Samedi 22 octobre 2016
Avez-vous déjà entendu parler des Tramways de la Corrèze ? Formée par Messieurs Etienne et Gilbert Planche, cette compagnie oeuvra comme chemin de fer secondaire dans ce département de 1904 à 1960. Et cette société, qui avait son siège à Lyon, de posséder trois lignes : Le Transcorrézien (plus familièrement surnommé « Le Tacot ») entre Tulle et Ussel, la ligne allant de La Rivière de Mansac à Juillac, et celle allant de Turenne à Beaulieu sur Dordogne.
Ouvrir des voies de chemin de fer dans un département aussi accidenté relevait de la prouesse technique et imposa souvent la construction d'ouvrages d'art : on construisit ainsi le viaduc de Lantourne en 1947, sur une retenue d'eau, d'une longueur de 207 mètres. Le viaduc des Rochers Noirs (en photo ci-dessous), lui, sera bâti selon le système du commandant Albert Gisclard, qui consistait en un système de pont suspendu, comprenant un type de haubanage particulier du tablier du pont. Ce viaduc mesurait 170 mètres de long et 92 mètres de haut, tandis que deux tunnels de 123 et 45 mètres donnait accès à cet ouvrage.
Je ne verrai pas de train circuler sur ce réseau d'ailleurs en bonne partie disparu, puisque ce réseau ferré fut fermé au trafic voyageurs le 3 novembre 1969, et au trafic marchandises le 1er juin 1970. Le Transcorrézien fut pendant près de cinquante ans le tramway à vapeur le plus utilisé de Haute-Corrèze. Il reliait Tulle à Ussel et ses lignes seront exploitées entre 1912 et 1925 par la Société des Tramways Départementaux de la Corrèze. Le « Tacot » fut inauguré en 1913 par Raymond Poincaré alors Président de la République et sillonnera la campagne jusqu'à sa disparition en 1960. Il sera ainsi mêlé à tous les évènements de la vie locale (mariage, foire, pèlerinage, vie quotidienne, acte de résistance sous l'occupation..) restant pour certains le lien privilégié voire unique avec le monde extérieur.
Ce sont au total plus de 190 kilomètres de lignes qui permirent au trafic tant marchandises que voyageurs de se développer avec une quinzaine d' arrêts entre Tulle et Ussel : Laguenne, Espagnac, Saint Pardoux la Croisille, Clergoux, Marcillac la Croisille, Lafage sur Sombre, Saint Hilaire Foissac, Lapleau, Soursac, Saint Pantaléon de Lapleau, Saint Hilaire Luc, Neuvic, Liginiac et Chirac-Bellevue (ci-dessous l'ancienne gare).
Les gares ? Parlons-en. En Corrèze, elle étaient particulièrement rustiques et il en existait trois catégories : 1ère, 2ème et 3ème classe. La gare de Chirac-Bellevue appartient à cette dernière catégorie, la plus simple et la plus petite. Elle ne disposait en effet que d'un hangar à marchandises et d'un abri couvert. Sous celui-ci, une porte donnait accès à un local exigu où étaient gardés les billets. Ces derniers étaient délivrés aux voyageurs à un guichet jouxtant cette porte. Située en bordure de la départementale D168, cette gare est également l'une des plus isolées de la ligne du Transcorrézien, puisque le choix du tracé imposera sa construction à environ quatre kilomètres du bourg de Chirac-Bellevue, permettant de mieux desservir les hameaux voisins, mais contraignant les voyageurs à faire quelques kilomètres à pied. Rénovée en 1999, cette gare a désormais retrouvé tout son charme, grâce, entre autres, à la restauration et à l'installation du wagon-grue à ses côtés un an plus tard.
Le tronçon ferroviaire qui reliait Neuvic à Ussel fermera en juillet 1952 et le Transcorrézien disparaitra de manière définitive le 31 décembre 1959. Le petit train partait alors de Tulle, traversait la rivière Corrèze sur un petit pont de pierre, puis remontait la vallée de la Sainte-Bonnette, gravissait le plateau où se trouve le Mortier, suivait sensiblement le cours du Doustre (entre Saint Pardoux et Marcillac), avant de se diriger vers Lapleau, redescendait vers la Luzège, la surplombait sur le viaduc des Rochers Noirs, remontait vers Soursac. Le Tacot parcourait ensuite la distance qui séparait le Vianon d'un autre torrent affluent de la Dordogne, passait à Neuvic où il traversait la Triouzoune, se dirigeait vers Liginiac, au-dessus de la Dordogne, puis de Chirac et Mestes. Il joignait Ussel en se tenant constamment entre 600 et 700 mètres d'altitude, sur les hauteurs qui dominent le cours de la Diège. Et la ligne de franchir tout à tour le viaduc des Rochers Noirs et ses tunnels, le pont métallique de la Valette, la citerne de Lafage sur Sombre (ci-dessous)...
Il reste aujourd'hui quelques vestiges de l'histoire du Transcorrézien. Cà et là, nous l'avons vu, quelques gares et citernes ont été restaurées, tout comme les importants ouvrages de la ligne. Ainsi le viaduc des Rochers Noirs relève t-il du miracle compte tenu de la configuration du terrain, de la grande profondeur du ravin, de la forte inclinaison du talweg et de la nécessité de creuser deux tunnels. On fit donc le choix de la technique s'inspirant de celle du pont suspendu pour cette ouvrage, technique particulièrement élégante. Après la cessation de son activité ferroviaire, l'ouvrage fut d'abord dédié au trafic routier (route départementale D89, jusqu'en 1983), puis réservé aux piétons (à partir de cette date). Classé aux Monuments historiques depuis le 6 décembre 2000, le pont est maintenant interdit à toute circulation pour des raisons de sécurité.
Le viaduc de Lantourne (ci-dessus en photo) mesure 207 mètres et se trouve sur la commune de Marcillac la Croisille. Il fut construit en 1949 à la suite de la mise en eau du barrage de La Valette. Son pont, muni d'un tablier métallique, est semblable à celui du viaduc ferroviaire de Garabit, et est composé de deux travées de rives et d'une travée centrale. Il sert désormais au passage de la route départementale D978.
L'ancienne ligne du Transcorrézien fait désormais la part belle aux randonneurs puisque ceux-ci peuvent emprunter des portions de sa voie transformées en itinéraire pédestre depuis 2001.
Le PO-Corrèze était quant à lui un réseau de chemin de fer à voie métrique, disparu aujourd'hui, qui avait été concédé à la Compagnie du chemin de fer de Paris à Orléans et construit par la Société de construction des Batignolles. Son centre de réseau était installé à Tulle et le POC (Paris-Orléans-Corrèze) desservait à l'époque le Chemin de fer du Blanc-Argent et la ligne de Blois à Saint Aignan sur Cher. Trois lignes co-existaient : Tulle-Seilhac- Uzerche, sur 32 km vers le nord, Tulle-Argentat sur 33,6 km vers le sud du département et Seilhac-Treignac sur 29 km vers l'est. La mise en service du réseau aura lieu en 1904 et sa fermeture, en 1969-1970. Durant toute la durée de son l'exploitation, c'est la traction à vapeur qui s'imposera, comme sur cette carte postale ci-dessous, en gare de Treignac. Les gares de Tulle et d'Ussel étaient connectées avec le réseau SNCF et les bâtiments érigés dans le style de la compagnie d'Orléans d'alors.
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