Vendredi 2 décembre 2016
C'est, une fois n'est pas coutume, sous un soleil radieux que je me rends aujourd’hui du côté de la Bay of Fires, de son indigène « Larapuna », sur la côte nord-est de la Tasmanie. Cette zone naturelle protégée s’étend depuis la baie de Binalong jusqu'à Eddystone point. Mais pourquoi donc avoir donné un tel nom à cette baie ? C'est le Capitaine Tobias Furneaux qui , en 1773, apercevant au large des feux allumés par les Aborigènes le long de cette côte, songera à la surnommer ainsi. Navigateur anglais et officier de la Royal Navy, Tobias Furneaux accompagnera James Cook lors de son second voyage d'exploration. Et c'est en 1771 qu'il se verra confier le commandement du navire « Adventure », lequel suivra « Resolution », le bateau de James Cook pour cette nouvelle mission.
La Bay of Fires est avant tout une région de plages au sable étonnamment blanc, à l'eau bleu cristalline et aux rochers oranges (ci-dessous). La couleur orangée de ces blocs de granit est due à une forme de lichen qui les recouvre et non au dernier caprice pictural d'un quelconque amateur d'art contemporain. La partie que je visite ce matin est la partie sud de cette immense baie. Je quitte ainsi St Helens après avoir programmé sur mon GPS ma destination finale (là où la route se termine), The Gardens.
Une vingtaine de kilomètres seulement me sépare de mon point d'arrivée. La route est sinueuse mais en bon état, et je laisserai les autres automobilistes me dépasser car je suis bien décidé à rouler au pas afin de ne rien manquer. Sur ma route, je poursuivrai d'abord jusqu'à Binalong Bay (ci-dessous) qui offre des paysages somptueux. Je m'arrête un instant au lagon Grants, qui n'offre rien d'exceptionnel si ce n'est une étendue d'eau isolée de l'océan. Ma route m'offrira ensuite plusieurs occasions de faire de jolies photos, et d'atteindre bientôt la passerelle panoramique de Boat Harbour Point. Binalong Bay était à l'origine un hameau de pêcheurs, devenu depuis un village dont je ne distinguerai que les riches villas qui se trouvent le long de mon parcours. Les quelques panneaux d'information rencontrés lors de mes haltes mentionnent l'observation des baleine. Cette zone est en effet propice à ce genre d'attraction et des croisières comme celle d'Ecotours (voir infos pratiques) offrent aux amateurs la possibilité de s'approcher de ces énormes cétacés. Les chasseurs de baleines sévirent dans ces eaux bien avant l'essor de l'industrie baleinière au milieu des années 1800. Et cela ne les gênait pas à cette époque d'harponner des cétacés femelles, bien qu'ils fussent détenteurs de licences de pêche pour les zones de la Bay of Fires, Eddystone Point et St Helens Island. Heureusement, l'animal est aujourd'hui protégé, et visible sur toute la côte Est de Tasmanie. Il existe dans ces eaux près de 40 espèces de baleines et de dauphins, de quoi contenter les plus exigeants des amateurs de faune marine.
Il n'était alors pas rare de tomber sur d'immenses squelettes de baleines, gisant à Skeleton Bay (d'où son nom). Ma route se terminera au Boat Harbour Point mais il est en réalité possible d'emprunter une piste pour se rendre jusqu'à Dora Point, en passant par Skeleton Bay et de terminer le parcours à pied. A cet endroit, la côte est plus accidentée. On fait aussi mention de la vieille auberge du Cygne noir (photo ci-dessous), alors fréquentée par les pêcheurs et chasseurs de poissons en tous genres. Cette auberge était alors appréciée pour son rhum et son tabac à rouler. On peut encore admirer l'édifice le long de la route pour Bilalong Bay, à trois kilomètres de St Helens. Le petit musée de St Helens (situé à l'office du tourisme) expose de nombreux objets utilisés jadis pour la chasse à la baleine, dont un de ces tonneaux de mille litres qui servait autrefois au transport de l'huile de baleine. Je tomberai aussi sur un panneau rappelant que les cétacés restent des animaux sauvages et donnant aux plaisanciers des conseils de prudence, comme, par exemple, de ne pas s'approcher d'une baleine à moins de 300 mètres.
La côte de la Bay of Fires abrite de nombreuses espèces animales. D4un côté se trouve les plages et l'océan, de l'autre, les lagons (Grants Lagoon,Sloop Lagoon et Big Lagoon) et la forêt du Mont Pearson. A chaque zone correspond une faune. Ainsi entendrai-je croasser les grenouilles côté lagon, et observerai davantage d'oiseaux de mer côté mer. Le camping est possible sur cette côte mais à certaines conditions. Ainsi, m'étant arrêté à Cosy Beach, j'observerai plusieurs camping-cars rassemblés sur une aire boisée en bordure de la plage. Le soleil est au rendez-vous, certes, mais un fort vent souffle aussi par rafales. Tout particulièrement à The Gardens, au terme de ma promenade.
The Gardens est un endroit , plus qu'un village, car je n'y verrai aucun commerce en traversant la zone, mais des maisons plus ou moins isolées, dispersées ici et là. J'y apercevrai quelques troupeaux de bovins dans des champs, mais pas de kangourous. Il y en a pourtant, notamment ici le bettong de l'Est, ou « bettongie » de Tasmanie, minuscule petit kangourou ressemblant un peu à un rat, autrefois abondant au sud-est du continent australien mais qui a disparu depuis, mangé par les renards introduits par les Européens. On ne le trouve plus qu'ici, sur la côte Est de Tasmanie. Animal nocturne ce petit marsupial se nourrit essentiellement de champignons souterrains qui ressemblent à des truffes, mais aussi de tubercules et de racines. Il vit surtout dans les bois d'eucalyptus où il camoufle un nid fait de feuilles et d'herbes. Là encore, l'introduction du renard (pourtant illégale) depuis 2004 risque d'aboutir à la disparition de cette espèce.
C'est Lady Jane Franklin (ci-dessous) qui donnera le nom de Jardins (The Gardens) à cet endroit en 1835, car, à son arrivée dans Georges Bay en 1835, avec son mari Sir John Franklin, elle découvrira des acres de terres recouverts de fleurs sauvages, notamment le Stylidium Dilatatum à feuilles larges, très répandu ici. L'eucalyptus pousse également à cet endroit et est très apprécié des perroquets. Quant à Lady Jane Franklin, elle était l'épouse de l'explorateur John Franklin. Elle fera la connaissance de son futur époux par le biais de sa femme, la poétesse Eleanor Anne Porden. Cette dernière décèdera en 1825, et John et Jane de se fiancer trois années plus tard. Jane deviendra bientôt la première femme européenne à voyager outre-mer entre Port-Phillip et Sydney, se faisant apprécier pour sa gentillesse et son esprit charitable. Elle contribuera ainsi à l'ouverture d'écoles, et se penchera même sur le sort des femmes détenues. Avant de rebrousser chemin, et depuis l'observatoire installé sur une petite colline, je pourrai observer la Bay of Fires jusqu'à Eddystone Point. Un vrai dépaysement.
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