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Exposition "Federation Street"
(Musée Régional de Burnie, Burnie, Tasmanie, Australie)
Heure locale


Jeudi 24 novembre 2016

 

Vaste programme que cette visite matinale au Musée régional de Burnie. L'exposition permanente « Federation Street » offre aux visiteurs une page d'histoire exceptionnelle sur ce qu'était la vie quotidienne dans cette ville qu'on appelait jadis Emu Bay. Inspirée des rues reconstituées du Musée de York (Angleterre), le Musée des Pionniers créé en 1971 fut alors le premier village de ce type en Australie, c'est à dire construit en intérieur. Peter Mercer en est l'instigateur et a ainsi reconstitué une réplique d'une rue typique de Burnie, avec ses différents corps de métier et, pour chacun d'entre eux, leur devanture. A chaque échoppe, une information détaillée permet au visiteur d'en apprendre beaucoup sur le thème abordé, et les nombreux objets exposés (qui furent rassemblés depuis 1942 par notre concepteur) contribuent à rendre ces vitrines plus féeriques les unes que les autres.

A l’époque, les maisons de Burnie étaient bâties en bois, matériau très accessible à tous, et abondant, compte tenu de la densité des forêts de la région du nord-ouest. Le bois utilisé pour la construction de la rue Federation Street est issu de la récupération de planches à la suite de la destruction d'anciennes maisons ou boutiques du siècle dernier. Les styles architecturaux des maisons reconstituées sont de cinq types, ont été choisis avec soin, et sont issus du nord-ouest de la Tasmanie. Une partie de la rue, plus riche de ce point de vue, représente des échoppes commerciales, tandis qu'en face, il s'agit surtout de la refonte d'un cottage typique de la région, avec ses différentes pièces. Pour ne pas trop barioler l'ensemble, on choisit seulement deux couleurs dominantes, parmi les plus populaires ici dans les années 1900. Et de redessiner, à partir de documents originaux, les enseignes commerciales qui figurent sur les devantures. Cette rue Federation Street ne retranscrit pas les riches demeures des débuts de la ville, mais au contraire, les habitats populaires des artisans et des commerçants d'alors. Le tout, au son des bruits authentiques (pas et hennissements de chevaux, bruits familiers de la vie quotidienne et conversations de voisinage). A l'époque, l'électricité, le gaz et l'automobile n'avaient pas encore fait leur apparition. Il est 17h30 et nous sommes en hiver, ce qui explique l'obscurité, et vous entrez maintenant dans une impasse....Federation Street !


 

Vingt ans après l'établissement du premier campement à Emu Bay (la Baie de l'émeu), il existait ici deux pubs, la Burnie Tavern (dès septembre 1847) et Emu Bay Inn (ci-dessous), tenue par William Castles jusqu'en 1850. Ces petits hôtels offraient un minimum de confort et surtout un point de rencontre pour les gens des alentours. De nos jours, seule la Burnie Tavern a survécu, après avoir été un temps menacée de démolition, mais sauvée in-extrémis par un groupe de personnes déterminées, au début des années 1970. C'est désormais le plus vieil édifice autour du parc de la ville. Cette auberge prospérera notamment grâce à la famille Wiseman qui saura faire fructifier cette affaire, ainsi qu'une autre détenue à Waratah. Point d'enseignes lumineuses pour ces hôtels de jadis mais une enseigne attirant l'oeil le jour, et une chandelle de paraffine pour indiquer au voyageur l'entrée de l'établissement une fois la nuit tombée. Au pub, trônait alors un phonographe, machine à succès d'antan qui distillait sa musique aux clients, il y a encore 110 ans. Merci à Thomas Edison !

 

Nettement moins agréable, le cabinet du dentiste, juste à côté (ci-dessous). En 1897, Arthur Stewart Lucadou-Wells ouvrait ce cabinet dans Wilson Street, à Burnie. Issu d'une famille réputée de Launceston, notre homme était l'ainé des frères et pratiquait son art à Burnie mais aussi à Stanley. Tous les garçons de cette famille avaient ainsi choisi d'exercer le même métier que leur père, dans des endroits différents, et jusque dans les années 1950. Dès 1908, cette famille avait déjà rassemblé suffisamment d'argent pour s'offrir l'une des plus grandes et élégantes demeures de la ville dans Wilson Street. Et une partie de cette maison d'abriter les cabinets dentaires avec l'incontournable « roulette » aussi effrayante qu'utile.

 

Les vitrines suivantes nous amènent justement à découvrir à quoi ressemblait une pension de famille, comme celle de Jabez Waterhouse Smithies et de son épouse. Smithies était arrivé à Burnie en 1884, en tant qu'agent de compagnie maritime, et ouvrit un an plus tard un cabinet d'assurance en plus de ses activités portuaires. Très actif, il possédait également un petit bureau d'agent de douane où il supervisait les chargements de marchandises pour une compagnie maritime. Devenu riche vers 1900, il investira dans cette pension de famille et ce café. Le salon du cottage (ci-dessous) était cosy avec son style victorien, ses décorations et ses portraits. Le plafond était bas, ce qui rendait la pièce plus facile à chauffer l'hiver. L'habillage des murs était réalisé en bois de pin, accentuant la chaleur du lieu, et on peut aussi observer une cheminée. La scène suivante représente une cuisine, puis, plus loin, une salle de bain, aussi reconstituée. Jadis, le sol de la cuisine était généralement en pierre et la pièce était séparée du reste de la maison, pour des raisons de sécurité (en cas de feu par exemple). Il y a un siècle, rappelons-nous que le bois restait la seule source d'énergie disponible. Et les maisons disposaient souvent d'une cuisinière à bois. Les ustensiles étaient souvent importés de Sheffield (Angleterre), et l'eau chaude, toujours disponible pour différents usages dont la préparation du thé. La dernière partie du XIX ème siècle verra toutefois l'apparition d'une fontaine à eau chaude, grosse bouilloire munie d'un robinet, qui fournissait assez d'eau pour un bain ou pour une lessive. La salle de bain disposait justement d'un baquet en acier galvanisé placé tout près de la fontaine d'eau chaude. Quant à la lessive, elle était faite à l'intérieur d'un local séparé de la maison, dans un grand chaudron placé sur un feu, ou dans un récipient en cuivre. Et l'on se servait de bâtons de bois appelés dolly, pour remuer le linge à la main. Avant l'arrivée des détergents, seul le savon et l'eau chaude permettaient d'effectuer un bon lavage du linge.

 

Thomas Kenner, émigré écossais des années 1880, fut charpentier à Burnie il y a un siècle (ci-dessous). On lui devra de nombreuses bâtisses datant de la fin du XIX ème , comme Breckenborough, construite pour le Docteur Joseph Armitage ou Menai, au profit de William Jones. Les premiers outils arrivèrent par bateau de Sydney Cove et avec les premiers Européens débarqués en Tasmanie, en 1803. Ces outils étaient indispensables au travail de l'artisan qui ne cessera par la suite d'affiner ses réalisations. La vitrine ci-dessous permet de distinguer plusieurs de ces outils.

 

La crèmerie était l'endroit où l'on fabriquait le beurre (ci-dessous). Fin 1892, le plus célèbre des hommes d'affaires de la ville, alias Capitaine William Jones, fonda cette boutique, tout juste trois mois après l'installation de la première crèmerie de Tasmanie, la Table Cape Butter Factory de Wynyard. En offrant aux fermiers du coin de transformer leur lait en beurre, ce genre d'établissement valorisait à sa façon l'agriculture locale. Plus tard, en 1928, plusieurs de ces crèmeries s'associeront pour créer la coopérative de la région nord-ouest, jusqu'à faire partie intégrante en 1981, de la United Milk Tasmania Ltd.

 

Le photographe avait, lui aussi, son échoppe (ci-dessous) : les premières photos de la côte nord-ouest de la Tasmanie seront prises par un photographe originaire de Hobart, Frederick Frith. Les clichés montrent ainsi Circular Head en 1858, avec le rocher The Nut et Stanley, probablement à la demande de la compagnie Van Diemen. Burnie aura aussi ses photographes, comme Thomas Fleet King, des photographes itinérants (ou pas) qui oeuvreront d'abord dans le domaine du cliché commercial (photos de maisons). Devant l'afflux de population à la suite de l'ouverture des mines dans l'ouest (Queenstown) ou au Mont Bischoff, la demande explosera et requerra d'autres photographes (comme J.W. Beattie & J. Bishop Osborne par exemple). Ernest Albert Winter, lui, restera le plus connu des studios photo de Burnie, appelé alors Tasma Studio. Et de faire des portraits, des illustrations de dépliants touristiques et des cartes postales sa spécialité. Originaire de la région australienne de Victoria, il saura très vite se faire apprécier à travers les clichés qu'il fera de la petite ville, dès son arrivée. La photo ci-dessous représente Tasma studio, tel qu'il était en 1909. L'affaire existe encore de nos jours, sous le nom de Winters Studio, et est dirigée de main de maitre par l'arrière-petit-fils du fondateur.

 

L'épicerie (ci-dessous) accueillait jadis aussi un bureau de poste et de télégraphe. C'était l'endroit incontournable pour de nombreux pionniers qui venaient s'y approvisionner. La boutique fera ainsi office de bureau de poste jusqu'à l'ouverture de la première Poste à Emu Bay, en 1865. Et deux ans plus tard, le télégraphe de faire son apparition, après l'installation d'un câble reliant la Tasmanie au continent australien, à Low Head, en 1859. La machine télégraphique était alors dissimulée derrière le comptoir de l'épicerie et des messages étaient réceptionnés en Morse, tandis que l'opérateur en tapait d'autres sur son clavier. Ce moyen de communication était alors bien plus rapide que le courrier. Et l'arrivée du télégraphe à Burnie en 1867, d'améliorer ses liens avec l'Australie, puis avec le reste du monde, dès 1872. Le téléphone sera installé en ville quelques années plus tard, en 1886, mais il faudra toutefois attendre la fin des années 1890 pour que celui-ci équipe les foyers.

 

Je passerai devant les échoppes du cordonnier et du forgeron, avant d'atteindre celle du premier journal local de Burnie, le Wellington Times (ci-dessous). La presse restera ici le seul moyen de communication de masse jusqu'à l'arrivée des stations de radio dans les années 1920. Le journal en question publira son premier numéro le 1er Octobre 1890, sous le nom de The Times. C'est Robert Harris qui développera ce média avec ses deux fils, Robert et Charles, en fondant Harris & Company. Robert Senior avait pourtant connu un départ difficile dans la vie, suite à l'arrestation de sa mère, pour vol, alors qu'il n'avait qu'un an, en 1831. Il sera ainsi élevé dans un orphelinat jusqu'à ce que sa mère se marie avec un ancien détenu oeuvrant en tant qu'imprimeur. C'est avec lui que Robert fera ses premières armes dans la presse. A l'époque du boom économique (du développement de l'agriculture et de l'ouverture des mines) en Tasmanie, le moment était parfait pour fonder un journal, à condition cependant d'assurer ses arrières en développant la vente d'encarts publicitaires et d'abonnements. Au début, le Wellington Times ne fut qu'un modeste journal, de quatre pages et ne sera publié que deux fois par semaine. Bientôt, Robert Harris réalisera l'importance de se développer à l'échelle régionale, et ouvrira un bureau à Devonport en 1895, puis lancera le North Western Advocate et Agricultural & Mining Gazette en 1899. Et de bientôt publier ces journaux quotidiennement. Avec le temps le Wellington Times fusionna avec d'autres publications et devint le Emu Bay Times & North West & West Coast Advocate. Ces journaux paraissent encore aujourd'hui en tant que quotidien, avec un tirage journalier de 30 000 exemplaires.

 

Je tombe pour terminer sur une vieille affiche (ci-dessous) annonçant la vente de terrains à Emu Bay. Nous sommes alors en 1905 et on informe les investisseurs potentiels que Burnie a tous les atouts voulus pour investir : port en eau profonde équipé de quais pouvant recevoir des bateaux à vapeur d'au moins 7000 tonnes. On vante également les liaisons maritimes de Burnie vers Melbourne et Sydney, vers King Island, mais aussi en direction de Strahan et de Launceston. Le train relie déjà la ville à Launceston, Hobart et la côte ouest de la Tasmanie. On met enfin en valeur la qualité des terres agricoles qu'offre le nord-ouest de l'île, sans oublier la proximité du port, du bureau de Poste, de la gare et...de la plage. On offre même aux acheteurs éventuels le prêt d'argent, à 5% de taux d'intérêt.

 

INFOS PRATIQUES :

  • Burnie Regional Museum, Little Alexander Street, à Burnie. Tél : 03 6430 5746. Ouvert du lundi au vendredi de 10h00 à 16h30, les samedi et dimanche de 13h30 à 16h00. Entrée adulte : 8 AUD$. Accès internet gratuit : Museum (code 3682-4197). Site internet : http://www.burnieregionalmuseum.net/Home
  • Un grand merci au musée pour son accueil chaleureux !

     

 

 

 





 



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