhaitaient signer avec le royaume des traités commerciaux et obtenir l'autorisation d'y envoyer des missionnaires chrétiens. Mais le roi déclina ces demandes, différant les négociations histoire de gagner du temps sans se fâcher avec ces nouveaux-venus. L'Angleterre avait déjà déclaré la guerre de l'Opium à la Chine en 1842, ce qui avait valu la défaite aux Qing, et avait fait réfléchir les habitants des Ryukyu sur cette nouvelle « menace ». Le roi avait intensifié la surveillance des côtes en installant, dès 1844, des phares sur les îles de Kume, Kerama, Ie et Izema. Les circuits de communication avaient été aussi renforcés à Okinawa, sur les îles de Miyako et de Yaeyama. Bientôt, un vaisseau français arriva aux Ryukyu, muni de lettres diplomatiques et de commerce, et d'autorisations de prosélytisme. Le royaume déclina cette visite, ce qui n'empêchera notre pays d'envoyer des missionnaires sur les îles, deux ans plus tard. Le refus sera identique. Les américains allaient quant à eux faire leur apparition dans la zone en 1853 avec les navires noirs du commodore Perry, envoyé officiel des Etats-Unis. Le commodore organisera une expédition dans l'île d'Okinawa, la plus grande des îles ryukyus. Accompagné de géologues, botanistes, zoologistes, et astronomes, il rédigera un rapport « Récit de l'expédition d'un escadron américain dans les mers de Chine et au Japon », et rapportera des échantillons de plantes et des croquis (ci-dessous, le village d'Onna).
Entre temps, le Japon avait fait sa révolution Meiji et négociait les réformes des îles Ryukyu. Le royaume, lui, tenait à perdurer et le dialogue s'enlisait. Il faudra l'incident de Mudan , en 1871, pour que le Japon agisse d'autorité en considérant le royaume des Ryukyus comme nippon. L'incident de Mudan se concrétisa par le massacre de 54 Okinawaiens des îles Ryukyus à Taïwan, qui erraient dans la partie centrale de l'île, suite au naufrage de leur bateau. Cette annexion fit du Royaume le Domaine féodal de Ryukyu, dès 1872. Après l »expédition de Taïwan de 1874, le rôle du Japon en tant que protecteur du peuple okinawaien est reconnu mais on laisse encore le royaume croire en son indépendance, jusqu'en 1879. Au Japon, dès les années 1870, le sujet des relations des îles Ryukyu avec la Chine intéressait beaucoup les journalistes de ces nouveaux journaux satiriques qui étaient apparus à la faveur de la révolution Meiji (ci-dessous). En 1878, on répertorie ces îles comme étant tributaires du Japon. Et Okinawa est répertoriée comme « île du milieu » (Tsujan). Et le port de Tsujan, d'être ouvert au commerce extérieur. Les produits agricoles disponibles sont alors le riz, le sucre, le tabac, le camphre, le thé, les fruits et la soie. On vend aussi des produits manufacturés comme le coton, le papier, la porcelaine et la céramique laquée.
En 1879, le Japon annonce son intention d'annexer une fois pur toutes le royaume de Ryukyu. La Chine proteste et demande aux Etats-Unis d'intercéder. En vain. Le gouvernement de Meiji (dont on voit ci-dessous les officiers négociant l'annexion à Okinawa) abolit le han de Ryukyu et le remplace par une préfecture. La monarchie de Shuri est abolie et le roi Sho Taï (deuxième photo ci-dessous) est contraint de s'installer à Tokyo, offre qu'il déclinera. Il recevra en échange le titre de marquis dans le cadre du système Meiji de paierie. De nombreuses transformations vont voir le jour aux Ryukyus avec cette nouvelle ère : durant la deuxième partie du XIXè siècle, Okinawa construira de nouvelles routes, et le transport motorisé fera son apparition avec le développement du rail et des bus. Mais dans l'immédiat, une hostilité des habitants envers les Japonais va prendre forme car ils voient d'un mauvais œil la disparition de la culture ryukyu. Le nouveau système éducatif n'autorisera en effet que l'utilisation de la langue japonaise et humiliera les étudiants persistant à s'exprimer dans leur langue locale. Et on leur fera porter des panneaux les surnommant « locuteurs de dialectes ». Les instituts de formation des professeurs et les écoles élémentaires sont soumises à des règles strictes d'assimilation de la langue nippone. D'un autre côté, cette langue japonaise va servir de lien grandissant entre une bonne partie de la population locale et le Japon. Et les Okinawaiens, de finir, à terme, par ressentir une certaine fierté d'appartenir à l'Empire nippon. Au point de s'engager en nombre lors des périodes de mobilisation pour les guerres à venir. La préfecture d'Okinawa s'organise quant à elle sur le terrain : elle créé des commissions pour le développement de l'artisanat, pour la poterie et pour la métallurgie. Les réformes sont faites progressivement pour heurter le moins possible, des gouverneurs préfectoraux et des fonctionnaires d'autres préfectures nippones sont envoyés par le gouvernement Meiji pour organiser l'administration de la nouvelle venue.
La victoire nippone lors de la guerre sino-japonaise va aider le gouvernement Meiji à imposer les réformes à Okinawa, telles que l'intégration et les coutumes. En 1899, nait une réforme agraire (taxation des terres) jusqu'en 1903. Villes et villages seront désormais gérés comme les cantons l'étaient depuis 1896. L'industrie de la canne à sucre se développe à Okinawa. On fabrique aussi des chapeaux panama, des textiles, et l'awamori (boisson alcoolisée locale). Certains entrepreneurs nippons , de passage dans les îles, s'y établissent et deviennent leaders dans leur domaine d'activité. Après les années 1880, ils jetteront leur dévolu sur Naha où ils créeront des affaires, finissant par occuper ensuite des postes économiques importants.
Pourtant, dans ce bouleversement, va naitre une prise de conscience okinawaienne de l'importance de l'essence culturelle des îles, et de ses origines. Des recherches seront menées par plusieurs chercheurs dont Iha Fuyu (en photo ci-dessous) avec des échanges scolaires à la clé et la participation d'écoles japonaises. Celui qu'on finira par appeler le « père des recherches d'Okinawa », restera à jamais le grand spécialiste de l'histoire et de la culture d'Okinawa.
La possession d'Okinawa restait, depuis les dispositions de Ryukyu, un sujet de conflit entre le Japon et la Chine, d'autant plus que l'Empire nippon gagna la première guerre sino-japonaise en 1894, et fit de Taïwan une colonie, tout en occupant une grande partie de la Mandchourie. Face à cette omniprésence nippone en Chine, le monde commençait à s'agacer de l'omniprésence du Japon, nation qui était en train de filer irrémédiablement vers un avenir sombre, avec, pour les cinquante prochaines années, deux guerres : la guerre de 1937 et celle de 1941. A tel point qu'on entreprit bientôt de renforcer les fortifications d'Okinawa, au cas où...
Je ne m'étendrai pas sur la période terrible vécue par les habitants d'Okinawa lors de la seconde guerre mondiale car elle a déjà été traitée dans d'autres articles. Le 23 mars 1945, les Etats-Unis lancent l'attaque que l'on connait sur l'île d'Okinawa, tête de pont avant l'invasion programmée du Japon. A l'issue de cette guerre, la grande île Ryukyu n'est plus qu'un tas de ruines, occupée par l'armée américaine jusqu'en 1972. Les habitants, déjà traumatisés par les destructions, souffriront de la main-mise de l’administration américaine sur leur pays, et de la confiscation de leurs terres pour y construire des bases militaires. Parallèlement, les Etats-Unis joueront l'apaisement en encourageant le développement des Ryukyus, la mise en place d'une protection sociale, d'un système éducatif et culturel, tout en persistant dans leur occupation militaire, se servant ainsi d'Okinawa comme la pierre angulaire de la présence américaine dans cette partie du monde. Après la guerre, l'île est d'abord dirigée par un gouvernement américain militaire. Le dollar devient la monnaie officielle et la conduite à droite est de rigueur. Mais un mouvement se dessine en faveur de la réversion de l'île au Japon. Le 17 juin 1971, le président américain Richard Nixon et le premier ministre japonais Eisaku Sato signent l'accord de réversion d'Okinawa à Washington D.C. Les îles sont restituées au Japon le 15 mai 1972 (ci-dessous, la foule dans les rues), ce qui constitue un échec pour le mouvement pour l'indépendance des Ryukyu apparu dès 1945, mais un certain succès pour le Japon. L'accord prévoit que les Etats-Unis maintiennent leurs bases sur l'île dans le cadre du traité de 1952 pour protéger le Japon, mais ces bases doivent être exemptes d'armes nucléaires. Les yankees contrôlent alors 19% environ de l'île, avec ses 30 000 soldats. Malgré le versement d'un loyer pour l'occupation des terres par l'armée, et la fourniture d'emplois locaux, Okinawa reste la plus pauvre des préfectures japonaises.
INFOS PRATIQUES :
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Musée préfectoral d'Okinawa, Omoromachi 3-1-1, à Naha. Tel : 098 941 8200. Ouvert tous les jours (sauf le lundi) de 9h00 à 18h00. Entrée : 400 yens. A cinq minutes de marche de la station Omoromachi (monorail). Site internet : http://www.museums.pref.okinawa.jp/english/index.html
Photos autorisées sans flash dans certains endroits indiqués. J'adresse d'ailleurs mes plus vifs remerciements à Madame le Conservateur du musée, qui m'a autorisé à prendre les photos de l'ensemble de cette exposition permanente.