Mercredi 2 novembre 2016
Après un voyage de trois jours et 21 heures d'avion, j'ai enfin atteint ma destination finale, Hobart. Il faut aimer les voyages pour se rendre dans de tels endroits. Ile-Etat de l'Australie, la Tasmanie est située en dessous du continent australien, à deux heures d'avion de Sydney, et Hobart est sa ville la plus peuplée, avec quelques 200 000 habitants. Je n'y étais pas retourné depuis dix ans, et l'aéroport a connu quelques agrandissements. Mon nouveau GPS TomTom fonctionne à merveille et me conduit d'abord à mon motel où je résiderai une dizaine de jours puisque j'entame ici un long séjour de...45 jours. Le temps n'est pas au beau fixe et m'offre un ciel chargé de nuages en guise de bienvenue, avec quelques pluies éparses ici et là.
Point de départ des expéditions antarctiques, le port de Hobart m'offre le même regard que la première fois : ses restaurants flottants (ci-dessous) sont toujours là, sur le Constitution Dock, et le Victoria Dock accueille les mêmes bateaux de pêche qu'autrefois. Le long du Franklin Wharf se dressent des sculptures représentant une scène du départ de l'expédition antarctique en 1898 (deuxième photo ci-dessous). C'est d'ici que partent encore de nos jours ces expéditions australiennes et françaises vers la Terre Adélie. Hobart sert également de base logistique au brise-glace français l'Astrolabe. C'est également de Hobart que Roald Amundsen postera un câble pour annoncer au roi de Norvège Haakon VII, et au reste du monde, la réussite de son expédition, tout juste de retour de la conquête du pôle Sud. Nous sommes alors le 7 mars 1912.
Le port est un point névralgique de la ville puisqu'il abrite l'office de tourisme où je me suis rendu hier pour organiser mon séjour dans l île. Face aux quais, se dresse l'imposant musée de Tasmanie (troisième photo), créé en 1846 par la Société Royale de Tasmanie, plus vieille société royale du genre installée hors du Royaume-Uni. 300 000 visiteurs se pressent ici chaque année afin d'y découvrir les nombreuses expositions. Pour ma part, je décide de me concentrer sur l'histoire coloniale de l'île.
L'Etat de Tasmanie est formé par l'île de Tasmanie et par mille autres petites îles. L'île principale, elle, s'étend sur 364 km du nord au sud, et 306 km d'ouest en est. Baptisée Ile de l'inspiration en référence à son environnement riche, naturel et préservé, la Tasmanie abrite des réserves naturelles sur un tiers de son territoire. C'est Abel Tasman qui fut le premier Européen à apercevoir cette terre le 24 novembre 1642. Et de la nommer aussitôt Terre Antony van Diemen, du nom de son mécène, alors gouverneur des Indes orientales néerlandaises. L'endroit sera renommé du nom du découvreur européen le 1er janvier 1856.
L'aile gauche du musée de Tasmanie abrite l'histoire de l'île et le rez-de-chaussée me plonge directement dans ce que découvrirent les premiers explorateurs lorsqu'ils posèrent le pied sur ce morceau de terre autrefois rattachée au continent australien lors de la dernière glaciation. Le lieu est alors occupé par les Aborigènes, divisés en neuf groupes ethniques. Ils sont les premiers habitants de la Tasmanie et leur présence est attestée depuis près de 35 000 ans, alors que l'élévation du niveau de la mer sépara la Tasmanie du continent il y a 10 000 ans environ. Au moment de la colonisation de l'île par les Britanniques, en 1803, on comptait une population indigène de 5000 à 10000 âmes. Du fait des persécutions, des maladies infectieuses introduites par les Européens et de la Guerre Noire, leur nombre tombera à...300 habitants en 1833. Et presque la totalité de ces Aborigènes d'être déplacée sur l'île de Flinders. Une femme, Truganini, est généralement considérée comme la dernière Aborigène de Tasmanie non métissée.
Ma visite me fait découvrir des vitrines abordant la zoologie, la botanique et la géologie. Je croiserai d'abord des animaux empaillés qui faisaient ou font toujours partie de la faune de l'île. Tandis que le diable de Tasmanie (ci-dessous) survit plus ou moins difficilement, le tigre de Tasmanie (deuxième photo), lui, disparut une fois pour toutes en 1936. La pauvre bête, qui portait plusieurs noms (loup marsupial, loup de Tasmanie, Thylacine ou Tigre de Tasmanie) sera pourchassée par les éleveurs de bétail avant de devenir aujourd'hui le symbole de l'île. Une galerie du musée est entièrement consacrée à cet animal qui serait apparu il y a 4 millions d'années. Ses dents, ses mâchoires puissantes et ses talons le faisaient ressembler à un canidé (loup) de l'hémisphère Nord, d'où la méfiance des Européens pour leur bétail. Les nouveaux arrivants feront état de « bêtes sauvages avec des griffes comme un tigre », ou encore « un chat tigre », d'où son appellation. Malheureusement, l'homme blanc décimera le thylacine et recevra des récompenses pour tout animal abattu (plus de 2000 primes seront distribuées entre 1888 et 1909).
Le sous-sol de Tasmanie suscitera également la curiosité des Européens, d'abord pour trouver du charbon, mais aussi de l'or (comme ces prospecteurs sur cette troisième photo), de l'étain, de l'argent ou du cuivre. D'autres prospecteurs partaient à la chasse aux fossiles et aux formations géologiques, souvent sources d'importants profits. Cette exploration du sous-sol de l'île sera à l'origine de la richesse de l'endroit et de la création de nouvelles villes. Plus généralement, les richesses naturelles seront vues d'un bon œil de la part des colons qui y verront des applications concrètes : le bois servira par exemple à faire des barrières, des ponts ou des maisons, et la chasse aux phoques et à la baleine procurera de confortables revenus aux pêcheries, mais sur une plus courte durée. De nos jours, l'industrie minière contribue toujours à la richesse de l'île.
La colonisation qui survint en Tasmanie fut cosmopolite. L'Empire britannique ne s'est-il pas bâti à partir du commerce ? Et l'arrivée des Anglais en Tasmanie à partir de 1803 d'ouvrir une fantastique ère d'échanges commerciaux entre l'île-Etat et le reste du monde. Au début du XIX ème siècle, ces échanges s'exprimèrent surtout sous la forme de la venue de colons, de prisonniers, de traditions, de biens et d'idées. Les nouveaux venus provenaient des quatre coins du Royaume-Uni et même au-delà, et certains villages de Tasmanie étaient aussi cosmopolites qu'une ville comme Londres. Ils avaient quitté un monde en ébullition, celui qui avait inventé la révolution industrielle. Le premier étage du musée rassemble ainsi les normes, les traditions et les objets que les Européens apportèrent avec eux lors de leur arrivée ici. Je croiserai une foule d'objets aussi hétéroclites que cette boite en bois dans laquelle il était coutume d'enfermer les prisonnières, ou bien ce carrosse (ci-dessous en photo)
de Broughman à bord duquel la Duchesse et le Duc de Cornouailles et de York se déplacèrent en 1901, lors de leur voyage à Hobart.
Nous l'avons vu plus haut, le premier Européen à apercevoir la Tasmanie fut le Néerlandais Abel Tasman. En 1772, les Français débarquèrent sur l'île avec à leur tête Nicolas Thomas Marion-Dufresne. Et les Anglais d'arriver en 1773, et en 1777, avant que le Français D'Entrecasteaux ne s'y précipite aussi en 1792 et 1793, cette fois, à la recherche de La Pérouse. La première colonie sera établie par les Britanniques à Risdon Cove sur la rive est de l'estuaire de la Derwent River en 1803, par un petit groupe venu de Sydney, et conduit par le lieutenant John Bowen, avec pour but d'empêcher le Français Baudin de réclamer l'île. Une seconde colonie fut ensuite établie sur la rive ouest de la rivière Derwent où l'eau potable était plus abondante. Cette colonie donnera plus tard naissance à la ville de Hobart (du nom du secrétaire colonial britannique de l'époque, Lord Hobart). Les premiers colons furent principalement des condamnés accompagnés par leurs gardiens, dont la tâche était de développer l'agriculture et d'autres industries. Peu à peu, d'autres bagnes seront établis sur la terre de Van Diemen, comme celui de Port Arthur (sur la côte ouest). Et l'île de bientôt disposer de son propre système judiciaire et de son Conseil législatif. 1836 verra le passage de Charles Darwin à Hobart, et en 1853, les derniers bagnards anglais mettront le pied sur l'île avant que cette dernière ne change de nom (pour adopter celui de Tasmanie) dans l'espoir de faire oublier ses prisonniers.
Le deuxième étage du musée est consacré aux Aborigènes. »Parrawa,parrawa » (partez, partez!) c'est ce que crièrent probablement les Aborigènes qui virent débarquer les premiers Européens sur cette terre lointaine. Eux qui vivaient ici depuis 40 000 ans allaient devoir cohabiter avec ces nouveaux venus, de gré ou de force. Et une période de conflits de s'ouvrir entre les deux communautés, et pour finir, la Guerre Noire. Le 7 mars 1772, hommes, femmes et enfants du clan aborigène Pydairrerme aperçurent ainsi des marins qui débarquaient du navire français, le Marion-Dufresne, dans la baie Nord, l'actuelle Dunalley. Ce fut le tout premier échange entre Européens et Aborigènes et il y aura des échanges de cadeaux entre les Français et les natifs de l'île. Ces derniers étaient alors subjugués par la pâleur de leurs visiteurs, mais lorsqu'un troisième navire aborda l'île, les guerriers Pydairrerme firent front en lançant pierres et flèches. Ils reçurent en retour des coups de fusils.
Les Aborigènes se mirent en colère car les Européens ne repartaient pas de leurs terres. Bien au contraire, ils en voyaient débarquer de nouveaux par milliers, qui s'emparaient des meilleures terres pour nourrir leur bétail, tout en massacrant leurs principaux gibiers, les kangourous et les émeus. Des échauffourées apparurent lorsque les Aborigènes attaquèrent les troupeaux des Européens, lesquels tiraient de juteux profits de la vente de leurs bêtes. La Guerre Noire éclata bientôt, conflit qui aboutira ni plus ni moins au génocide des natifs de l'île. Pourtant cette guerre ne sera jamais déclarée officiellement et il n'y aura pas de consensus sur sa durée. Le conflit débutera en 1803, atteindra son apogée dans les années 1820 pour s'achever dix ans plus tard, avec l'installation des Aborigènes survivants sur l'île de Flinders. Les plus violentes attaques proviendront des bushrangers (hors-la-loi), des centaines de bagnards en liberté dans le bush. Le pays connait alors vols, incendies et meurtres, tandis que des fermes sont laissées à l'abandon par les colons et qu'on observe l'instauration de la loi martiale en 1828. De nouveaux colons britanniques débarqueront bientôt de la Nouvelle-Galles du Sud (Ouest australien), introduisant ainsi des maladies infectieuses (syphilis) contre lesquelles les Aborigènes n'étaient pas immunisées. De 6000 personnes, la population aborigène tomba à 300 âmes en 1833. George Augustus Robinson, entrepreneur en bâtiment et prêcheur amateur britannique, est alors envoyé sur l’île afin de tenter de ramener la paix, aidé par Truganini, femme aborigène avec laquelle il se liera d'amitié. On promet alors aux survivants aborigènes logements, nourriture et sécurité en attendant que le calme revienne et on les isole sur l'île de Flinders. Le temps fera le reste : les Aborigènes mourront peu à peu de maladies importées par les Européens et ne seront jamais autorisés à retourner sur leurs terres.
Si le cœur vous en dit ou/et en cas de pluie, d'autres musées vous ouvrent leurs portes :
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Musée de l'Armée de Tasmanie, Anglesea Barracks, Davey Street, Hobart : http://www.armymuseumtasmania.org.au
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Narryna Heritage Museum, 103, Hampden Road, Battery Point, Hobart :http://www.tmag.tas.gov.au/visitor_information/narryna_heritage_museum
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Penitentiary Chapel Historic Site, à l'angle des rues Brisbane et Campbell : http://www.penitentiarychapel.com
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Musée des Transports de Tasmanie, 28, Anfield Street, Glenorchy : http://www.railtasmania.com/ttms
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Runnymede, 61 Bay Road, New Town : http://www.nationaltrust.org.au/places/runnymede
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Mona, 655 Berriedale Road, Berriedale : http://www.mona.net.au
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Mawson's Huts Replica Museum, à l'angle des rues Morrison et Argyle, Hobart : http://www.mawsons-huts-replica.org.au
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Musée Maritime, 16 Argyle Street, Hobart : http://www.maritimetas.org
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Cascades Female Factory Historic Site, 16 Degraves Street, Hobart Sud : http://www.femalefactory.org.au/contact-us
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Brasserie Cascade, 131 Cascade Road, Hobart Sud : http://www.cascadebrewerycom.com.au
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Alport & Museum of Fine Arts, Rez-de-chaussée, 91, Murray Street, Hobart : http://www.linc.tas.gov.au/allport/Pages/Allport.aspx
INFOS PRATIQUES :
- Site internet de la ville de Hobart : http://www.hobartcity.com.au/Home
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Office du tourisme de Hobart : http://www.hobarttravelcentre.com.au/
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Musée de Tasmanie, Dunn Place à Hobart. Tél: 03 6165 7000. Ouvert du mardi au dimanche, de 10h00 à 16h00. Entrée libre. Prévoir une pièce de 2 AUD$ (restituée à la fin) pour déposer ses effets personnels dans un casier près de la réception. Prise de photos autorisée sans flash. Il est possible de se garer sur la Place Dunn (face au musée) et de payer en liquide ou par CB. Site internet : http://www.tmag.tas.gov.au